Jeudi 24 septembre 2020
Montage de voitures : 15 ans de prison requis contre Ouyahia et 10 ans contre Yousfi
Le procureur général près la Cour d’Alger a requis jeudi une peine de 15 ans de prison ferme contre l’ex-Premier ministre Ahmed Ouyahia et 10 ans de prison ferme contre l’ex-ministre de l’Industrie Youcef Yousfi assortie d’une amende de 2 millions de DA chacun, dans le cadre du procès en appel lié au montage d’automobiles.
Une peine de 15 et 12 ans de prison ferme a été requise respectivement contre Mourad Oulmi, patron du groupe Sovac, et Khidher Oulmi. Le procureur a requis une peine de 3 ans de prison ferme avec une amende d’un million de DA contre l’ex-PDG du Crédit populaire algérien (CPA, Omar Boudiab) et des cadres de la banque et de l’industrie, impliqués dans l’affaire.
Il a été aussi demandé la saisie des biens et le gel des activités des entreprises représentées dans le procès par des personnes morales avec une amende de 32 millions de DA pour chacune.
Des pertes évaluées à 128.983.650.708 de DA
Le représentant du Trésor public avait estimé les pertes à 128.983.650.708 de DA (plus de 128 milliards et 983 millions de DA).
Ces pertes sont reprochées à trois opérateurs poursuivis dans l’affaire, à savoir Mazouz Ahmed, Larbaoui Hassan et Bairi Mohamed.
La société Mazouz de montage de véhicules et de camions est à l’origine de 39 milliards de DA de pertes, l’opérateur Larbaoui Hassan plus de 87 milliards de DA et le group IVAL de Bairi Mohamed plus d’un milliard de DA, selon le Trésor public.
Le procureur de la République a expliqué que les pratiques relatives à l’investissement dans le domaine du montage automobile, étaient « basées sur le népotisme et le favoritisme d’un opérateur à un autre sans aucun motif légal, ce qui a élargi le fossé entre le peuple et ses institutions ».
Ce dossier qui a fait l’objet de deux enquêtes judicaires au niveau de la Cour suprême (pour les cadres supérieurs) et au niveau du Tribunal de Sidi M’hamed (pour les hommes d’affaires), a révélé que « certains hommes d’affaires géraient des sociétés écrans tout en bénéficiant d’indus avantages fiscaux, douaniers et fonciers », a ajouté le procureur de la République.
Affirmant qu’en réalité il n’y avait aucune activité de montage et d’industrie automobile, il a précisé que les trois opérateurs Mazouz Ahmed (propriétaire de 27 sociétés), Larbaoui Hassan (34 sociétés) et Bairi Mohamed (9 sociétés) « ont exploité leurs relations avec les anciens ministres de l’Industrie Abdeslem Bouchouareb, Bedda Mahdjoub et Youcef Yousfi et avec les deux ex Premiers ministres Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal, pour arracher des marchés relatifs au montage et à l’industrie automobile en violation des dispositions législatives et règlementaires en vigueur dans ce domaine, et notamment sans la validation du Conseil national d’investissement (CNI) ».
Concernant l’ancien ministre de l’Industrie et des Mines en fuite Abdessalem Bouchouareb, contre lequel une peine de 20 années de prison ferme a été requise, le procureur de la République a indiqué que ce dernier avait octroyé d’indus avantages dans des marchés publics, précisant qu’il avait mis en place une commission d’évaluation technique, « qui était en fait une commission fictive puisque les marchés étaient attribués par favoritisme à Larbaoui Hassan, Mazouz Ahmed et Bairi Mohamed ».
Quant à l’ex-Premier ministre, Ahmed Ouyahia (contre lequel une peine de 20 années de prison ferme a été requise), le procureur de la République a déclaré que « l’accusé a octroyé d’indus avantages dans l’affaire de montage automobile au profit de 5 sociétés, dont celle de Mazouz Ahmed qui a bénéficié d’une autorisation exceptionnelle sans respect les lois en vigueur ».
Rappelant d’autres charges retenues contre l’ex Premier ministre Ahmed Ouyahia à savoir octroi d’un avis favorable au mépris des principes de candidatures et d’équité entre soumissionnaires à des marchés publics, et abus de fonction, il souligné que sa validation du projet de la société Mazouz a entraîné la dilapidation de près de 7700 milliards centimes de deniers public, outre la déclaration mensongère relative à ses biens et comptes bancaires accrédités de montants non justifiés (15 à 30 milliards de centimes). Des montants que l’accusé « n’a pu en justifier l’origine, ce qui prouve qu’il s’agit de blanchiment d’argent », a-t-il ajouté.
S’agissant de l’ex-Premier ministre Abdelmalek Sellal (contre lequel une peine de 20 années de prison ferme a été également requise), le procureur de la République a mis en avant dans son réquisitoire qu’il « a supervisé en personne le dossier du montage automobile +sans en informer la Présidence+ et a associé son fils Farès à Ahmed Mazouz dans la société de ce dernier, qui a cédé 23% de ses actions à Farès Sellal, en contre partie d’indus avantages ».
Il a fait savoir que Sellal « a préétabli la liste des opérateurs à agréer pour l’activité de montage automobile et élaboré un cahier de charges sans aucune base légale », ajoutant qu’il avait donné des agréments aux hommes d’affaires Oulmi Mourad et Tahkout Mahieddine en sus de 150 millions DA pour investir dans cette activité.
En outre, Sellal avait octroyé à l’opérateur Mohamed Bairi un terrain à Boumerdes, « en sachant que c’était un terrain agricole », a encore révélé le procureur de la République estimant la dilapidation de deniers publics à de 24 milliards de DA.
Par ailleurs, Abdelmalek Sellal « a participé au financement occulte de la campagne électorale de l’ancien président, en sa qualité de directeur de campagne, a-t-il ajouté précisant qu’il avait procédé à l’ouverture de deux comptes pour la domiciliation des dépôts et aides de l’Etat, « en violation de la loi portant régime électoral qui prévoit l’ouverture d’un seul compte ».
Pour ce qui est de Youcef Yousfi (contre lequel 15 ans de prison ferme ont été requis), le procureur de la République a rappelé que l’ex ministre de l’Industrie était accusé d’abus de fonction et de violation des lois et réglementations en vigueur, en sus de l’octroi illégalement d’autorisations pour le montage de véhicules aux opérateurs Larbaoui Hassan et Mazouz Ahmed induisant pour le Trésor public un préjudice de l’ordre de 2900 milliards de centimes.
Le procureur de la République a déclaré, au sujet de l’ancien ministre de l’Industrie Mahdjoub Bedda, (contre lequel il a requis 15 ans de prison ferme), qu’il est poursuivi pour octroi d’indus avantages aux hommes d’affaires Oulmi Mourad, Tahkout Mahieddine et Larbaoui Hassan, en faisant fi des principes de candidature, d’égalité et de transparence en matière de marchés publics.
Affirmant que Mahdjoub Bedda est responsable de la dilapidation de 800 milliards de centimes, le représentant du Parquet a évoqué en outre la fausse déclaration relative à 9 comptes bancaires et à la propriété de deux entreprises. « Il est à l’origine d’une perte estimée à 51 milliards de dinars » dans le cadre des kits SKD et CKD au profit des trois opérateurs Larbaoui, Mazouz et Bairi, a-t-il ajouté .
Pour ce qui est de l’ex-wali de Boumerdes Yamina Zerhouni (contre laquelle une peine de 10 ans de prison ferme a été requise), le Procureur de la République a rappelé son implication dans l’octroi d’indus avantages (terrain agricole à l’opérateur Bairi Mohamed) et d’abus de fonction.
Concernant Abdelghani Zaalane (contre lequel le procureur de la République a requis une peine de 10 ans de prison ferme), il est impliqué dans l’affaire du financement occulte de la campagne électorale pour un cinquième mandat, en tant que directeur de campagne en remplacement de Abdelmalek Sellal le 2 mars 2019.
Sur le compte bancaire de la campagne ouvert au nom de Zaalane pour Abdelaziz Bouteflika, l’homme d’affaire Ali Haddad avait retiré 19 milliards de centimes pour les dissimuler au siège de sa société à Bab Ezzouar.
Les trois opérateurs impliqués dans cette affaire, à savoir Hassan Arbaoui, propriétaire de Kia Motors, Ahmed Mazouz et Mohamed Bairi (10 de prison ferme requis contre chacun d’eux) et poursuivis pour « blanchiment d’argent dans le cadre d’une bande criminelle organisée », ils ont bénéficié, indûment, d’agréments pour l’activité de montage et de fabrication d’automobiles avec la complicité des ministres accusés.
Les fonctionnaires du ministère de l’Industrie et des mines, à savoir, Boudjemea Karim, Agadir Omar, Tira Amine, Abdelkrim Mustapha et Mekraoui Hassiba (8 ans de prison ferme requis contre chacun d’eux), ils ont joué un rôle « important » dans l’étude de dossiers, notamment ceux relatifs aux trois opérateurs ayant obtenu indument les marchés de montage automobile.
S’agissant des inculpés Ali Haddad, Hadj Malek Saïd et Ourani Ahmed (10 ans de prison ferme requis contre chacun d’eux), ils sont poursuivis pour blanchiment d’argent dans le cadre d’une bande criminelle et participation au financement occulte de la campagne électorale du 5e mandant. Ali Haddad avait été chargé par Said Bouteflika de récupérer l’argent de la campagne et c’est ainsi qu’il avait retiré les 19 milliards de centimes du compte de la campagne pour les déposer au siège de sa société à Bab Ezzouar.
Quant à Ahmed Mazouz et Nemroud Abdelkader, accusés d’avoir bénéficié d’avantage accordés par Ahmed Ouyahia et de blanchiment d’argent, ils sont poursuivis pour le financement occulte de la campagne électorale, Ahmed Mazouz (39 mds centimes), Hassan Arbaoui (20 mds centimes), Bellat (01 mds centimes), Benhamadi (5 mds centimes) et Said Hichem (10 mds centimes).
Les frères Senaï Mustapha, Senaï Karim et Senaï Sofiane (8 ans de prison ferme requis à l’encontre de chacun), ils son poursuivis pour « participation au blanchiment d’argent dans le cadre d’une bande criminelle organisée à travers leurs rapports avec le groupe Mazouz (27 sociétés réelles et fictives).
Le procureur de la République a également requis des peines de 7 ans de prison ferme avec émission de mandats d’arrêt internationaux et d’une amende de 5 millions DA contre les Chabani Aissa, Oulmi Mourad, Bousmid Houssem Eddine et Kamel Mohamed pour infraction aux lois relatives au change.