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Les Algériens : égaux dans la mort, inégaux dans la vie

TRIBUNE

Les Algériens : égaux dans la mort, inégaux dans la vie

Au pays où le charlatanisme tient lieu de « sens politique », le pouvoir est actuellement en proie à un inquiétant embarras car il a commis une nouvelle bourde et s’est fait tout de suite prendre.

Une clameur chargée d’un fort sentiment d’injustice monte du fond du peuple, va gonfler avec les jours et en rajoutera à ses peines précédentes, lui qui s’obstine à fabriquer une fausse Algérie qu’il veut faire passer pour l’un des meilleurs pays au monde, notamment en matière de santé. 

De quoi s’agit-il ? Encore une fois de santé. Deux personnages célèbres qui ont longtemps amusé et diverti le commun des Algériens, l’un par ses sketches, ses mimiques et ses répliques, nommé Salah Ougroute, l’autre avec des questions de culture générale posées dans la rue aux passants et récompensées par un anneau en or en cas de réponses justes, Slimane Bakhlili, sont tous deux tombés malades il n’y a pas longtemps. 

Au pays où Djouha a marqué l’inconscient collectif plus que tout autre archétype, y compris celui du Prophète, le comédien a été pris en charge par le pouvoir qui voulait montrer au peuple qu’il ne faisait pas de différence entre les présidents de la République qui passent des mois à l’étranger pour échapper à la mort et un citoyen sans grade. Il l’envoya en France dans un avion médicalisé sous le regard des caméras et accompagné des vœux de bonne santé d’un peuple approbateur et sensible aux égards faits à une figure dans laquelle il se reconnaît. Qui dit comédien populaire, dit investissement politique sûr et rentable. 

Si le choix était donné en aparté à chacun des 45 millions d’Algériens, je ne crois pas qu’il s’en trouverait 1 qui refuserait d’être à la place du président ou de l’artiste que j’adore personnellement, tant il a su incarner l’Algérien réel dans les divers rôles qu’il a joués (nous avons échangé accolades et mots affectueux un jour de ramadan où on s’était fortuitement rencontrés dans une boutique de la Casbah).

Le second, devenu journaliste à la retraite après avoir aspiré à succéder à Bouteflika en 2019, a contracté le Covid 19 (je refuse de dire « la ») et fut hospitalisé dans un grand hôpital d’Alger hérité de la période coloniale. 

Scandalisé par la mauvaise qualité de sa prise en charge médicale mais, surtout, blessé de n’avoir pas été jugé l’égal du président ou du comédien Swilah encore en soins à l’étranger, il poussa un cri de détresse et de révolte qui traversa les murs de l’hôpital avant de décéder, laissant le pays plus indécis que jamais sur quoi penser de tout ça, des stupides conséquences d’une sidérante inconséquence du pouvoir en toutes choses.

Le parlement élu par 4% du corps électoral comme vient de le reconnaître le journal officiel, l’Algérie du monde à l’envers où la folie a pris la place de la logique, Djouha et la « chèvre qui vole » (« Maaza wa law tarat »), tout ça c’est du pareil au même, kif kif… 

Paix à l’aime des morts et prompt rétablissement à tous les malades dont ceux de « la chèvre qui vole » et du variant algérien de la vache folle !  

Liberté aux prisonniers de la liberté de pensée, de la dignité et de la démocratie moderne, et vive le « Hirak » !

NB : Ce billet m’a été inspiré par la lecture du commentaire de M. Hassan Bouras en arabe posté sur ma page Facebook au bas de la version arabe de mon article « L’Algérie en perdition ». Merci, frère, ton émotion a été virale !

Auteur
Nour-Eddine Boukrouh

 




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