Le quotidien Liberté a bouclé son dernier numéro cette nuit pour une ultime distribution dans les kiosques à journaux demain jeudi.
Né en juin 1992, le quotidien Liberté se voulait un des titres du courant républicain. Longtemps proche du RCD, il a été qualifié de journal des éradicateurs, par le courant réconciliateur, proche des islamistes. Liberté a fait de la défense de la république pendant la terrible décennie noire une ligne rouge non négociable. Cet engagement lui vaudra l’assassinat de trois salariés.
Liberté a été fondé par l’homme d’affaires Issad Rebrab, principal bailleur de fonds, en compagnie d’Ahmed Fattani, Hacène Ouandjeli et Ali Ouafak. Entretemps, ces deux derniers ont vendu leurs actions il y a quelques années suite à une augmentation du capitale de l’entreprise éditrice. Hacène Ouandjeli fondera un quotidien du soir qui finira par disparaître.
Issad Rebrab a décidé de fermer il y a quelques jours ce journal. En butte à de sérieux problèmes avec le régime, l’homme d’affaires semble vouloir se concentrer exclusivement sur son groupe Cevital déjà la cible de menaces multiples et de pressions.
La fermeture de ce journal intervient à quelques jours seulement de la journée mondiale de la presse et de la célébration du printemps berbère d’avril 1980.
L’annonce fait il y a quelques jours a jeté l’effroi parmi les salariés et dans le monde des médias. Certes, l’homme d’affaires a promis de ne laisser aucun salarié sur le carreau, pour autant la disparition de ce journal, qui est (était désormais) un des rares espaces d’expression pour le camp démocrate mais aussi et surtout pour tous les défenseurs de l’identité amazighe, est un très mauvais signe pour la presse. Le début d’une fin d’une certaine presse appelée désormais à se réinventer pour plusieurs raisons. D’abord pour tenir face à la brutalité du régime, mais également devant le mode de « consommation » de l’information gratuite en ligne.
« Liberté va rendre l’âme trois ans après l’éclosion du mouvement populaire pour le changement de système qu’il a accompagné avec un engagement naturel. Cette fin qui succède au Hirak traduit un échec, temporaire, espérons-le. À l’expression de masse d’un formidable capital de résistance progressiste succède le signe d’un mouvement de régression politique et culturelle qui continue à dérouter notre société.
La fin de Liberté, c’est un moment d’un processus. Seule consolation : en histoire, le processus n’est pas linéaire », a écrit Mustapha Hammouche dans sa dernière chronique.
Cette disparition intervient alors même qu’un de ses journalistes Mohamed Mouloudj est en détention, mais aussi et surtout dans une période où la presse est la cible de pressions, de menaces de la part du régime que l’exercice de la liberté d’expression et l’existence d’une presse indépendance étouffe particulièrement.
Le journal Liberté s’est éteint, que vive la liberté d’écrire ! De dénoncer et de porter la plume là où l’arbitraire et le mensonge sévissent.
Yacine K.