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La Turquie refuse tout rôle pour les Kurdes en Syrie

Hakan Fidan et al Joulani

Hakan Fidan et al Joulani

Le nouvel homme fort de la Syrie, Ahmad al-Chareh, a reçu dimanche 22 décembre le chef de la diplomatie turque, deux semaines après la chute du pouvoir de Bachar el-Assad. Le Turc n’a pas hésité à s’ingérer dans les affaires des nouvelles autorités syriennes.

Le ministre turc des Affaires étrangères a estimé qu’il n’y avait pas de place pour les Kurdes de Syrie dans la nouvelle organisation politique du pays après la chute de Bachar el-Assad. Ahmad el-Chareh, a déclaré que son administration travaillait à la protection des minorités, soulignant l’importance de la « coexistence » dans le pays multi-ethnique et multiconfessionnel.

S’exprimant aux côtés du nouveau dirigeant syrien Ahmad el-Chareh, Hakan Fidan a déclaré que les nouvelles autorités de Damas s’étaient dites prêtes à gérer les prisonniers du groupe État islamique détenus dans le nord-est de la Syrie par les Forces démocratiques syriennes (FDS) à large dominante kurde, soutenues par les pays occidentaux.

De son côté, le nouveau dirigeant de la Syrie, Ahmad al-Chareh, a déclaré que toutes les armes du pays passeront sous le contrôle de l’État, y compris celles détenues par les forces dirigées par les Kurdes. « Nous ne permettrons absolument pas que des armes échappent au contrôle de l’État […], qu’elles proviennent des factions révolutionnaires ou des factions présentes dans la zone des FDS [Forces démocratiques syriennes, dominées par les Kurdes, NDLR] », a-t-il déclaré à l’occasion de la rencontre avec le dirigeant turc.

Ankara demande en effet à Damas de désarmer les YPG les combattants kurdes qui évoluent de l’autre côté de la frontière. « On sent bien que la Turquie est sensible aux appels occidentaux à ne pas créer plus de souffrances pour atteindre ses objectifs, analyse pour RFI Marc Pierini ancien ambassadeur de l’Union européenne en Syrie et en Turquie. Mais le ministre Fidan dit clairement que cela va dépendre des arrangements qu’ils vont faire à Damas. Si cela va à la Turquie très bien, si cela va prendre trop longtemps, ils prendront des mesures. »

Le fer de lance des FDS est constitué par les milices kurdes YPG, émanation du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) qui combat les autorités turques depuis des décennies et qui est considéré comme une organisation terroriste par Ankara, mais aussi les États-Unis et l’Union européenne. La Turquie a toujours refusé que les YPG jouent un quelconque rôle politique en Syrie et a fortiori qu’ils obtiennent une forme d’autonomie, ce qui a motivé son soutien militaire à certains groupes rebelles islamistes syriens qui continuent de combattre les Kurdes dans plusieurs villes du nord de la Syrie.

« Je pense que l’on peut résoudre tous les problèmes avec le dialogue entre les Syriens, déclare Khaled Issa, envoyé spécial en France du Rojava, la région autonome kurde de l’est syrien. Et j’espère que les autorités de Damas ne vont pas accepter la mainmise totale de l’État turc, un État voisin, mais qui convoite malheureusement une partie de l’État syrien. »

« La victoire » appartient aux Syriens et à « personne d’autre »

La « victoire » de la chute du président syrien Bachar el-Assad appartient aux Syriens et à « personne d’autre », a affirmé le chef de la diplomatie turque.

« Mes chers frères et sœurs, cette victoire est la vôtre et celle de personne d’autre. Grâce à vos sacrifices, la Syrie a saisi une opportunité historique », a-t-il déclaré lors de conférence de presse conjointe avec le nouveau dirigeant de la Syrie, à Damas. La Turquie avait rejeté mercredi les propos du président américain élu Donald Trump, qui a qualifié la victoire des rebelles en Syrie de « prise de pouvoir inamicale » par Ankara.

Hakan Fidan s’est dit confiant dans le fait que le président élu américain Donald Trump retirerait les troupes américaines de Syrie après sa prise de fonction dans un mois et romprait le partenariat entre Washington et les FDS.

Il a par ailleurs appelé la communauté internationale à lever sans délai les sanctions imposées à la Syrie à l’époque de Bachar el-Assad pour permettre la reconstruction du pays.

Le nouveau dirigeant syrien dit œuvrer à la protection des minorités

Ahmad el-Chareh, a déclaré que son administration travaillait à la protection des minorités, soulignant l’importance de la « coexistence » dans le pays multi-ethnique et multiconfessionnel.

« Nous nous efforçons de protéger les confessions et les minorités contre tout conflit entre elles », et contre les acteurs « extérieurs » qui tentent d’exploiter la situation « pour provoquer une discorde sectaire », a déclaré le nouvel homme fort de Damas lors de cette conférence de presse, ajoutant : « la Syrie est un pays pour tous et nous pouvons coexister ensemble ».

La visite à Damas du chef de la diplomatie turque avait été précédée par celle du chef des services de renseignements turcs, Ibrahim Kalin, quatre jours seulement après que des groupes rebelles dominés par des islamistes radicaux se sont emparés du pouvoir le 8 décembre.

Avec RFI

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