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Les six points forts à retenir du discours de Bensalah 

OPINION

Les six points forts à retenir du discours de Bensalah 

Le discours d’apaisement et d’ouverture prononcé mercredi par le Chef d’Etat par intérim à qui je souhaite un prompt rétablissement, constitue la plus belle occurrence pour l’État-major de faire libérer le commandant Lakhdar Bouregaâ.

  1. Le pouvoir algérien salue la maturité dont a fait preuve la population depuis le 22 février et a parfaitement capté les aspirations de l’immense majorité des citoyens qui aspirent à un état de droit et des institutions dédiées à la satisfaction du bien public et de l’intérêt général.

  2. Le pouvoir exhorte les Algériens à exprimer leur point de vue et leur opinion pour proposer et non pour instruire des procès d’intention à l’égard des institutions de l’Etat et en particulier de l’institution militaire, tendant à faire croire que l’Algérie est gérée depuis l’extérieur et que ceux qui sont nominalement en charge de la gouvernance des affaires publiques, ne sont que les fidéicommis de puissances étrangères. C’est toute la crédibilité de l’Etat qui risque de s’effondrer à cause de ces allégations mensongères et diffamatoires. Au surplus, elles peuvent entretenir des divisions même au sein de l’institution militaire susceptibles de rendre notre pays plus vulnérable aux tentatives de déstabilisation dont il est l’objet, au même titre que les autres pays arabes et africains.

  3. Le régime algérien actuel n’est ni un régime mafieux ni un régime délinquant. Dans cette phase de dialogue qui s’ouvre, il est de l’intérêt de chacun de ne pas jeter de l’huile sur le feu et d’éviter l’invective et les imprécations gratuites.  C’est lui qui a fait diligenter, à travers le Parquet qui est soumis au ministre de la Justice, garde des sceaux, des enquêtes qui auront permis de mettre au jour des délits financiers d’une gravité exceptionnelle qui ont littéralement sidéré les magistrats pourtant  habitués à instruire des affaires de criminalité organisée et de grand banditisme très graves. La plupart des personnes mises en cause n’ont aucun lien avec l’institution militaire et n’ont jamais eu de problèmes avec elle, ce qui rend inepte l’hypothèse d’un règlement de comptes.

  4. Comme l’auteur de ces lignes l’a rappelé de nombreuses fois, l’Institution militaire n’a pas de candidat à la présidentielle qui émanerait de ses rangs, n’adoubera aucun candidat issu des forces sociales invitées à débattre de l’avenir politique du pays et n’empiétera pas sur une seule des prérogatives de la personnalité qui sera élue par les algériens au terme s’un scrutin libre, transparent et démocratique. Du reste, ce sont  les représentants civils du peuple algérien qui définiront eux-mêmes le statut de l’Instance de contrôle et de surveillance des élections : son règlement intérieur, son mode de fonctionnement, sa composition, ses attributions, le budget nécessaire à l’accomplissement de ses missions. L’Etat et les collectivités territoriales devront lui apporter une assistance inconditionnelle et un soutien total afin que la confection du fichier électoral, l’organisation des élections, la proclamation des résultats fussent de son apanage et de son apanage seulement. Une nouvelle loi portant régime électoral devra nécessairement être élaborée et conçue dans la perspective d’une transparence absolue du scrutin présidentiel comme des scrutins législatifs et autres consultations populaires qui suivront. 

  5. Parce que ce sont multipliées pernicieusement et malignement les assertions selon lesquelles l’Armée aurait  l’intention d’instaurer une dictature et bâillonner toutes les libertés, l’Institution militaire, qui n’a pas pu convaincre de sa bonne foi,  se tendra complètement en retrait du dialogue entre toutes les sensibilités et courants sociaux et politiques qui forment la diversité et la richesse de notre pays. La balle et désormais dans leur camp et l’Armée n’est plus partie prenante du jeu politique. Ce qui signifie que des personnalités comme Mustapha Bouchachi, Karim Tabou, Zoubida Assoul, Mokrane Ait Larbi, Ahmed Benbitour, Abdelaziz Rahabi, Sofiane Djillali et bien d’autres ont chacune la possibilité de conquérir la magistrature suprême, si telle est la volonté de la majorité des électeurs et des électrices. Tout le reste n’est que procès en sorcellerie. 

  6. Si le pouvoir rappelle l’urgence du dialogue entre forces sociales et politiques, il y est conduit à la fois par la gravité de la situation économique financière et sociale du pays et par l’impossibilité de faire expédier par le gouvernement  les affaires courantes, au-delà d’une certaine période. Il faudra dégager de nouvelles ressources pour pallier l’interruption du financement non conventionnel, préparer la loi de Finances pour 2020, mettre en œuvre la future loi sur les hydrocarbures, trouver des solutions concrètes aux difficultés des entreprises privées dont les dirigeants sont en détention, faire redémarrer la machine économique etc. A défaut de quoi, le pays sera contraint vers 2022 de solliciter le FMI et ses créanciers pour négocier un accord d’ajustement structurel dont les conditionnalités strictes auront un impact négatif sur le pouvoir d’achat des ménages, le taux de change du DA, le niveau d’activité des entreprises, les capacités d’importation de biens essentiels pour le fonctionnement de notre appareil de production.  Que feront les algériens en détresse sociale et ceux qui rejoindront la catégorie « des pauvres » de la liberté d’expression et de la liberté d’opinion, comme on le voit aujourd’hui dans la Tunisie sœur.

Le discours d’apaisement et d’ouverture prononcé mercredi par le Chef d’Etat par intérim à qui je souhaite un prompt rétablissement, constitue la plus belle occurrence pour l’État-major de faire libérer le commandant Lakhdar Bouregâa ainsi que tous les jeunes détenus depuis les 21 et 28 juin, sans oublier ceux qui ont été arrêtés durant le quatrième mandat du Président Bouteflika pour s’être opposés à un cinquième mandat. En revanche, l’avenir de ceux qui ont commis des délits financiers gravissimes et ceux qui ont  comploté contre les institutions de l’Etat et l’Armée doit être celui que leur destine la rigueur des lois. 

A. M.

Auteur
Ali Mebroukine, Professeur en droit

 




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