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N’encourageons pas les voltigeurs et les caméléons à nous diviser !

Polémique Ferhat Mehenni/Arezki Aït Larbi

N’encourageons pas les voltigeurs et les caméléons à nous diviser !

L’appel à la constitution d’un corps de contrainte et de sécurité en Kabylie lancé par notre compagnon de lutte pacifique des années 1980 (M C B) a suscité divers prises de positions répondant à l’idéologie politique des uns et des autres. C’est ainsi qu’Arezki Ait Larbi s’exprima sur ce sujet dans un article intitulé ‘’Ne pas céder à la peur ! Protéger nos libertés ! Réhabiliter le débat pluriel, paru dans le journal «El Watan » du 11 juin 2018, Le Matin d’Algérie et de Ferhat Mehenni qui lui répond via la même voie le 19 Juin 2018 en reprenant l’intitulé de sa déclaration.

S’il est vrai que, de connaissance, les militants d’hier n’ont jamais eu la prétention d’être des anciens moudjahidines, ou d’être d’ardents 1er défenseurs de la cause amazigh, aujourd’hui ils n’ont pas la même conception de lutte même si certains justifient la leur par ce qu’endure toujours la Kabylie en matière de répression à visages multiples (politique, sociale et sociétale, industrielle et économique, etc…) à l’exemple des exactions du 20 Avril 1980, de l’assassinat de 128 personnes, des handicapées à vie et des dizaines de blessés commis par l’état lors du printemps noir du 14 juin 2001, le terrorisme islamique et l’insécurité, le Stade de Tizi Ouzou toujours en construction depuis plus de 20 ans environ alors que d’autres édifices d’envergure et  onéreux sont ou seront livrés après quelques années des travaux seulement, projet Cevital bloqué depuis plus de 460 jours au port de Béjaia et de façon générale c’est toute la chaîne de développement de la région qui fait défaut.

De pareils échanges par médias interposés créent une polémique entre deux compagnons d’hier dont l’un poursuit pacifiquement son engagement et l’autres envisagent d’autres options pour faire bouger les lignes, même si elles ne figurent pas dans notre dictionnaire, au risque d’ajouter de l’eau au moulin de certains et de ceux qui piaffes en intra et en extra-muros ainsi qu’à ceux qui sont aux affaires sous diverses formes étatiques et citoyennes.

Avons-nous besoin d’une telle polémique entre compagnons d’hier qui semblent demeurer  toujours amis ?

Par cette sortie on a l’impression de revivre la fratricide qui poussa l’authentique Mouvement culturel berbère (MCB-1980) à se scinder, au lendemain de l’ouverture politique, (1989) en trois tendances idéologiques qui se rejettent les responsabilités et qui s’attaquent par médias interposés. Pendant ce temps, comme souhaité, d’autres forces occultes se frottent les mains et se félicitent de cet état de fait qui arrange les pyromanes pour déstabiliser la Kabylie et la détourner des fondamentaux.

Qu’est-ce que la Kabylie ? Ce n’est qu’une région parmi les autres d’une même terre  appelée Algérie. Orgueilleuse et gênante, dérangeante, fière de son caractère de bastion démocratique et républicain, de son identité amazighe dans toutes ses dimensions qu’elle partage avec tout l’espace algérien, tournée vers l’universalité, avance et refuse tout greffage, qui se sent pleinement algérienne dans sa pluralité sans prédominance aucune et sans a-priori via de motifs fallacieux et tendancieux. Cette conception ne convient pas et n’est pas admise par tous manifestement.

Certes, à chaque fois que la vox populi avance des rumeurs de mésententes majeures quelque part, les habitués de l’ombre et les voltigeurs sont actionnés en direction de cette région via des leurres (Coran brûlé, atteinte à la religion, partition, etc..) utilisés lors des manifestations pacifiques du 20 avril 1980 afin de la braquer et détourner l’attention de la population algérienne de ses véritables problèmes qu’elle vit et endure au quotidien par le fait d’une gouvernance autiste, populiste, mal pensante et absente.

Cette partie du territoire national ne souffre-t-elle pas depuis la colonisation ottomane (Turquie) à ce jour en passant par 1963 à 2001 ? Quand connaîtra-t-elle la paix réelle, le développement social, économique et industriel, la fin des exactions multiples  et multiformes qu’elle ne cesse de subir ? Les divers crimes politiques et assassinats commis contre ses plus dignes enfants connaîtront-ils un jour leurs résolution et leurs auteurs finiront-ils par être déférés devant une instance judiciaire ?

Ferhat Mehenni, fils de chahid, militant pacifique des années 1980 pour le recouvrement de l’identité, langue et culture amazighes ainsi que pour les libertés démocratiques, connu sous le pseudonyme de «Imazighen Imula» en tant que chanteur engagé, n’est ni ange, ni démon, ni aliéné; il n’est pas non plus le “traître, le renégat” ou le “mercenaire”, diabolisé par les pourfendeurs qui appellent à sa lapidation, il est simplement un militant érudit des causes justes que sont tamazight et les libertés démocratiques.

Bien que réfractaire à l’autorité de l’Etat qui la brime, bride sa liberté, fait traîner les rares projets de développement, la dépeuple sournoisement, la Kabylie n’est ni la Syrie, ni l’Irak, ni la Libye sœur déstructurée et désarticulée ou autres, elle est Algérie.

Elle n’est pas non plus celle pensée idéologiquement et politiquement par certains depuis l’avènement de l’indépendance; elle n’est naturellement qu’une région parmi les autres, mais appréhendée à cause de ce qu’elle est, de son caractère libre, démocratique et unioniste dans sa pluralité sans prédominance aucune dans tous ses segments que ses enfants, tels que Ferhat Mehenni, Arezki Ait Larbi et tant d’autres, défendent depuis les années 1980 avec certains autres Algériens qui ont la même conception de l’Algérie future.

Il est à espérer que l’appel de notre compagnon de lutte et ami de toujours n’a été qu’un verbe dépassant la pensée. Avoir d’autres options, c’est ce qu’espère une certaine idéologie destructrice de l’Algérie en générale et de la Kabylie en particulier. C’est encourager les voltigeurs et les caméléons, c’est donner raison au président de la cour d’Oran qui avait dit «Kabyles, l’Algérie n’est pas votre pays», à la xénophobe députée islamiste qui avait menacé de tuer son fils s’il apprend tamazight et au palestinien, résident à Ain El  Hammam, (Tizi Ouzou), qui avait interdit à son fils d’étudier tamazight et de parler kabyle, c’est reconnaître aussi la non amazighité des autres régions algériennes.

Quant aux sirènes, telles que Bernard Henri Lévy (BHL), homme de main connu pour ses basses besognes, ses prouesses ténébreuses et manipulatrices, qui se déclare ami des Kabyles, Eric Zemmour qui se découvre subitement d’origine Berbère et Mélenchon qui, lors de sa campagne électorale française, avait dit : « Nous avons besoins des Berbères d’Afrique du Nord », quels sens et crédit en donner à ces approches ? E t que comprendre de ce verbiage à l’approche de la prochaine joute présidentielle de 2019 ?

Ces sorties sont-elles assimilables à des manœuvres politiciennes, ne sont-elles pas douteuses quant à leur sincérité ? Est-ce une tentative déstabilisatrice, qui ne dit pas son nom, et l’espoir de rééditer en Algérie ce que vivent certains pays du fait d’une partie de leur continent et d’ailleurs ?

En tout état de cause, rien ne justifie une telle polémique saisie au vol par les détracteurs qui s’en réjouissent, s’en félicitent et applaudissent. Ne servons pas de prétexte, surtout entre nous, compagnons d’hier, médiatisés ou non, même si nos idées divergent aujourd’hui.

A l’exemple de Mahatma Gandhi (Inde), l’option pacifique a été une arme redoutable et fatale contre le colonisateur anglais et les adeptes de l’unicité. L’algérianité est un fait indéniable et réel que toute personne sensée n’ignore sauf s’il est frappé de cécité et d’autisme. Tamazight et l’arabe algérien en sont ses fondements cardinaux de consolidation de l’unité nationale dans les faits, non flanqués d’adverbes, sans noircir littéralement les pages blanches, sans conservatisme et imposition idéologique, sans orientation politique d’un autre âge au parlement (l’APN et Sénat) et autres facteurs portant atteinte à l’unité nationale dans sa diversité par des votes de lois scélérates, réductrices et dépendantes qui font de tamazight une sous langue qui, même dans ce cas, est optionnelle et éparse là où elle est enseignée selon les parlers régionaux à l’intérieur même de chacun des 12 pays amazighophones (Berbérophones).

M. A. M.

Sources d’informations : médias nationaux

Auteur
Madjid Aït Mohamed

 




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