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Lorsqu’on est trois, un se fait avoir !

Image par Elisa de Pixabay

Il y a des sujets où les dictons populaires s’enchaînent. C’est tout à fait attendu car les dictons sont la réflexion et l’analyse de l’expérience de l’homme. Elles sont complexes, ce qui explique le nombre incalculable de dictons.

Commençons par celui du titre de la chronique, c’est de lui que j’en annonce d’autres qui en découlent. Imaginons les deux élèves les plus forts et les plus bagarreurs de la cour d’école. Il est inévitable que ces deux vont dans un premier temps se battre pour la suprématie du territoire et sur les autres.

Ainsi, il y a trois parties dans la communauté scolaire. La première grande gueule, la seconde et les autres. Dans cette configuration vous vous doutez bien que le troisième n’est vraiment pas en situation d’imposer son point de vue.

C’est exactement ce qui s’est toujours passé dans les relations internationales. Lorsque les tensions se font sentir et qu’il y va de l’avenir du monde, les deux grandes puissances sont en concurrence frontale. Je n’ai pas beaucoup de génie pour dissimuler les pays en question, grossièrement cachés sous mes sous-entendus.

Pourquoi deux ? Car l’inévitable est que tous les autres se sont mis en situation d’être dominés et qu’il ne reste que les plus forts. De combats en combats, d’alliances en alliances, il est évident qu’ils ne reste que deux en finale. L’Algérie, qui se croyait une grande gueule sur la scène internationale, s’est fait vite remettre à sa place, elle ne sera une grande gueule que devant une foule, les uns tétanisés par la peur, les autres embrigadés jusqu’au fond du cerveau.

Si nous revenons à notre cour de récréation, les deux sont donc en finale, parfois dès les premiers jours de classe, parfois après un long chemin de provocations et de menaces de l’un vis vis de l’autre. On appelle cela en matière de relations internationales, tester les forces de l’ennemi.

Mais si le combat est déclenché et qu’il devient féroce, les autres n’ont que deux solutions qui s’ouvrent à eux. Soit se rallier à la position de l’un des deux soit être neutre.

Je l’ai déjà écrit dans une chronique, le neutre n’existe pas. Les deux grosses gueules feront tout, par la force de l’intimidation ou de la corruption (des billes, des bonbons ou de la protection), pour obtenir l’adhésion des indécis.

Dire que la Suisse est l’exemple de la neutralité est une vaste plaisanterie ou une profonde ignorance. Comment fait-elle alors ? Eh bien, elle a montré au monde que dans l’annonce des deux possibilités, comme je viens de les énumérer, il y avait bien une troisième voix. 

C’est d’être plutôt d’un côté et plutôt de l’autre dans le même temps, selon les circonstances. Il ne faut jamais oublier que dans l’histoire européenne, ce petit pays avait compris qu’il fallait être une source armée de mercenaires au profit des uns puis, ensuite des autres.

Chacun des belligérants ne voulant pas se priver des services d’une armée qui en avait acquis l’expérience car il pouvait y compter lui aussi pour les utiliser la fois suivante à leur compte. Et parfois dans des situations étranges comme celle de la garde du Pape.

Bref, l’écolier suisse avait compris qu’il n’avait aucun intérêt à s’engager dans une adhésion visible pour l’un ou pour l’autre. Il compte les coups, en est épargné et ne fait jamais état de son engagement pour l’un ou pour l’autre sinon pour les deux. C’est une situation possible que car il a des atouts pour convaincre les deux. Le premier est celui que nous avons déjà énoncé, le second est d’avoir un système bancaire anonyme et sécurisé. Les banquiers vénitiens l’avaient compris dès le 16e siècle. 

Rares sont les élèves qui ont cet atout de flexibilité. Ils n’ont de choix que celui de faire appel au second dicton, il faut savoir miser sur le bon cheval. Le souci est que l’Algérie mise toujours sur les toquards, ceux qui s’effondrent avant même la fin du combat. 

Elle avait choisi les dictatures, elles se sont éclatées en morceau ou sont en perpétuelles vagues de coups d’État. Pas franchement une bonne mise lorsque le bookmaker change à chaque pari. 

Elle avait cru au coup Suisse et elle s’est intégrée dans un groupe d’élèves se disant « Les non alignés ». Non alignés, d’accord, mais derrière une grosse tête. Et bien entendu, l’élève Algérie avait choisi la plus naze des files comme disent les jeunes scolaires.

C’est là ou intervient mon dernier dicton connu par un célèbre dirigeant politique, « Les États n’ont pas d’amis mais des intérêts ». L’Algérie n’a aujourd’hui que des faux amis et des intérêts peu convaincants. Et en plus, la guerre lui a rapporté la baisse du prix du pétrole. Elle est loin d’avoir le stock de billes suffisamment important pour pouvoir être écoutée. C’est notre dernière citation en adage, « Le cocu dans l’affaire ».

Les deux grandes gueules vont maintenant se rencontrer en Alaska. Si l’Ukraine n’est pas invitée, l’Algérie n’aura même pas un strapontin. La Russie reprendra sa place dans la puissance duelle et l’Algérie devra, comme dans les années 70’, se placer en inféodation derrière le gros ours sans parvenir à en tirer avantage avec l’aigle américain. Finalement, à la place du toutou aboyeur.

Mais dans la classe supérieure, l’année suivante, personne n’avait anticipé l’arrivée d’un nouveau venu, une grande gueule qui n’avait pas l’intention de se mettre en inféodation des deux. Son nom est la Chine. 

Finalement, zéro au cours de géographie et d’histoire, zéro en cours de langues, comment voulez-vous y échapper lorsque vous en tentez quatre, zéro en cours de gestion et zéro en sport dans la cour de récréation.

Et moi, indigne décision, le Grand Invisible m’a affecté dans cette école.

Boumediene Sid Lakhdar

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