Dimanche 4 août 2019
La thèse de Lahouari Addi est contestable
Je tiens à dire que mon respect pour l’intelligence de l’homme est de longue date, même si je suis souvent en désaccord. Je n’irai certainement pas jusqu’au « Lahouari a-dit », titre d’un article sur ce même journal. Lahouari Addi n’a jamais été le valet du régime militaire mais on peut le contredire souvent. C’est ce qui va être fait.
Lahouari Addi brandit la même thèse que j’ai entendu depuis un demi siècle lorsque la colère grondait ou était suspectée naissante au regard du régime militaire.
Son analyse est connue depuis longtemps, la désobéissance civile serait un désastre pour le peuple lui-même car cela raidirait les militaires qui deviendraient violents et surtout, cela entraînerait une catastrophe économique pour un peuple qui en souffrirait.
Ma thèse, de très longue date, est totalement à l’inverse de celle de Lahouari Addi. Qu’il m’explique ce que les Algériens auraient à perdre dans cette ultime action, la seule qui leur est possible.
La violence d’État en retour ? Il semble oublier qu’elle est présente depuis un demi-siècle et aucun appel à la raison, surtout par les écrits des sociologues, n’ont pu l’adoucir.
La chute de l’économie ? Est-il au courant que toutes les richesses sont accaparées par ceux pour lesquels il demande une action moins forte ? Qu’ont à perdre les opposants et le peuple sinon le meilleur pour leur avenir ?
Je n’ai jamais cessé d’être face à des intellectuels qui nous disaient et disent encore : «Cela va changer si vous y allez avec intelligence et raison». Comme si nous étions illettrés et que nous n’avions pas un niveau intellectuel suffisant pour comprendre que la raison est meilleure conseillère. Mais il est des limites pour lesquelles cette raison opposée aux généraux est leur meilleure alliée.
Les généraux algériens ont toujours eu comme alliés des forces qui chuchotaient au peuple en colère «Ce n’est pas le moment, ce n’est pas la bonne manière, etc.». Depuis 1962, ce n’est jamais le bon moment ni la bonne manière.
Depuis les années 1990 j’appelle à la désobéissance civile, particulièrement celle du refus du service militaire, une cause d’abrutissement et de soumission au régime militaire.
Je ne vois absolument pas, entre la kalachnikov et la désobéissance civile, ce qu’il reste pour se débarrasser de ce régime des généraux. Je partagerais l’avis de Lahouari Addi s’il s’agissait de la première option mais absolument pas pour la seconde, la seule possible, forte et sans violence.
Monsieur Lahouari Addi n’est absolument pas l’intellectuel de service comme il y en a tant mais on peut être radicalement en désaccord avec un homme honorable.
Et c’est souvent le cas en ce qui me concerne.