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Le pouvoir est acculé au pied du mur

POINT DE VUE

Le pouvoir est acculé au pied du mur

Tous les signes sont propices pour annoncer que sa fin est inévitable. La cacophonie qui règne au sommet de l’État démontre les limites d’un pouvoir agonisant. Aucun fil conducteur n’est établi entre les institutions dirigeantes du pays. L’un des faits surprenants est la dernière déclaration de Gaïd Salah qui désavoue carrément Bensalah comme chef d’État.

La représentation symbolique de la nation est gérée par des individus qui ont perdu toute crédibilité aux yeux d’un peuple qui rejette le système. De Bedoui à Bensalah en passant par Gaïd Salah, il faut bien signaler que les liens de confiance sont rompus et la nation algérienne est livrée à elle-même. 

Une transition démocratique, sur laquelle tout le monde est unanime est refusée par un pouvoir qui est pour le moment séquestré par les généraux. Cette solution tant attendue reste immuable pour un peuple déterminé, et qui reste le grand juge. Elle est devenue un vrai casse-tête pour ceux qui espèrent tirer les marrons du feu, car elle remet en question tout le système de gouvernance algérien établi depuis 1962. C’est un changement en profondeur qui exige la participation directe du citoyen. 

C’est la cause première qui interdit à tous les acteurs politiques et à certaines personnalités de s’associer aux méthodes obsolètes du pouvoir. La révolution algérienne, de la part sa longévité et son organisation, a pris à contre-pied tout le monde y compris les plus futés du sérail, elle a pris de l’avance et de la maturité. 

A mauvais escient, le pouvoir qui a créé un objet de négociation en arrêtant arbitrairement des individus pour des délits d’opinion est en dernière phase de ses manœuvres. Le panel dirigé par quelques anciennes figures du système est devenu la risée des Algériens qui ne voient qu’une autre tentative du pouvoir à se régénérer à travers une élection présidentielle qu’il faut prévoir dans un délai urgent. D’ailleurs, avec le désaveu de Gaïd Salah, iront-ils poursuivre leur mission ? Il est fort possible que ce climat de méfiance les empêchera.

Comme monnaie d’échange de négociation, « ils nous promettent la libération de tous les détenus ». Cette ruse est une manière d’insulter l’intelligence des Algériens. Ils ont essayé de créer un climat de terreur pour leur servir de raison afin de passer des résolutions inadéquates avec les aspirations du peuple. 

La responsabilité des magistrats qui exécutent de décisions sur des innocents à coup de téléphone est énorme. On peut comprendre la complexité de leur position, d’ailleurs, comme celle des policiers qui incarcèrent des algériens pour le port du drapeau amazigh, mais les révolutions sont les braves qui les mènent et non pas des poltrons. L’Histoire est en train de s’écrire que chacun assume ses faits.

On parle des préalables démocratiques, eux ils parlent des préalables d’apaisement « que leur général refuse » d’ailleurs. Les écarts entre ceux qui souhaitent négocier comme Karim Younes et Fatiha Abbou, et ceux qui sont contre comme la masse intellectuelle politique et le reste des algériens se résument à deux objectifs, soit le départ ou le maintien du système. Il n’y aura pas de places pour des alternatives intermédiaires, ce qui explique le refus du peuple de rentrer chez lui malgré le froid, le ramadan, la chaleur et les menaces permanentes de Gaid Salah. Celui-ci a bien saisi l’enjeu, il ne lui reste pas tant de marge, il est bien coincé. Il trouvera son salut que dans la négociation du départ du gouvernement Bensalah, évidemment en tant que Vice-ministre doit suivre.

Cette situation embarrasse plus d’un, pas juste le pouvoir algérien, il y a aussi les puissances étrangères qui ont l’habitude d’investir dans le tutorat pour des raisons de géostratégie. La révolution dite du sourire à renversé la vapeur, elle a mis en échec les plans élaborés dans les arcanes de certaines puissances habituées à faire les jeux de la régence d’Alger pour des intérêts d’ordre économiques et énergétiques. Car leurs concitoyens et les partis d’oppositions, et particulièrement ceux de la France et du Canada, suivent les développements de la crise algérienne de prêt dans laquelle ils y trouvent une certaine lueur d’espoir pour les populations dites du sud. 

Avant, ils étaient en mode imprudence, à mesure de l’ampleur de la révolte et son caractère pacifique, ils se rétractèrent pour être en mode prudence. Sauf ceux du golf qui ne reculent pas, car le modèle algérien risque de s’exporter. Incontestablement, le destin des pays de l’Afrique du Nord notamment la Tunisie, le Maroc et la Libye est lié à celui de l’Algérie. Leurs ambitions, pour ces monarchies, seront stoppées aux frontières de l’Egypte.  

Tenir bon est la devise actuelle sur laquelle le citoyen algérien s’est investi. C’est un projet rentable à voir l’ensemble des dividendes mirifiques qu’il récolte en matière de prise de conscience, de fraternité et de démocratie. Pour les arrestations de certains dirigeants affiliés au clan de Bouteflika, sont le résultat des règlements de comptes. L’algérien a compris les intentions des uns et des autres, ce qu’il intéresse en premier lieu c’est d’éviter une confrontation et une soumission avec le pouvoir, se dissocier du clanisme et du tribalisme, et par la suite instaurer une république digne de son nom. Pour le confirmer, les réactions de chaque vendredi sont des preuves suffisantes. 

Cette occasion est saisissante pour en finir avec le militarisme, et mettre en place une démocratie participative et délibérative. Tout un défi qui attend la société algérienne dans sa diversité politique, culturelle, religieuse et linguistique.  

Les franchises sur lesquelles le pouvoir a misé gros risquent de finir dans les faillites de l’Histoire et grever lourdement les franchisés une fois que la crise algérienne est prise en charge par ces propres sujets. Des personnalités dites « nationales » et des « intellectuels » à l’image d’Ali Mebroukine qui font la promotion du militarisme politique avec des arguments qui dépassent leurs époques, sont des exemples qui polluent un environnement qui a déjà atteint un niveau de dégradation déplorable.   

L’institution militaire doit saisir cette opportunité pour se démarquer du machiavélisme entretenu par une caste dépassée de loin de son temps. Les époques ou c’est l’armée qui dicte les orientations politiques pour un pays qui n’est ni en état de guerre, ni en état d’urgence sont révolues. Se ranger du côté du peuple tout en assumant son rôle de protectrice du pays est la décision responsable à prendre pour le bien de la nation, car pour être à la hauteur du citoyen, elle doit assurer sa neutralité pleinement face à la conjoncture actuelle. 

Une transition balisée par des préalables démocratiques n’est pas juste une solution préconisée, c’est une consécration d’un grand sacrifice menée par des générations toutes confondues depuis la naissance de la nation algérienne, et l’esprit de la Soummam restera un repère indéniable.   

Auteur
Messaoudene Mahfoudh

 




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