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L’Italie transfère un 1er groupe de migrants vers ses centres en Albanie

Migrants

L’Italie a transféré ce lundi 14 octobre le premier groupe de migrants vers les centres qu’elle gère en Albanie, une première pour un pays membre de l’Union européenne, en vertu d’un accord controversé.

C’est un tournant qui vient d’être franchi par l’Italie de la première ministre d’extrême droite Georgia Melon. Elle a externalisé le traitement de l’accueil des migrants qui arrivent massivement d’Afrique.

Le patrouilleur de la marine italienne Libra est parti lundi avec un premier groupe d’hommes à son bord. Selon le site du quotidien La Repubblica, il s’agit de migrants originaires du Bangladesh et d’Égypte, et le navire, parti de l’île italienne de Lampedusa, doit arriver en Albanie mercredi.

Ce transfert inédit intervient en vertu d’un accord controversé signé fin 2023 entre le gouvernement de Giorgia Meloni, Première ministre d’extrême droite italienne, et Tirana, et qui prévoyait la création de deux centres en Albanie, d’où les migrants pourront effectuer une demande d’asile. Cet accord en vigueur pour cinq ans, dont le coût pour l’Italie est estimé à 160 millions d’euros par an, concerne les hommes adultes interceptés par la marine ou les garde-côtes italiens dans leur zone de recherche et de sauvetage dans les eaux internationales.

La procédure prévoit un premier contrôle sur un navire militaire, avant un transfert dans un centre du nord de l’Albanie, au port de Shengjin, pour une identification, puis vers un second centre, sur une ancienne base militaire à Gjader. Là, les migrants seront détenus en vertu d’une mesure de rétention administrative décidée par le préfet de Rome, dans des préfabriqués de 12 m2 entourés de hauts murs et de caméras et surveillés par la police, dans l’attente du traitement de leur demande d’asile. 

Selon le protocole italo-albanais, les demandeurs d’asile devront obtenir une réponse dans un délai de 28 jours. Si elle est positive, ils seront ramenés dans des centres en Italie. Dans le cas contraire, ils seront placés en cellule avant d’être expulsés vers leur pays d’origine.

L’intérieur du camp est sous la responsabilité des Italiens, la sécurité extérieure étant assurée par les forces de l’ordre albanaises. Les personnes considérées comme vulnérables par la loi, dont les mineurs, les femmes, les personnes souffrant de troubles mentaux, ayant été victimes de torture, de violences sexuelles ou de traite d’êtres humains, ne sont pas concernées par la procédure. Plus de 300 militaires, médecins et juges italiens sont engagés dans cette opération.

L’opposition dénonce une atteinte aux droits fondamentaux

« Il n’y a pas de barbelé, il y a de l’assistance. Tous peuvent demander une protection internationale et obtenir une réponse en quelques jours », a déclaré samedi le ministre de l’Intérieur Matteo Piantedosi, évoquant des centres de « détention légère ». Mais le syndicat de l’administration publique UILPA a dénoncé vendredi les conditions de vie dans ces centres et les restrictions d’accès à l’eau, à l’électricité et aux moyens de communication. Selon Elly Schlein, la cheffe du Parti démocrate (PD, centre-gauche), principale formation de l’opposition, le gouvernement Meloni « hausse les impôts et gaspille près d’un milliard d’euros » en cinq ans, « au détriment des droits fondamentaux des personnes ».

Pour l’opposition, cette première opération pourrait marquer le début de l’échec du projet, rapporte le correspondante de Rfi à Rome. Les partis de centre gauche rappellent notamment qu’un arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne remet en question la liste des 22 pays sûrs dressée par le gouvernement italien et que la procédure de demande d’asile par liaison vidéo constitue une discrimination entre migrants. « Ceux en Albanie se retrouvant beaucoup plus seuls et impuissants », souligne Elly Schlein.

L’Italie et la Hongrie ont proposé d’en étendre le principe à l’échelle européenne, avec la création de « hubs de retour » – des centres où seraient renvoyés des migrants illégaux dans des pays en dehors de l’UE. Cette proposition de sous-traiter une partie de la pression migratoire pourrait être discutée au sommet européen des 17 et 18 octobre à Bruxelles. Elle est déjà officiellement soutenue par quinze pays membres de l’UE depuis le mois de mai.

Outre l’Albanie, le gouvernement italien a conclu un accord avec la Tunisie, prévoyant une aide économique en échange d’efforts accrus pour arrêter les migrants qui quittent son territoire pour aller en Italie.

L’Italie a également renouvelé un accord conclu en 2017 avec le gouvernement libyen de Tripoli, soutenu par l’ONU, en vertu duquel Rome fournit une formation et un financement aux garde-côtes libyens afin d’endiguer les départs de migrants ou de renvoyer en Libye ceux qui sont déjà en mer.

Avec Rfi

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