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L’Internationale des présidents qui s’accrochent au pouvoir

DEBAT

L’Internationale des présidents qui s’accrochent au pouvoir

Même en fin de vie, Abdelaziz Bouteflika se présente pour la cinquième fois d’affilée à sa succession. Comme lui, les hommes qui dirigent des pays mais refusent toute alternance sont encore une quinzaine dans le monde.

En Guinée Équatoriale, le chef d’État Teodoro Obiang détient actuellement la plus longue vie politique en exercice. Arrivé au pouvoir en 1982, le président septuagénaire effectue son cinquième mandat consécutif, soit 37 ans au pouvoir, juste devant le Camerounais Paul Biya président depuis 1982, réélu cinq fois et parfois surnommé « le roi des fainéants ». 

Ces dirigeants, qui refusent la retraite, sont particulièrement présents en Afrique et en Asie. Certains d’entre-eux sont même restés au pouvoir jusqu’à leur mort. Tour d’horizon. 

Les dirigeants qui refusent la retraite règnent en nombre en Afrique et en Asie

Le Premier ministre Hun Sen, l’homme fort du Cambodge dure depuis 33 ans et explique que sa « poigne de fer » est le prix de la paix.

De son côté, l’Ougandais Yoweri Museveni, est en poste depuis 1986. Âgé de 74 ans, il cumule cinq mandats de cinq ans, tout comme Denis Sassou-Nguesso. Âgé de 75 ans, il a été le président de la République populaire du Congo de 1979 à 1992 puis président de la République du Congo depuis 1997. 

Dans l’ancienne république soviétique du Kazakhstan et dans celle du Tadjikistan, les présidents Nursultan Nazarbaïev et Emomalié Rahmon perdurent également. Nursultan Nazarbaïev a été porté au pouvoir en 1990 et son dernier score à l’élection présidentielle (97,7% des suffrages en 2015) a de quoi faire rêver… En 2014, il par ailleurs désigné « dictateur de l’année » en raison de son autoritarisme et sa mégalomanie par deux ONG, l’Observatoire géopolitique des criminalités (OGC) et l’association Sherpa.

Despotisme et « démocrature »

De nombreux pays présentent des systèmes politiques qui ont l’apparence de la démocratie, avec des institutions qui fonctionnent et des élections au suffrage universel qui se tiennent. Mais la réalité s’apparente à une dictature, à un autoritarisme sans faille qui réprime notamment toute velléité de changement. Ces régimes, le plus souvent ultra-corrompus et claniques, sont maintenus d’une main de fer par des hommes qui ont fait leur temps.

Par exemple, l’Erythréen Isaias Afwerki, Président depuis l’indépendance du pays en 1993 est passé du statut de héros vénéré de la guerre de libération à celui d’impitoyable tyran alors qu’Alexander Lukashenko reste le seul et unique président élu de la Biélorussie depuis 1994. 

Au Tchad, Idriss Deby, reconduit en 2016 pour un cinquième mandat, s’impose depuis 27 ans. A côté, Abdelaziz Bouteflika, élu pour la première fois en 1999 à la tête de l’Algérie, pourrait faire figure de novice.

Au Soudan, après un coup d’Etat, l’ancien général Omar el-Beshir gouverne depuis juin 1989. Voilà donc 30 ans qu’il verrouille son emprise, bien qu’il soit sous le coup d’un mandat d’arrêt international délivré par la Cour pénale internationale (CPI) pour crime contre l’humanité après le génocide de 500 000 personnes au Darfour.

Aussi, à 72 ans, Ismail Omar Guelleh est le maître absolu de Djibouti depuis avril 1999 : c’est lui qui nomme le gouvernement et les juges de la Cour Suprême et du Conseil Constitutionnel, ce qui peut aider à rester en place… 

En Iran également, l’ayatollah Ali Khamenei, guide suprême de la République islamique depuis la mort de l’imam Khomeiny en 198, cumule près de 30 ans de pouvoir.

Enfin, en Russie, pour rester au sommet de l’Etat, Vladimir Poutine s’est emparé de toutes les ruses. Il alterne entre les fonctions de Premier ministre et de Président. Chef du gouvernement en 1999, Vladimir Poutine devient ainsi président en 2000. Mais huit ans plus tard, lui et Dimitri Medvedev échangent leurs postes : Poutine redevient Premier ministre et Medvedev Président. En 2012, Vladimir Poutine est à nouveau élu Président, soit finalement vingt années sans quitter le pouvoir.

A durée illimitée

Afin de pouvoir présider à vie, les chefs d’État font généralement modifier la Constitution pour allonger la durée de leur mandat ou pouvoir se présenter autant de fois qu’ils le veulent à la tête de leur pays. Le problème est différent pour les royautés héréditaires où, par définition, les monarques restent sur le trône jusqu’à leur mort. Elizabeth II d’Angleterre, âgée de 91 ans, règne ainsi depuis 66 ans. 

En Malaisie, monarchie parlementaire fédérale, le roi est désigné selon la Constitution. A tour de rôle, tous les cinq ans, les neuf sultans régionaux deviennent souverains. Le sultan De Kelatan, Muhammad V, 15e roi élu en 2016 est le premier souverain suprême malaisien à abdiquer avant la fin de son règne, en janvier 2019. 

Des « faux rois » ont aussi gouverné jusqu’à leur dernier souffle. La république d’Ouzbékistan a été dirigée par Islam Karimov, président de l’Ouzbékistan soviétique de mars 1990 à septembre 1991 puis de la République d’Ouzbékistan de septembre 1991 jusqu’à sa mort, en septembre 2016. 

Le Gabonais Omar Bongo est lui aussi mort « en poste ». A 32 ans, il fût le plus jeune chef d’État du monde élu en 1967. Il présida le Gabon jusqu’à son décès en 2009. 

Mais dans l’histoire du XXème siècle, c’est le cubain Fidel Castro qui remporte la palme de longévité politique. Arrivé à la magistrature suprême le 16 février 1959, ce n’est que 49 ans et huit jours plus tard qu’il passa le relais à son « petit » frère, Raoul.
 

Auteur
Avec Nadine Epstain/France Culture

 




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