Au Mali, peu après l’annonce du remaniement ministériel ce lundi 24 mai, la situation s’est brusquement tendue à Bamako. Des hommes armés se sont rendus au domicile officiel du Premier ministre Moctar Ouane.
Le président et le Premier ministre ont été conduits dans le camp militaire de Kati, près de la capitale.
S’il a fallu patienter 10 jours pour connaître le nouveau gouvernement, la réaction des militaires ne s’est pas faite attendre. Peu après l’annonce du remaniement ministériel, des hommes armés se sont rendus au domicile du Premier ministre Moctar Ouane. Il a eu le temps de déclarer, au téléphone, la présence de militaires chez lui : «Des militaires actuellement chez moi. Ils sont en train de me conduire chez le président de la transition [Bah N’Daw ndlr] », avec lequel il partage un mur mitoyen.
Le président Bah N’Daw, le Premier ministre Moctar Ouane, leur tout fraîchement nommé ministre de la Défense le général Souleymane Doucouré et d’autres « collaborateurs » ont été conduits par les armes hier au camp militaire de Kati. Cette ville-garnison, située à une quinzaine de kilomètres de la capitale, est l’ancien fief de l’ex-junte. Il a été demandé à leurs chauffeurs et gardes qui les accompagnaient de redescendre sans eux vers la capitale malienne, rapporte notre correspondant à Bamako, Serge Daniel.
Dans la soirée, la ville de Bamako était plutôt calme et la télévision nationale a même rediffusé cette nuit le communiqué officiel annonçant la liste des membres du gouvernement.
Mécontentement des militaires après l’annonce du remaniement ?
Les militaires n’ont pas encore fait de communiqué pour expliquer ces initiatives mais selon plusieurs sources, c’est le colonel Sadio Camara, qui venait tout juste de perdre son fauteuil à la Défense, et le colonel Assimi Goïta, vice-président de transition et leader de la junte pourtant officiellement dissoute, qui sont à l’origine de ce coup de force.
On ignore si les autres membres du CNSP sont aussi impliqués. Alors que cherchent-ils ? La recomposition du gouvernement qui avait été nommé hier ? La démission du Premier ministre, du Président ? Que peut-il sortir de cette situation surréaliste ?
Au Mali, ce coup de force suscite beaucoup d’incompréhension. Les messages atterrés se multiplient sur les réseaux sociaux et certaines figures politiques, également, ont déjà publiquement fait part de leur indignation comme l’ancien Premier ministre Moussa Mara, ou encore les anciens ministres Mamadou Ismaila Konaté et Housseini Amion Guindo, précise David Baché, du service Afrique de RFI.
Condamnation de la communauté internationale
Du côté de la communauté internationale, la « tentative de coup de force » est condamnée dans un communiqué commun de la mission de l’ONU au Mali (Minusma), la Communauté des États ouest-africains (Cédéao), l’Union africaine, la France, les États-Unis, le Royaume-Uni l’Allemagne et l’Union européenne. C’est la première prise de position depuis le début de l’affaire.
Le comité local de suivi de la transition composé de tous les représentants de la communauté internationale au Mali s’inquiète et exige « la libération immédiate et inconditionnelle » des autorités de transition arrêtées. Et comme pour montrer sa fermeté, le comité ajoute dans le même communiqué que les auteurs de l’arrestation du Premier ministre et du président de la transition « seront personnellement rendu responsables de leur sécurité ».