On aura tout entendu ! Le président du Conseil de la nation, Salah Goudjil, vénérable apparatchik de 92 ans, soutient que le pays est lié aux jeunes. Cocasse scène dans un pays de jeunes.
L’homme ne craint décidément pas le ridicule, encore moins la contradiction. Salah Goudjil, respectable apparatchik qui aura servi tous les présidents depuis Boumediene se pique de s’adresser au Conseil supérieur de la jeunesse (CSJ), à Oran. « Nous appelons les jeunes à préserver l’indépendance acquise au prix du sang et de grands sacrifices, et à œuvrer au développement économique, social et politique de l’Algérie », conseille-t-il. Sans ciller il les a appelés pour être « la force de frappe de l’économie et du développement national ».
Lui qui squatte les fauteuils et travées du pouvoir depuis l’indépendance devrait ne rien dire. C’est parce que des hommes comme Salah Goudjil sont toujours là malgré leur âge canonique que les jeunes préfèrent risquer leur vie en mer pour aller vivre ailleurs que de continuer à se morfondre dans un pays sans espoir.
Grand donneur de leçon, il ajoute : « Nous attendons de vous de préserver l’Algérie, assurer son présent et son avenir, surtout en cette période dangereuse que vit le monde et l’Algérie». Les 800 jeunes âgés ramenés pour écouter ce raout doivent manger leur chapeau en entendant ce grand-père leur donner des leçons de gouvernance au lieu d’aller profiter de la vie.
L’homme est aussi d’un incroyable cynisme en faisant mine de ne pas savoir qu’il leur bouche l’horizon avec sa présence et celle de sa génération en s’accrochant aux affaires du pays. D’ailleurs son grand âge ne l’empêche pas de soutenir (lisez bien) que les jeunes sont « le socle de l’indépendance ». Mais de quelle indépendance parle le vénérable Goudjil ? La leur ? Non, les jeunes Algériens ne sont ni libres ni indépendants. Il devrait le savoir, lui, le 2e homme de l’Etat ! Les jeunes donc ne peuvent ni s’exprimer librement dans leur pays ni voyager comme ils le souhaitent. Ils sont brimés, embastillés et privésde tout espoir de lendemains meilleur. Il faudra peut-être informer M. Goudjil s’il l’a oublié.
Jamais avare de brosse reluire, il a ajouté en direction de ces jeunes sagement assis à l’écouter que « cet engagement, sous tous ses aspects, nous permettra de préserver l’indépendance de l’économie et de la prise de décision politique, afin que les jeunes de l’Algérie restent porteurs du flambeau, aujourd’hui et demain ». Nous voilà sauvés !
Plus de 800 jeunes de différentes wilayas du pays, âgés de 18 à 35 ans ont été ramenés pour écouter les vénérables occupants du Conseil et d’autres jeunes, disserter sur l’autonomie et l’indépendance. Une assistance qui aurait pu être des arrière-arrière-petits-enfants. Le comble !
Sofiane Ayache