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Macron à table : café amer à Alger et thé sucré à Rabat

Macron et Mohammed VI

Macron et Mohammed VI

Dans la mosaïque complexe des relations franco-maghrébines, Emmanuel Macron semble pris dans un jeu d’équilibre, où chaque rencontre se déguste avec des saveurs particulières. Paris, Rabat et Alger forment un triangle où les tensions et les alliances s’entremêlent, offrant un spectacle aux subtilités dignes d’un grand repas diplomatique.

Alger : le café amer d’une rancœur persistant

À Alger, la tasse de café est plus amère que jamais. La relation franco-algérienne reste marquée par un passé colonial douloureux, et les gestes récents de la France, comme sa reconnaissance de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental, ont ravivé des cicatrices anciennes.

Perçu comme un affront, cet acte a conduit à un refroidissement des relations, illustré par le rappel de l’ambassadeur algérien à Paris. L’héritage de la guerre d’indépendance et des tensions coloniales pèse lourdement, transformant chaque interaction en un jeu prudent de diplomatie tendue.

Pour Alger, ce « café » amer symbolise le poids des déceptions accumulées, et chaque goutte rappelle à la fois l’histoire et la complexité des attentes non comblées. À chaque avancée marocaine sur la scène internationale, Alger voit un appui français latent, qui renforce son amertume. Ce café, lourd de symboles, représente une méfiance qui semble toujours difficile à adoucir.

Rabat : le thé sucré d’un rapprochement stratégique

Du côté de Rabat, le ton est plus doux, comme un thé sucré qui accompagne le renforcement des liens avec Paris. La reconnaissance par la France de la « marocanité » du Sahara occidental a été célébrée comme une victoire politique au Maroc, renforçant la position de Rabat comme acteur majeur dans le Maghreb. Avec ses alliances internationales, le royaume marocain se profile comme un partenaire stratégique pour Paris dans une région marquée par l’instabilité.

Cependant, ce thé, aussi sucré soit-il, est loin de masquer les tensions souterraines. La rivalité historique entre Rabat et Alger reste palpable, chaque geste diplomatique étant observé à la loupe par les deux capitales. Malgré la douceur accordée, les relations franco-marocaines doivent constamment composer avec des jalousies et des rivalités anciennes, soulignant que tout rapprochement est une affaire de mesure et de diplomatie fine.

Paris : un couscous épicé, entre équilibre et ambiguïté

À Paris, Emmanuel Macron se retrouve à jongler avec un « couscous » épicé, symbole des défis politiques qui pèsent sur les relations avec le Maghreb. En imposant de maintenir des liens privilégiés avec Rabat sans froisser Alger, la France se trouve prise dans une dynamique ambiguë, où chaque geste est scruté, chaque parole est pesée. Alors que Macron doit prochainement se rendre au Maroc à l’invitation du roi Mohammed VI, Alger perçoit ce geste comme un affront supplémentaire, un abandon des valeurs de solidarité maghrébine qui alimente un ressentiment toujours latent.

Dans cet effort pour maintenir un équilibre stratégique, Paris doit composer avec des impératifs nationaux, comme les questions de sécurité et d’immigration, qui font les choix encore plus complexes. La saveur du couscous parisien se teinte d’ambivalence, mêlant volonté de rapprochement et nécessité de garder une neutralité qui devient difficile à justifier.

Un repas aux saveurs diplomatiques contrastées

Dans ce triangle géopolitique, la France se retrouve donc à « table », avec des plats qui évoquent les tensions et les alliances de manière bien tangible. Les goûts amers, sucrés et épicés de cette table diplomatique évoquent les sentiments profonds et contrastés des trois nations. Le « café » algérien, chargé d’amertume, rappelle les blessures non cicatrisées d’un passé colonial. Le « thé » marocain, lui, se boit avec un certain sourire, dans une ambiance d’alliance stratégique. Quant au « couscous » servi à Paris, il porte en lui toutes les complexités et contradictions de la position française face au Maghreb.

Alors que les relations entre ces trois pays évoluent, il devient essentiel pour leurs dirigeants de s’asseoir ensemble, non pas pour un simple repas, mais pour discuter de projets communs de sécurité, de coopération économique et de stabilité régionale. Le menu actuel laisse un goût de rivalité, mais avec un peu de volonté, il pourrait devenir le symbole d’une entente, offrant à ces trois pays un avenir plus harmonie.

 Dr A. Boumezrag

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