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Lettre ouverte aux hautes autorités de l’Etat

TRIBUNE

Lettre ouverte aux hautes autorités de l’Etat

Marche à Alger. Crédit photo : Zinedine Zebar.

Messieurs,

Nous vous écrivons cette lettre ouverte dans l’espoir de vous voir mettre un terme à la chasse aux porteurs de l’emblème amazigh.

Accuser des jeunes manifestants, parmi eux une jeune élue de 25 ans, d’atteinte à l’unité nationale parce qu’ils ont brandi l’étendard amazigh est alarmant. En plus du fait qu’aucune loi n’interdit les symboles culturels, identitaires, spirituels ou sportifs, l’emblème amazigh symbolise l’union Nord Africaine dans son histoire et son anthropologie, n’est nullement concurrent du drapeau national.

Vous vous êtes rendus compte, nous espérons, que cette décision n’était pas pour apaiser une situation de crise, bien au contraire, elle peut diviser un peuple qui reconstruit merveilleusement son unité fragilisée par la mauvaise gouvernance qui a menacé les fondements de l’Etat. Un peuple noble, digne, dont vous devriez être fier, ayant redonné à l’Algérie son honneur parmi les nations.

Le sort de l’Etat dont vous avez la charge est plus important que celui du régime qui a conduit le pays à la crise actuelle, laquelle vous déclarez combattre. Maintenir ce régime par des procédés qui risquent de porter atteinte à l’intégration nationale, à sa cohésion, c’est hypothéquer l’avenir des générations futures, pour lequel se sont sacrifiés nos valeureux Chouhadas.

Messieurs,

Comme vous devriez le savoir, le mouvement amazigh était toujours là pour l’Algérie, sa libération et son unité.

En 1930, face au slogan de « la France est la continuité de Rome » qui a marqué le centenaire de la colonisation, la permanence du fait amazigh a offert aux patriotes algériens le moyen de défendre la nation : « Si la France est la continuité de Rome, la résistance du peuple algérien à la colonisation française est la continuité de la résistance amazighe à Rome. » Cette antithèse à la thèse colonialiste a constitué, sans conteste aucun, le socle sur lequel s’est construit le mouvement indépendantiste algérien.

Nous nous arrêterons à cet exemple, – certes occulté par certains historiens mais essentiel dans le récit national – pour vous rappeler que notre mouvement n’imagine pas la cohésion des pays de l’Afrique du Nord en dehors des unités territoriales des Etats qui le compose, de leur stabilité intérieure et du degré de démocratisation de leurs systèmes politiques.

L’emblème culturel de l’unité Nord Africaine est un moyen de consolidation de la cohésion et de la stabilité de notre région. Il n’est pas un facteur de division. L’esprit de Jugurtha sur lequel se fonde la culture de notre peuple, de notre nation, interdit formellement aux militants amazighs de porter atteinte à l’unité de leurs pays, d’autant plus que toutes les régions du monde se constituent en blocs pour faire face aux défis du siècle.

Notre jeunesse a atteint une telle maturité qu’elle compare notre pays aux pays développés, au lieu de se laisser séduire par les sirènes de l’archaïsme et du tribalisme, dans un environnement régionale et internationale menaçant à plus d’un titre.

Le mouvement amazigh était toujours pacifique, démocratique et unitaire.

Le mouvement amazigh, l’un des plus anciens mouvement identitaire dans le monde, a toujours considéré que la diversité linguistique doit trouver sa gestion dans l’ordre démocratique et l’éthique de vivre ensemble et non pas dans une quelconque approche ethnique en mesure d’ouvrir les brèches sur les chaos et les génocides.

Messieurs,

Le 05 Juillet, jour de la célébration de l’indépendance, fête nationale par excellence et fête de la jeunesse algérienne, est une occasion pour décider de la libération des manifestants arrêtés pour port de l’emblème amazigh, ainsi que de tous les détenus d’opinion.

Dans l’attente d’une décision qui relancera l’espoir en une issue pacifique, démocratique et inclusive de la crise, et le passage à la nouvelle république, veuillez agréer, Messieurs, nos sentiments de respect et de considération.

Alger le 04 Juillet 2019.

Brahim Tazaghart, militant du MCB

Abdellah Seddiki, enseignant de Tamazight

Rebai Mebarki, militant du MCA

 

 




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