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Monsieur l’ex-président de la république, les mots ont une histoire

REGARD

Monsieur l’ex-président de la république, les mots ont une histoire

Au temps de votre splendeur, vous avez exprimé votre admiration pour le général De Gaulle qui vous a reçu parce que vous étiez le ministre des Affaires étrangères d’un grand pays qui venait de se libérer et jouissait alors d’un respect certain dans le monde.

Derrière votre admiration pour ce chef d’Etat français, d’aucuns peuvent y voir une sorte de désir de ressembler, consciemment ou non, a ce grand personnage entré dans l’histoire de son pays par la grande porte.

Pour ne pas ternir son statut historique, il avait choisi de sortir par la même grande porte. En homme d’action d’une grande culture, pas uniquement dans l’art de la guerre, ses écrits, tout le monde en convient, sont d’une grande qualité littéraire. Homme féru d’Histoire et de ses tragédies, il a voulu être par respect à l’écoute du peuple qui l’avait élu. Il annonça à l’avance son départ au cas où le peuple français lors d’un référendum le désavouerait.

Quand l’annonce officielle des résultats du référendum fut faite, l’homme d’Etat quitta aussitôt le palais l’Elysée, siège de la présidence de la république. En attendant lesdits résultats, le seul acte officiel qu’il fit, a consisté à la rédaction de sa démission qu’il remit aussitôt pour sa publication dans le journal officiel. Par ce geste qui le grandissait, il signifiait que ni la morale, ni la Constitution de son pays ne lui donnait le droit de prendre une quelconque décision qui aurait des effets sur la marche du pays alors qu’il n’était plus là pour répondre de ses actes.

Je cite le cas de De Gaulle car les Algériens le connaissent et ont subi sa politique pendant quatre ans. Ailleurs dans le monde, on trouve aussi des hommes politiques qui, en partant n’ont pas laissé des pièges derrière eux pour rendre plus difficile ‘’l’héritage’’ à leur pays. Je parle ‘’d’héritage’’, car vous vous êtes comportés comme si vous étiez un bon père de famille qui a pris soin de partager ses biens entre ses enfants. Non Monsieur, l’Algérie n’est pas une propriété, elle est un pays habité par un PEUPLE que certains ont encore l’envie et l’audace de le déposséder de sa souveraineté.

Aujourd’hui 5 avril 2019, ce peuple est une nouvelle fois, depuis le 22 février dans toutes les rues du pays. Si vous l’entendez, il vous dit, les hommes qui vous ont servi, nous leur disons dans nos langues taurouhou gaâ (en français, du balai, dégagez, disparaissez de nos vues).

Ce peuple encore une fois prouve son intelligence collective en tournant le dos à tous les timorés et autres manipulateurs qui veulent l’enfermer dans l’infantile juridisme, le péché mignon de tous ceux qui veulent préserver leurs intérêts ou bien des gens qui ne comprendront jamais que le Politique a la primauté dans la vie et l’histoire des sociétés.

Monsieur l’ex-président, soyez tranquille chez vous dorénavant. Il y a un peuple et un pays qui est loin d’être un désert. Les millions de gens dans les rues vont trouver les moyens de les protéger. Le mot DEMISSION a un sens. L’homme politique qui est démis de ses prérogatives, n’a le droit ni politique, ni juridique, ni morale, d’agir en aucune façon sur la vie d’un pays.

Monsieur l’ex-président, cette lettre n’est pas en vérité adressée à vous. Elle interpelle modestement ceux qui restent sourds aux demandes du peuple et qui croient encore à la fiction du juridique parce vous les avez désignés avant votre départ. J’espère qu’ils comprendront qu’ils sont sur des sièges éjectables. Qu’ils ne confondent pas fiction et réalité s’ils ne veulent pas connaître déboires et humiliations.

Je sais que la fiction juridique est à la mode ces temps-ci. C’est une spécialité des malades qui gouvernent le monde.

Certains s’autoproclament présidents, d’autres construisent des murs ou signent des titres de propriété des biens d’autrui, titres qui finiront dans une poubelle comme tout chiffon de papier.

Ali Akika, cinéaste

Auteur
Ali Akika, cinéaste

 




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