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Lettre d’un citoyen à M Gaïd Salah, chef d’état-major

TRIBUNE

Lettre d’un citoyen à M Gaïd Salah, chef d’état-major

Monsieur le Général, Monsieur Gaïd Salah, chef d’état-major, messieurs les décideurs, les généraux,

Maintenant que le peuple a parlé dans la rue, les Algériens étaient des millions à manifester pacifiquement chaque vendredi sur tout le territoire national, à Paris place de la République chaque dimanche et partout où se trouve la communauté algérienne dans le monde et vous a dit non et stop à Bouteflika, non et stop au 5ème mandat, non et stop à son frère Saïd non et  stop à votre système politique, non et stop à votre république, non et stop à la destruction et délitement de son pays, non et stop à la précarisation de la société algérienne, non et stop au bradage des richesses du pays pour acheter votre légitimité auprès des puissance occidentales, que comptez-vous  faire ?

Allez-vous rendre le pouvoir au peuple ou continuerez-vous à vous entêter dans vos manœuvres malsaines ? Vous n’arrêtez pas de mettre en garde les Algériens, et particulièrement celles et ceux qui descendent dans la rue pour vous crier au nez « pouvoir assassin ! », «  pas de 5ème mandat ! », « système dégage ! ».

Vous brandissez le péril et la menace partout pour dissuader les gens de vous contester, alors que c’est vous le péril et la menace pour le peuple et l’Algérie, vous brandissez la peur et la terreur, alors que c’est vous la peur et la terreur, vous brandissez la déstabilisation du pays, alors que vous qui êtes irresponsables et aventureux en voulant imposer un président mourant à la tête de l’Etat. Quelle leçon de vertu et de démocratie allez – vous donner à un peuple qui vous demande juste de ne pas être gouverné par une image, des communiqués et un cadre depuis 6 ans ? Il mérite mieux que ça ! Il a assez donné pour ce pays pour être offert à la risée du monde. Vous l’aviez enfoncé toute honte bue dans la misère, dans l’indignité en lui imposant une confrérie des Bouteflika. Qu’avez-vous fait au peuple en 57 ans de règne ? Rien ! Vous l’avez privé de tout, de ses libertés individuelles et collectives, de ses richesses, de son pays, de son environnement, de sa dignité, de son identité, de sa culture, de sa civilisation, de son histoire, de sa langue, de sa télévision, de sa radio, de ses vertus, de ses symboles, de ses chants patriotiques, de sa fierté, de la liberté de manifester dans la rue, de ses droits civiques.     

Monsieur Gaid Salah, messieurs les Généraux,  vous semblez être pris de court par la rue et par l’éveil citoyen, vous pensez que le peuple est endormi, et tout d’un coup une marée humaine vous réveille en plein sommeil  et vous demande de dégager. Refusant comme toujours d’accéder à ses demandes légitimes et légales et ne voulant pas lui rendre sa souveraineté, car vous le considérez toujours pour un mineur ayant besoin d’être pris dans vos bras armés oubliant qu’il est un adulte et qu’il est plus mature et intelligents pour conduire les affaires du pays, vous vous êtes mis à le gronder et le mettre en garde !   

Monsieur Gaid Salah, messieurs les Généraux, les rues sont maintenant  peuplés du peuple et qu’il est plus que jamais déterminé de reprendre sa pleine souveraineté et les pleins pouvoirs, il ne rentrera pas chez lui tant que vous n’êtes pas partis. Qu’allez-vous faire dans les jours à venir ? Accepteriez-vous la transition dans l’ordre et sans bain de sang  ou allez –vous tirer ? Allez-vous vider vos chargeurs  sur des jeunes de 18 ans, des nourrissons dans les poussettes et des jeunes filles à fleur d’âge vous offrant des roses pour sauver un Bouteflika de 82 ans mourant  et rendre service à son frère Said ? Si c’est oui réglerait-il le problème ? Du sang !  Les généraux, vous en avez déjà fait couler, mais ça n’a rien réglé ! La solution n’était pas là, le sang ne règle pas les problèmes, encore moins les problèmes politiques. L’Algérie n’a connu que vous, elle n’a connu que votre paternité, elle n’a connu que vos armes, votre répression, votre mépris, votre diktat depuis l’été 62. Aujourd’hui, elle désire, elle aspire à un changement, elle veut connaître autre chose que vous, messieurs les quinquagénaires, elle veut se ressembler à elle-même, elle est jeune et belle, donc elle veut retrouver cette jeunesse partout dans ses institutions.     

Monsieur Gaid Salah, messieurs les généraux,

Vous parlez toujours au nom du peuple algérien, vous dites toujours à la communauté internationale que vous êtes là pour garantir la stabilité du pays et protéger le peuple tandis que vous bradez les puits du pétrole au prix de revient pour être laissés tranquilles par Paris et Washington de faire vos présidents. Or, ce n’est pas vrai, le peuple dont vous parlez, vous ne l’avez jamais connu à part dans vos casernes, ce peuple vous ne l’avez jamais connu à part par les ordres d’appel l’obligeant à venir grossir vos rangs, le peuple vous ne l’avez jamais connu à part quand vous en avez vraiment besoin pour ratisser contre le terrorisme qui est une des conséquences fatales de votre gestion militaire du pays. Nombreux aujourd’hui vivent avec des séquelles, des traumatismes et dépressifs sans aucun revenu !   

Monsieur GAID Salah, messieurs les décideurs,  

Allez –vous continuer à soutenir ce grand corps malade ou peut-être mort à Genève contre un peuple vivant, contre des jeunes ne dépassant pas la vingtaine ? Allez-vous tirer sur des nourrissons en pleine santé pour sauver ce grand corps malade en pleine décomposition ? Allez-vous faire du sang encore dans les rues pour faire tourner les affaires de Said Bouteflika ? Allez-vous nous faire revivre la décennie noire pour sauver le système ?  De Grâce ne faites pas ça ! Partez dans le calme et l’ordre et rendez le pays au peuple !

Monsieur Gaid Salah, messieurs les Généraux,

Sans doute vous êtes très attentifs et alertes à ce qui se passe dans la rue en ce moment, les images vous ont  certainement surpris, elles sont juste majestueuses, une déferlante humaine qui balaie d’un seul coup vos interdictions et tentatives de répressions ! Des millions d’Algériens dans les rues dans tout le territoire du pays, marchant main dans la main, en famille, vous réclament pour un troisième vendredi de leur rendre leurs pays, ce pays que vous leur avez confisquez,  de partir et ne plus revenir, de dégager. Vous ne l’avez toujours pas entendu ? Vous feriez mieux de faire un effort d’écouter ces millions d’Algériens qui vous réclament le changement en profondeur que de passer votre temps à chercher des petites combines et des manœuvres politiques pour se maintenir.

Monsieur Gaïd Salah, messieurs les décideurs, à vous entendre parler, on comprend bien que vous vous trompez d’époque, le danger islamiste que vous brandissez à chaque fois que le peuple vous réclame un changement est obsolète et ne correspond plus aux aspirations de la jeunesse d’aujourd’hui. Arrêtez de faire peur aux gens et de les tétaniser avec vos discours apocalyptiques !

Monsieur Gaid Salah, messieurs les décideurs,

Prenez un peu de votre temps de voir et d’écouter la voix du peuple même si on sait que votre temps est précieux. Entre la maladie s’éternisant du président, les réunions qui s’enchaînent avec SAID et la surveillance d’une éventuelle dissidence dans vos rangs, il ne vous reste pas grand-chose pour regarder le peuple en mouvement.  Regardez les images des manifestants et vous allez vous rendre à l’évidence que l’éventail de l’islamisme que vous brandissez à la moindre contestation et que vous aviez réussi à vendre à Paris et aux américains pour vous laisser tranquilles n’est plus d’actualité ! Á moins que vous fabriquiez à nouveau vous –mêmes ce monstre ! La rue des années 90 n’est plus celle de 2019, elle a beaucoup changé !  Elle n’est plus celle des barbus, elle n’est plus celles des mitrailleuses, elle n’est plus que masculine et machiste. La rue de 2019, Monsieur le Chef d’état- major, elle est aussi féminine, colorée par de belles robes et embellie par des femmes algériennes, une beauté méditerranéenne.

Si vous mettez vos lunettes de vue à la place de votre prisme islamiste, vous allez voir qu’il y a beaucoup de femmes dans les rues, elles sont jeunes, certaines ont à peine 18 ans, non voilées, elles sont juste algériennes, belles, sans tabous, respectueuses, intelligentes et très instruites, très éduquées. La rue de 2019 Monsieur le Général n’est plus celle des années 90, elle est colorée de drapeaux algériens, de robes kabyles et de femmes modernes, les manifestants ne criez pas «  Allah Akbar ! » mais entonnaient des chants patriotiques, l’hymne national et scandez des slogans politiques, les manifestants ne sont pas munis de ceintures explosives et de kalachnikovs, mais de smartphones et de caméras pour immortaliser ce moment historique et montrer dans l’immédiateté au monde ce qui se passe en Algérie.

La rue de 2019 Monsieur le Général, et ce, vous pouvez voir les photos sur les réseaux sociaux et la presse nationale, elle n’est pas celle des gandouras  blanches et vestes noires en cuir des années 90, elle est celles des familles avec leurs enfants, des vieilles avec leurs filles et petites-filles, de belles filles offrant à la police des roses en signe d’amitié et d’amour, des hommes galants offrant aux jeunes filles des fleurs à l’occasion du 8 mars, des gamins prenant des photos avec des casques de la police, des jeunes saluant la police et ramassant la poubelle à chaque fin de manif. Quelle belle leçon de civisme et de discipline pour le monde épaté de découvrir une autre image des algériens que celles que vous en aviez vendues jusque-là ! Quelle hauteur à l’Algérienne ! Quelle éducation ! Quel pacifisme !  Le monde regarde ce qui se passe en Algérie hagard et ne savant plus quoi dire ! N’est-ce pas ça la vraie Algérie messieurs les Généraux ? Un tel peuple n’est –il pas encore mature et adulte pour être maitre de son destin ? N’est-il pas encore majeur pour lui confier les clés de la maison et conduire le changement  et redonner à l’Algérie sa place dans le concert des nations qui se respectent ?

Messieurs les Généraux,

Les temps ont changé, vous n’êtes plus les maîtres du jeu, la peur a changé de camp, le peuple vous a remis à votre place et vous a retiré toute légitimité et légalité de parler à son nom, il ne vous reste rien à part vos armes et vos chars pour faire du sang, mais sachez que vous allez répondre de vos actes. Donc, vous feriez mieux d’utiliser cette force contre l’ennemi extérieur et accompagner le peuple à vivre ce printemps de la naissance de la 2ème République algérienne dans le respect  de la Constitution. Ni l’endoctrinement ni l’endormissement du peuple par l’école et les mosquées, ni les fitnas et divisions semées entre le peuple algérien n’ont pas marché. Le peuple s’est uni aujourd’hui contre votre système comme un seul homme et s’indigne dans la rue contre votre gestion chaotique du pays, contre votre système policier et rentier, contre votre corruption et précarisation  de la société à tous les niveaux, contre votre mépris, contre vos mésaventures, contre votre arrogance, contre votre gouvernance oligarchique, contre votre dilapidation des richesses du pays et leur confiscation, contre votre code de la famille minorisant les femmes…etc. Vous êtes responsables de tous les maux des algériens !

Monsieur Gaid Salah, messieurs les décideurs,

Il est temps de laisser le peuple algérien construire l’avenir auquel il aspire, un avenir où chaque algérienne et algérien trouvent leur place, un avenir où les algériens seront très heureux de rester dans leur pays, un avenir où les femmes trouveront la place qu’elle mérite compte tenu de leur engagement au quotidien pour l’Algérie. Elles ont beaucoup donné et il est temps qu’elles aient leur place dans cette Algérie moderne.  Elles étaient déjà au front lors de la Guerre de libération nationale, c’est elle qui ont semé avec leur bombe la terreur à Alger à leur tête Djamila Bouhired, c’est elles qui se sont fait violer par l’armée française pour avoir refusé de dénoncer leur mari, les emplacements des abris et d’avoir préparé à manger pour les maquisards, c’est elles qui se sont fait violer, séquestrer, enlever, égorger, obligées de subir les mariages de plaisance, égorger  pour avoir refusé de céder au diktat des islamistes radicaux pendant la décennie noire. Elles ont su résister et rester dignes et ont accouché de filles et de garçons qui ont libéré le 22 février 2019 la peur des algériens et vous bravent messieurs les Généraux pacifiquement avec leurs smartphones.

Monsieur Gaid Salah, messieurs les généraux,

Le peuple d’Algérie vous demande de partir et de lui rendre tous les pouvoirs qu’il ne vous a d’ailleurs jamais confiés, tous les pouvoirs que vous lui avez confisqués, de lui rendre tous les symboles de la nation à commencer par le sigle du FLN, le drapeau, l’hymne national, les chants patriotique et toutes les institutions.

Monsieur Gaid Salah,

L’institution à la tête de laquelle vous êtes  Chef d’état- major est une armée populaire, cela veut dire elle est issue du peuple que vous voyez dans la rue, il est par conséquent légitime et constitutionnelle que cette armée soit au service du peuple et non pas au service des intérêts particuliers, en l’occurrence en ce moment au service de Bouteflika et de son frère Said.

Monsieur Gaid Salah, messieurs les Généraux,

Cédez le passage au peuple, cédez le pouvoir au peuple, cédez le pouvoir à la nouvelle génération, les jeunes qui vous bravent dans les rues les fleurs dans les mains ce sont vos arrières petits-enfants, ils sont nés dans les années 2000 et ont aujourd’hui à peine vingt ans. Cependant, vous,  vous êtes malades, fatigués, déconnectés de la réalité, dépressifs, schizophrènes, certains mourant comme le président de la République, d’autres souffrants ne remplissant plus leur fonctions, laissez la place aux jeunes et à la nouvelle génération et partez ! Le peuple n’en plus de vous, il vous demande juste de dégager et de le laisser conduire son destin avec ses choix de société. Il n’a besoin de rien, il est adulte, majeur, mature, suffisamment éduqué, avec un sens patriotique aigu et développé, à jour avec les technologies actuelles, civilisé, très attaché aux valeurs républicaines et à l’esprit de Novembre et de la Soummam,  il connaît bien son histoire, il sait qu’il est issu de Massinissa dont il est fier, il sait qu’il n’est pas arabe, mais amazigh, il sait que vous l’avez arabisé, mais à l’origine il est berbère, il connaît tous ses repères culturels.

Il saura ainsi conduire le changement dans l’ordre et faire de l’Algérie un beau pays où il fera bon de vivre, un pays prospère et tourné vers l’avenir, un pays moderne, un pays où l’égalité hommes et femmes sera garantie, où les libertés individuelles et collectives seront garanties, un pays qui accueillera tout le monde, un pays ouvert sur le monde, un pays où la redistribution des richesses nationales sera garantie par la Constitution, un pays qui rendra leur fierté aux Algériens partout où ils sont dans le monde.

Vive la 2ème République algérienne !

Vive le printemps algérien !

Vive l’Algérie !   

Auteur
Omar Tarmelit

 




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