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Le pouvoir algérien en proie à la fièvre obsidionale 

Tebboune Chanegriha

Nul doute, le pouvoir algérien vit dans une mentalité d’assiégé face à ce qu’il considère comme une entreprise de déstabilisation menée sur tous les fronts par la « main étrangère » pour l’affaiblir.

En effet, le pouvoir cultive une mentalité d’assiégés. Cette approche défensive et pessimiste est symptomatique d’une fièvre obsidionale qui s’est emparée du régime.

Le régime est persuadé qu’il est entouré d’adversaires, encerclé par des ennemis tapis au sein du pays. Ce faisant, à ses yeux cernés par la peur obsidionale, tout citoyen algérien qui ne s’aligne pas sur l’agenda politique du gouvernement devient potentiellement dangereux, un ennemi allié des puissances étrangères.

Favorisée par une conjoncture économique difficile et une crise de légitimité institutionnelle, cette politique obsidionale prend une dimension pathologique. Or, on ne construit pas un pays sur la peur et la terreur. Ni on gouverne avec des imaginaires politiques paranoïaques.

À trop cultiver le délire de persécution le régime a fini par perdre le sens des réalités, à s’aliéner la population algérienne exaspérée par les accusations de collusion avec l’étranger portées contre elle, pour avoir réclamé son droit de vivre dans la dignité, revendiqué l’amélioration de ses conditions de vie et de travail, l’augmentation des salaires et l’instauration de la démocratie.

De toute évidence, le pouvoir actuel est en proie à une névrose dénommée complexe de Massada, la citadelle assiégée. 

Le complexe de Massada du pouvoir algérien se manifeste par son autisme orgueilleux, son enfermement jusqu’au-boutiste, illustré par sa certitude désespérée d’être seul détenteur de la vérité gouvernementale face à l’ensemble du peuple algérien animé uniquement, selon le pouvoir, par l’ignorance politique, égaré par les ennemis de l’Algérie.

Petit rappel historique. Massada est cette forteresse inexpugnable hissée au sommet d’un vertigineux éperon rocheux, où quelques centaines de Juifs se barricadèrent contre le siège des troupes romaines. Après trois ans d’encerclement romain, ces zélotes préfèrent se suicider collectivement plutôt que d’être pris vivants.

Depuis, on parle de complexe de Massada pour désigner ce sentiment d’être en permanence à la portée d’une menace grave.

Pour certains spécialistes, notamment les psychiatres, cette posture paranoïaque reflète un délire de persécution. En politique, au plan gouvernemental, cette mentalité d’assiégés symbolise une lutte désespérée d’un régime contre un destin historique tragique inéluctable : la fin de son règne.

Avant de conclure, dissipons tout malentendu. Nul n’ignore que nous vivons dans une période de tensions belliqueuses. La guerre menace nombre de pays. D’aucuns affirment que nous serions à la veille de la troisième conflagration mondiale. Or, aujourd’hui, si menace extérieure réelle il y a, elle est du ressort de l’armée algérienne chargée de la protection des frontières, du pays.

Dans mes deux précédentes contributions consacrées à la théorie du complot, j’ai critiqué le recours machiavélique au complotisme pour museler la contestation sociale légitime (ce sont des Algériens qui revendiquent leurs droits sociaux, leur désir de vivre dignement), verrouiller la société civile, cadenasser le débat démocratique. La « menace extérieure » ne doit pas servir de prétexte pour menacer les libertés individuelles et collectives des Algériens, assiéger le peuple algérien par une politique de persécution délirante.  

Khider Mesloub
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