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L’internationale réactionnaire sur les amphétamines avec Musk

Extrême droite.

La montée inquiétante de l'extrême droite en Occident.

Une structure politique qui ne cesse de croître vient, avec l’appui de Musk, de prendre une ampleur qui lui était inconnue au XXIe siècle.

Les recherches pour une « internationale réactionnaire » ne sont pas récentes. Dans un texte signé par Éric Aeschimann publié dans l’édition du 9 octobre 2009 du journal Libération, il considérait comme faisant partie de cette internationale, des néoconservateurs Américains et Italiens, mais aussi des ex-maoïstes français, des penseurs nationalistes chinois et le pape Benoît XVI. Selon lui, le ressort profond de cette internationale était une haine des Lumières.

Un texte de Ludovic Lamant publié le 16 décembre 2016 dans Mediapart dénonçant la poussée des forces « préfascistes », anticipait que les élections qui allaient venir en Allemagne et en France, pouvaient consacrer cette internationale réactionnaire, qui monopolisait déjà, selon lui, le rôle d’opposition à « l’establishment ».

L’Obs du 26 septembre 2019 plantait définitivement le drapeau avec un texte de Xavier de la Porte titrant « Il y a aujourd’hui une Internationale réactionnaire » faisant référence au livre « l’Esprit de réaction » de l’historien américain Mark Lilla, qui considérait les réactionnaires non comme des conservateurs, dont les combats tournent autour de la relation entre l’individu et la société, mais étant plutôt des gens voulant contrer les révolutionnaires.

Il y aurait deux types de réaction, celle de rupture permet de revenir en arrière et de reconstruire le monde tel qu’il était, l’autre est de passer au-dessus du présent et de créer une nouvelle société inspirée du passé. Les réactionnaires voudraient essentiellement contrôler l’Histoire. Ceux-ci seraient en pleine mythologie et idolâtrie du passé sans chercher à apprendre de lui. « Il faut se méfier des réactionnaires parce qu’ils ont réponse à tout », affirmait Mark Lilla.

Selon d’autres articles de journaux de l’époque, cette internationale était présente dans le gouvernement du président du Brésil Jair Bolsonaro, en Italie, en Hongrie, en Pologne et durant le premier mandat de Donald Trump.

Le Monde diplomatique intégrait, dans son édition de septembre 2020, l’expansion de l’évangélisme dans cette internationale réactionnaire, alors que quatre décennies d’une dynamique ultraconservatrice du monde protestant influaient sur les questions sociales, économiques et diplomatiques au Mexico à Séoul, Lagos et de nombreuses autres régions du monde.

Les réactionnaires sur leur X avec Musk et Trump

L’internationale réactionnaire a atteint ces derniers jours une visibilité mondiale. Le président français, Emmanuel Macron, regrettait récemment de voir l’homme le plus riche de la planète soutenir « une internationale réactionnaire » en Europe.

Il a affirmé devant des ambassadeurs français : « Voilà dix ans, si on nous avait dit que le propriétaire d’un des plus grands réseaux sociaux du monde soutiendrait une nouvelle internationale réactionnaire et interviendrait directement dans les élections, y compris en Allemagne, qui l’aurait imaginé ? »

Il faisait référence au soutien d’Elon Musk au parti d’extrême droite allemand AfD dans le journal Die Welt, et ce, en pleine campagne pour les élections anticipées. Le premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, a aussi parlé d’internationale réactionnaire pour qualifier les soutiens d’Elon Musk.

De nombreux commentateurs politiques voient dans les propos d’Elon Musk et de Donald Trump une volonté de changer les règles internationales pour faire émerger un nouvel ordre mondial. Le directeur de l’Institut français des relations internationales (Ifri), Thomas Gomart, considère que ce qu’ils disent doit être pris au sérieux, affirmant qu’il ne fallait surtout pas sous-estimer la volonté de la deuxième administration Trump de changer les règles puisqu’il aurait attiré à lui une partie de l’« establishment tec ».

Les démocraties seraient menacées non seulement par les déclarations expansionnistes et l’imprévisibilité de Trump, mais aussi la puissance médiatique d’Elon Musk, l’homme le plus riche du monde. 

Comment réagir ?

L’Europe est loin d’une réponse cohérente. Si la Commission européenne retient son souffle avant le retour de Donald Trump, elle met cependant en place de nouveaux règlements tels le Digital Services Act (DSA) pour encadrer les activités numériques des « Big Tech ».

Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, veut que la Commission agisse avec la plus grande fermeté contre ce qui pourrait être des violations flagrantes de ce DSA par la plateforme X.

Forte de 150 spécialistes du numérique, la Commission enquêterait déjà depuis plus d’un an sur X, visant entre autres un problème de tromperie sur les comptes certifiés et le  manque de transparence sur les publicités.

D’éventuelles manipulations de l’algorithme de X pour promouvoir certains contenus semblent aussi dans le collimateur. Avec le DSA, l’Union européenne pourrait condamner X à une amende allant jusqu’à 6 % de son chiffre d’affaires mondial. Il y aurait cependant un choix politique de ne pas faire de vague pour l’instant.

La délégation des socialistes français a écrit à la Commission pour lui demander d’expliquer sa stratégie. L’eurodéputée PS Chloé Ridel affirme que « Tout le monde est pris comme des lapins dans les phares d’une voiture ».

Curieusement, cette vision antitrust des Européens contre les Big Tech se retrouve aussi dans les pages du « Projet 2025 » de la fondation Heritage, un groupe de réflexion national-conservateur, qui a aidé Trump à gagner ses élections. Certains des membres de ce groupe devraient faire partie de la nouvelle administration américaine.

Michel Gourd

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