La situation actuelle en Kabylie nous interpelle à plus d’un titre, surtout avec l’avènement de cette nouvelle donne : la fuite (tarewla) érigée en seul projet de vie par toute une communauté. Une sorte d’auto-extermination ou un « zéro kabyle » démographique adopté collectivement faisant suite au projet politique machiavélique de triste mémoire.
Pour dépasser tous les écueils, toute communauté humaine doit pourtant savoir se remettre en cause et ne pas tomber dans la victimisation en jetant tous les torts sur les autres
Car fuir en masse, pour un peuple ou une communauté, disons-le tout clairement, est toujours un aveu de faiblesse, d’échec, car la persévérance de l’homme (A l’échelle collective ou fédérative, bien sûr), quand il se débarrasse de ses peurs et des ses phobies, sans craindre souffrance et mort, parvient toujours à évoluer, sortir de sa misère et mettre en place un édénique espace de vie communautaire. C’est l’Histoire qui nous l’a enseigné.
Quand une communauté est acculée et poussée dans ses derniers retranchements, elle puise toujours des ressources dans son instinct de survie pour se recréer et renverser son sort en faisant de son enfer un éden ; mais quand des solutions de facilité lui sont proposées comme aller s’installer dans des espaces où d’autres groupes humains, à force de moult souffrances et sacrifices, ont su créer les conditions les plus favorables pour la « belle vie », la justice, la liberté et les droits dans leur infinie multitude : économiques, culturels, cultuels, sociaux, etc., elle finit toujours par se perdre et se diluer.
Il est vrai qu’il y a aussi un exode expansionniste, colonisateur, comme pour les occidentaux qui sont allés occuper les Amériques, prendre les terres des autochtones. Un exode qui a cloné une civilisation à la place d’une (des) autre (s), alors que la terre qu’ils ont fui a été prise en charge et développée par ceux qui sont restés.
Quoi qu’il soit, il n’y que les peuples qui se battent dans leurs milieux naturels qui arrivent à faire éternellement partie de l’Histoire ; les autres se contentent d’aller explorer les richesses géographiques du globe, se diluent dans des endroits lointains, et finissent à terme par n’être que des fantômes de civilisations qui n’ont pas su se conserver à temps pour perdurer.
L’exode a tué bien des civilisations et fait disparaitre plein de nations ; alors que le retour comme pour Israël (un peuple éparpillé et menacé d’effacement de l’histoire) en a créé des puissances politiques, militaires et économiques qui en imposent rien qu’en regroupant des populations jadis condamnées à l’errance.
Youcef Oubellil, écrivain