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Manifestation contre la loi sur les hydrocarbures: la solitude du peuple algérien

DISSIDENCE CITOYENNE

Manifestation contre la loi sur les hydrocarbures: la solitude du peuple algérien

Manifestations à Alger contre le projet de loi sur les hydrocarbures. Crédit photo : Zinedine Zebar.

Quelques milliers de manifestants se regroupent dès le matin aux abords de la bâtisse qui abrite les illustres membres de l’Assemblée populaire nationale (APN). Ils viennent dénoncer la révision de la loi sur les hydrocarbures programmée pour être soumise aux députés.

Arrivés  par la rue Mustapha Ben Boulaïd,  ils sont bloqués par un cordon de police aux abords de la cinémathèque, rue Asselah Hocine et scandent : « qanoun el mahroukat à la poubelle » i.e. la loi des hydrocarbures à la poubelle ; « ba3ouha el khawana ba3ouha » i.e. ils l’ont vendu les traitres ils l’ont vendu ; « makach el bi3a ya el khawana » i.e. pas de vente traîtres.

Ils s’en prennent aux députés et crient : « fi el parlamen makach lamen » i.e. on ne peut pas avoir confiance en ce parlement. « Dégage ya palamen l’Algérie machi lelbi3 » i.e. dégage parlement l’Algérie n’est pas à vendre ; « parlamen el hafafet ba3ouna el mahroukat » le parlement des coiffeuses a bradé les hydrocarbures. « lefln el khawana le FLN » i.e. FLN les traîtres FLN ; « barlamen khawana khawana » i.e parlementaires traîtres ;  » elparlamen maymatalnach ou kanoun el mahroukat mayatsignach »  i.e. on ne peut pas avoir confiance en ces parlementaires et la loi sur les hydrocarbures ne sera pas  signée.  echa3b yourid is9at el parlamen i.e. le peuple veut la dissolution du parlement.

Ils réaffirment leur refus de se rendre aux urnes en disant : « sahra ba3ouha lebled kasmouha ouallah manvoté » i.e. le sahara a été vendu le pays partagé je jure devant dieu que je ne voterai pas. 

Crédit photo : Zinedine Zebar.

Sans oublier de lui rappeler l’histoire et leur désir de voir un pouvoir civil éclore, ils réitèrent au chef d’état-major leur refus  de voter cette année et  s’en prennent aux décideurs en scandant : « djazair amana ba3ouha lel khawana » i.e. l’Algérie est un legs et vous l’avez vendu traitres.  Ba3ouha el khawana ba3ouha i.e. ils l’ont vendu les traitres ils l’ont vendu.

Vers 11 heures les forces anti-émeutes font une percée et repoussent brutalement la foule à l’aide  de leurs boucliers, au-delà de la rue Asselah Hocine. Ce qui crée une grande panique. Femmes et personnes âgées ne sont pas épargnées. Un officier portant le croissant et 3 étoiles, probablement un commissaire principal, se conduit comme le plus vil des matons de la plus terrible des prisons. Invectives et insultes ne cessent de pleuvoir  de sa bouche.

La réaction des manifestants est à la hauteur de ce qu’ils subissent. Tout en répétant « matalibna char3ia silmya silmya oueddaoula irhabia » i.e. nos doléances sont légitimes pacifique pacifique est l’état est terroriste. Ils rappellent aux policiers qu’ils ont aux ordres des militaire, critiquent leur soumission aveugle et leur lancent  ya el polici bladi ou bladek manbi3ouhach i.e hé policier ce pays est le tien et le mien ne le vendons pas.

Scandalisés par tant de brutalité ils crient hadi daoula oula isti3mar » i.e. c’est un état ou une force colonisatrice ? noudou ya el 3asima noudou i.e. soulevez-vous habitants de la capitale.   Ils promettent d’être aux côtés de leurs étudiants mardi et disent : nhar etlata m3a etalaba ».

Une dame âgée, bravant les forces de police et se tenant au niveau des rampes de la rue Ben Bouali en tenant un drapeau à la main fusionne avec la foule qui lui lance : »ahya el hadja maranach mlah i.e vieille dame nous ne sommes pas bien. Ali Laskri, secrétaire général du FFS est scandalisé. Il s’écrie c’est ça l’image qu’ils veulent donner au monde,  avant d’être happé par la foule lors de la gigantesque bousculade.

Les Algériens ont mené leur combat contre la puissance coloniale, seuls. Ils ont peiné à  être reconnu et soutenu. A l’indépendance Alger est devenu la Mecque des révolutionnaires et les fils d’Algérie n’ont jamais manqué d’aider, d’accueillir tous les mouvements révolutionnaires d’Afrique se positionnant comme les chantres du non-alignement. 

C’est seuls aussi, qu’ils ont mené la guerre contre le terrorisme pendant une quinzaine d’années, dans l’indifférence des pays se disant civilisés. Ils ont subi le qui tue qui et se sont fait affubler par certains médias occidentaux de l’abjecte qualificatif de terroristes.
Aujourd’hui c’est encore seuls, qu’ils tentent de freiner les appétits féroces  des grandes puissances néo-colonisatrices et des multinationales prédatrices pour lesquels l’Afrique représente une cible de choix. 

Comme toujours les combats des enfants de la terre d’Algérie  sont d’avant-garde. Les millions de personnes qui manifestent tous les vendredis depuis près de huit mois, ne semblent pas attirer l’attention des médias, des politiques ou des intellectuels occidentaux. Leur mutisme est bruyant !

Pourtant il semble que ce mouvement populaire, cette révolution du sourire, est en phase de bouleverser les équilibres géopolitiques mondiaux. 

Les Algériens ne semblent pas s’en soucier : ils assument leur solitude.

 

 

Auteur
Djalal Larabi

 




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