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« Ma maison restera la rue, tant que… » par Mohamed Benchicou

Le Hirak a bouclé sa première année

« Ma maison restera la rue, tant que… » par Mohamed Benchicou

Le vendredi 22 février 2019, vers 14 heures, ressuscitait un peuple que la providence et les hommes semblaient avoir oublié dans ce lointain caveau où gisent les dépouilles de quelques anciennes espérances…

Du fond de leur anonymat, des hommes aux visages brûlés par les épreuves, des femmes au regard résolu et dans lequel Dieu avait déposé l’expression d’un demi-siècle d’abandon et de ténacité, des hommes et des femmes avaient surgi, ce jour-là, comme on surgit de l’oubli, le visage transformé par la détermination et l’espoir, les yeux rougis par l’émotion et jurant, de leur main durcie, tendue vers le ciel, cette main qui sentait l’Akfadou et la Mitidja, cette main qui porte les douleurs de la terre dans ses lignes et dans ses rides,  que le règne des voyous est terminé.  

Qui les aurait crus capables d’une telle endurance, d’un si long souffle, d’une si ancienne souffrance et d’une si vaste envie de vivre autrement ? Voilà une année que les  Algériens crient à la face du monde leurs espoirs et leur désespoir. 

Une année ! Qui a jamais pensé que les Algériens de tous âges, de toutes obédiences, de toutes les conditions, les Algériens, ce peuple qu’on disait condamné par toutes sortes de malédictions, cette population coupable de trop manger, de ne pas assez travailler, de trop procréer, d’avoir, aux dires de Bouteflika, troqué le passeport vert contre du fromage rouge et, à écouter Ouyahia, de consommer trop de yaourts, ces êtres si longtemps cobayes silencieux toutes sortes d’expériences ratées, qui avaient tout enduré sans gémir, sans trahir, dans le calme et la dignité, ces hommes et ces femmes qu’on faisait sortir dans la rue ou enfermer dans leur logis selon les caprices politiques des gouvernants,  ce peuple au nom duquel on rend une justice la justice pervertie, avait enfin répondu : « Ma maison sera la rue tant que vous occuperez nos palais ! »

 Bien sûr, il y a l’usure, la banalisation de l’héroïsme, la manifestation de ce que Lénine appelait « l’impatience petite-bourgeoise », tout et tout de suite, répondre à la violence par la violence.

Mais le hirak n’est ni un mouvement violent ni une flamme fugitive échappé du brasier. Il ne donne pas aux uns et aux autres le prétexte pour l’isoler puis le briser.  

Auteur
Mohamed Benchicou

 




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