Mardi 14 mai 2019
L’armée : manoeuvres et influences !
L’avenir d’une nation repose-t-il sur une démocratie libérale et une économie de marché ou sur une dictature militaire et une économie rentière ? L’une devant déboucher sur la liberté, l’autre sur la sécurité.
Une interrogation, les démocraties sont-elles le monopole exclusif des sociétés occidentales et les dictatures militaires une fatalité des sociétés arabes et africaines ? Un bilan, les régimes autoritaires se portent bien avec la protection en plus et les démocraties se portent mal avec une liberté en déclin. La guerre mondiale contre le terrorisme et le règne des oligarchies financières ne sont pas étrangères à cette situation. Une certitude, c’est la nature des ressources d’un pays qui détermine son régime politique.
Dans une économie dominée par la rente ou par l’endettement, l’Etat est d’abord et avant tout intéressé par le développement et la reproduction du pouvoir. Mais dans la mesure où la classe au pouvoir est celle qui détient le pouvoir économique, la politique tend en partie à perpétuer ses avantages et à consolider sa position, la conforte l’Etat dans sa position de rejet de tout calcul économique facilite la médiation et les arbitrages politiques, elle achète la paix sociale permanente et pousse à l’acceptation « docile » par la population de l’ordre établi.
Une question : l’existence précaire d’une rente énergétique peut-elle épargner la population d’une exploitation capitaliste en vue de dégager une plus-value interne susceptible d’être investie localement ?
En Algérie, le pouvoir économique que procure la rente à l’Etat est centralisé dans la mesure où il est l’attribut de l’Etat, propriétaire des ressources du sous-sol.
La rente ou l’endettement qu’elle permet a donné naissance à un mode de gestion étatique centralisé et autoritaire. Ce qui nécessite une concentration entre les mains de la puissance publique de la rente énergétique se traduit par l’extension de l’appareil administratif et le développement des fonctions économiques et sociales des pouvoirs publics. L’économie de rente est largement ouverte sur l’extérieur. Les exportations d’hydrocarbures constituent l’unique possibilité sinon l’unique recours au financement d’un vaste programme d’importation.
L’organisation étatique fortement structurée réside dans la nature même de l’armée, c’est à dire selon le modèle hiérarchique centralisé et disciplinaire. Dans ces conditions, l’armée ne pouvait produire que de l’étatisme c’est-à-dire « l’Etat est tout,, la société est rien » selon la formule consacrée. L’armée est le principal instrument garant de la formation économique et sociale algérienne. Son activité s’étend à tous les secteurs de la vie économique et sociale.
L’envoi des militaires dans le civil vise la constitution d’une sorte de club de managers sur lequel le pouvoir prend appui. L’armée est le principal instrument garant de la formation économique et sociale algérienne. Son activité s’étend à tous les secteurs de la vie économique et sociale. Pour l’essentiel, le gouvernement de la société algérienne a été exercé sinon directement par l’armée, du moins indirectement par les méthodes militaristes.
La vision de l’Etat par l’armée se caractérise par le rejet de l’Etat libéral. Ses faveurs vont vers le modèle soviétique. Le sort du régime algérien est structurellement lié à celui des militaires.
L’armée est détentrice d’une légitimité historique qui la place en position de force. Nous nous trouvons en présence d’un régime politique à hégémonie militaire durable.
Même si elle n’agit pas au grand jour, l’armée demeure toujours au centre du pouvoir. On comprend pourquoi les militaires s’acharnent-ils à rester au pouvoir. Les militaires ont tendance à réagir lorsque leurs intérêts sont menacés ou du moins perçus comme tels.
Cette réaction toutefois ne traduit pas la défense d’intérêts personnels mais plutôt celle du statut privilégié de l’institution militaire. Il s’agit donc de la défense d’intérêts d’une corporation spécifique mais d’une corporation tout de même. Il y a là un phénomène d’identification aux intérêts et au statut de l’organisation militaire par ses membres.
Bref, l’armée est à l’Etat, ce que la colonne vertébrale est au corps humain, et la rente énergétique est à l’armée, ce que la moelle épinière est aux vertèbres.