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Les accords d’Evian : l’indépendance du pays et une paix durable

Accord d'Evian

Soixante-trois ans après la signature des Accords d’Evian par les deux délégations du GPRA et du gouvernement français, force est de constater que ces Accords de paix ont sauvé l’essentiel, l’indépendance de l’Algérie.

Cet accord a instauré une paix durable entre les deux pays et ouvert une ère nouvelle de coopération économique, technique et culturelle bénéfique aux deux pays au cours, notamment de la décennie 1960 et le début des années 1970. Il suffit de rappeler que l’Algérie a signé avec la France plus d’accords commerciaux et de coopération… que toutes les anciennes colonies françaises, soit plus de 70 accords de 1962 à 1970 et une aide financière massive lui fut accordée.

L’acquis le plus précieux est bien sûr l’indépendance du pays assortie de l’intégrité du territoire obtenue grâce à la vigilance, le talent et la ténacité des négociateurs algériens, sous la conduite de Krim Belkacem, vice-président du Gouvernement provisoire de la république algérienne (GPRA) qui n’ont à aucun moment cédé sur la souveraineté algérienne sur le Sahara, inséparable de la région nord du pays. Car l’enjeu majeur de cette négociation et des précédentes rencontres secrètes entre les représentants du GPRA et du Gouvernement français portait, notamment sur le sort du Sahara.

Ce territoire sur lequel la France prétendait disposer d’un droit historique et qu’elle entendait garder sous sa souveraineté en le séparant du reste du territoire algérien pour des raisons évidentes de découverte en 1956 de gisements pétroliers et d’installation de six bases d’essais nucléaires, chimiques, bactériologiques et une base spatiale de lancement de fusées dans certaines régions du Sud. Il s’agit du port militaire de Mers el Kébir d’Oran ainsi que les bases dans le Sahara B2-Namous dans la région de Beni Ounif, willaya de Béchar, d’In Ekker (massif du Hoggar à Tamanrasset), de Reggane (wilaya d’Adrar) et de Colomb-Béchar. La base B2 Namous d’expérimentation chimique et bactériologique n’a été remise à l’Algérie par la France, selon le Général Rachid Benyelles , non pas en 1978, mais en 1986.

En effet, le processus de négociation qui a abouti à la signature des Accords d’Évian fut loin d’être un long fleuve tranquille ; il a suscité de graves conflits et désaccords au sein de chaque partie. À l’approche de la conclusion desdits Accords, les rencontres secrètes entre les émissaires des deux gouvernements suscitèrent l’ire des officiers de l’état-major général (EMG) de l’Armée de libération qui les ont sévèrement dénoncées dans une espèce d’alliance objective avec l’Organisation Armée Secrète (OAS), une organisation politico-militaire clandestine, dirigée par le général Raoul Salon, proche de l’extrême droite créée le 11 février 1961 à Madrid, pour la défense de la présence française en Algérie par tous les moyens, y compris le terrorisme.

Les ultras de l’OAS reprochèrent au général de Gaulle et son gouvernement d’avoir capitulé et abandonné l’Algérie aux Algériens, alors que l’armée, contrairement à sa défaite de Dien Bien Phu au Vietnam en mai 1954, a triomphé sur le terrain de la guerre en Algérie grâce, notamment au déploiement des redoutables opérations du général Challe (février 1959- avril 1961), et organisèrent des attentats visant aussi bien les forces de l’ordre que la population algérienne. Certains officiers de l’EMG (Houari Boumediene, Ali Mendjeli, Ahmed Kaïd et le commandant Mokhtar Bouyezem) accusèrent le GPRA d’avoir trahi et bradé l’Algérie à la France.

D’ailleurs, à la réunion du Conseil National de la Révolution Algérienne (CNRA) à Tripoli (11 -18 février 1962), le GPRA présenta un rapport sur l’accord préliminaire des rencontres des Rousses (11-19 février 1962), les ministres du GPRA en prison (Aït Ahmed, Ben Bella, Boudiaf, Bitat, Khider), ainsi que les membres du CNRA l’approuvèrent quasiment à l’unanimité (45 pour, 4 contre) et donnèrent leur accord pour la poursuite des négociations, à l’exception des quatre membres de l’EMG susmentionnés qui votèrent contre et continuèrent à les dénoncer après qu’ils aient été signés le 18 mars 1962.

Précisons que le CNRA, seule instance habilitée à se prononcer sur les questions de guerre et de paix avec la France, a exigé un quorum des 4/5 de ses membres pour engager une négociation sur tout accord de paix, soit une majorité qualifiée vu l’importance politique d’une telle question. Le quorum fut ainsi largement atteint, et les ultimes négociations pouvaient donc être engagées à Évian II du 7 au 18 mars 1962.

Tahar Khalfoune

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