Dimanche 23 août 2020
L’Algérie vit-elle un dilemme ?
« Il faut que tout change, pour que rien ne change! » Cette réplique extraite du roman de l’écrivain italien Giuseppe Tomasi di Lampesdusa, et, ayant donné lieu, par la suite, à l’adaptation cinématographique « Le guépard », du réalisateur Luchini Visconti, semble coller parfaitement à réalité algérienne.
Accusé de tous les maux de la terre par ceux qui l’ont encensé, jusque même la veille du Hirak, voire après, le clan Bouteflika, voué aux gémonies par toute l’Algérie, semble reprendre, aujourd’hui, du poil de la bête. Le secret? Derrière la récente visite du président Tebboune à la grande mosquée d’Alger, nombre d’observateurs y décèlent une tentative de réhabilitation sournoise de l’oeuvre bouteflikienne, sur fond d’un climat liberticide, dont les contours restent encore flous.
L’affaire Drareni, cristallise, à elle seule, tous les ingrédients d’une contre-révolution, que même la réouverture du club des pins au public, après plus d’une vingtaine d’années de fermeture, n’est pas parvenue à cacher. Il semble que la soldatesque médiatique, auparavant mise au service du roi déchu, se mobilise désormais pour forger le profil-type du « journaliste modèle », servile de l’éthique imposée par la dictée officielle.
En face, la société civile et les défenseurs du Hirak craignent un retour à la case départ, avec le redéploiement des même méthodes d’intimidation contre la presse privée et les activistes politiques, la censure via la régulation de la manne publicitaire, l’achat des consciences et la séduction rentière.
En toile de fond, l’annonce de l’inauguration de la grande mosquée, le 1er novembre prochain, participe d’une double opération de diversion. D’abord, d’une part, l’exécutif donne l’impression de se revendiquer, en quelque sorte, de l’héritage bouteflikien, pourtant entaché aux yeux de la majorité des Algériens de corruption. Ce qui est en soi une aberration dans la mesure où, très en colère, ces derniers peuvent adopter une position radicale, contre cette exploitation démagogique « médiatisée », d’une réalisation d’une « époque honnie ».
De l’autre, l’équipe Tebboune est en train de jouer, semble-t-il, sur l’affect religieux des masses, pour ressouder les liens distendus de la confiance avec la base. Une opération à haut risques, vu que les attentes des Algériens, sortis dans la rue un certain 22 février 2019, dépassent de loin l’horizon d’une mosquée, fût-elle la deuxième plus grande au monde !
En vérité, après les retombées néfastes de l’attente « vaine » du changement, la crise du Coronavirus et les effets du confinement sur une société appauvrie par la mauvaise gestion, le verrou autoritaire tombé sur le secteur de la presse, il y a une déception populaire palpable dans la rue algérienne.
En témoigne le nombre croissant de tentatives d’immigration clandestines avortées ces derniers mois. La jeunesse formule des craintes sérieuses quant à une réinstallation « systématique » des fondations de la dictature, avec en plus, l’illusion perfide qu’il y a changement. Ce qui est, psychologiquement, plus pesant sur les consciences, et trop dramatique, sur le plan des conséquences « politiques ».