Toujours est-il que l’évocation du droit des Palestiniens à l’autodétermination, c’est-à-dire à avoir leur propre Etat indépendant n’est inscrit que dans le vingtième et dernier point du plan de Trump.
Cela coïncide, pourtant, avec un élan diplomatique sans précédent depuis les accords d’Oslo de 1993, sur fond d’une internationalisation de la recherche d’une solution pacifique et durable pour ce conflit séculaire. Sur ce point-là, Trump semble être à la croisée des chemins. D’un côté, il doit satisfaire le vœu d’Israël, son allié historique et stratégique dans la région, autrement dit, ne jamais reconnaître l’État palestinien. Et de l’autre, il est poussé à répondre favorablement aux attentes des capitales arabes, en particulier, l’Arabie Saoudite qui font de l’État palestinien une exigence de premier ordre.
C’est dans cette perspective qu’il faut comprendre l’insistance de ces dernières pour la présence des pays européens, à commencer par la France dans ce processus de paix ou plutôt de « recherche active de cessez-le-feu » comme garants : les nations arabes se sentent à la fois « orphelines » et isolées face à Washington quasiment « versatile » !
L’initiative de Macron d’une reconnaissance de l’État palestinien avait, il est vrai, poussé cette logique à son extrême. Après le raid sioniste sur Doha, le 9 septembre dernier, Trump a décidé de prendre les devants, en faisant pression sur Netanyahou parce qu’il a compris que la crédibilité américaine au Moyen-Orient en avait pris un sérieux coup.
Qatar, son allié dans le Golfe, héberge pour rappel sa plus grande base militaire au Moyen Orient et ce n’est pas rien ! Certes, si Trump fait jusque-là de l’ironie et des tweets contradictoires un langage diplomatique particulièrement délirant et outrancier, avec ses projets fantasques comme celui de la « Riviera » à Gaza ou encore celui de l’expulsion des Gazaouis de leur terre ancestrale, il n’en reste pas moins, sur le plan géopolitique, un homme « stratège » en cohérence, sur le fond, avec la politique américaine au Moyen-Orient.
Quoique, il rompt sur la forme, avec à la fois les néoconservateurs-interventionnistes de l’époque de Bush Junior engagés frontalement dans des changements de régime des « rogue states » (pays-voyous), comme en 2003 lors de l’invasion de l’Irak de Saddam, et aussi avec ses prédécesseurs démocrates un peu trop « prudents ». Obama n’était-il pas préoccupé, avant tout, par le pivot vers l’Asie ?
Et au lendemain du « Déluge d’Al-Aqsa » du 7 octobre, Biden, ami indéfectible d’Israël, n’avait-il pas conseillé au Premier ministre israélien d’éviter le piège d’une vengeance aux conséquences fâcheuses où étaient tombés déjà les USA après le 11-septembre 2001 ? Trump, « le businessman », a pris le contrepied des premiers comme des seconds, en jouant contrairement à eux, sur la carte des accords commerciaux, des méga investissements, des intérêts économiques, notamment avec les monarchies du Golfe.
Ami-allié de l’État hébreu oui, mais avec des concessions pour ses « amis arabes utiles » au cas où… S’il avait, à titre d’exemple, de par le passé, reconnu l’annexion par Israël du plateau du Golan conquis en 1973 et transféré l’ambassade américaine à Jérusalem, il n’en demeure pas moins qu’il se soit efforcé de normaliser les relations entre les capitales arabes et l’État hébreu poussant les accords d’Abraham, notamment avec les Emirats arabes unis, Bahreïn, le Maroc avec, à terme, l’objectif d’y faire adhérer l’Arabie saoudite. D’une pierre, deux coups : Money and peace for Israel!
Kamal Guerroua