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« Partir repartir », premier album d’Idir Tas

Idir Tas
Idir Tas

Composé de 12 chansons, 7 en kabyle et 5 en français, ce premier album d’Idir Tas contient des thématiques variées comme l’amour fusionnel ou impossible, l’enfance, la famille ou les lieux aimés. Inspiré par les musiques kabyles et arabo-andalouses de sa jeunesse, Idir Tas, auteur-compositeur-interprète, s’accompagne de sa guitare pour nous faire parcourir les chemins du monde, en quête d’idéaux et de rêves, où la terre semble meilleure et pacifiée, même si parfois elle peut se teinter de nostalgie, de solitude ou de souffrance.

La première chanson éponyme, “Anuḥ anruḥ (Partir repartir)” évoque Béjaïa, Sidi-Aïch et Akfadou, berceau des ancêtres d’Idir, où il a vécu de deux à douze ans. Elle parle en vérité des mille et un voyages de tout à chacun, de ces allers et venues qui nous entraînent sans cesse dans un éternel mouvement vers de nouvelles espérances. « En le voyant l’âme va renaître », chante Idir à propos du pays de son enfance.

La seconde chanson, “S’aar armi ḍḍ Tunes (À pied jusqu’à Tunis)”, se compose de cinq isfra (poèmes) du célèbre poète kabyle du 19e siècle, Si Mohand. Elle raconte son premier voyage à pied de son village natal, Larabԑa n’A Iraen, jusqu’à Tunis. Idir avoue que ce fut un véritable plaisir de mettre en musique et de chanter ces véritables joyaux de l’odyssée du poète.

La troisième chanson, “Enfant je voulais”, fait revivre un rêve d’enfant ; celui d’aller voir les Amérindiens, ceux qui côtoyaient les bisons, ceux qui perpétuaient la danse du feu, ceux qui vivaient au milieu d’une nature extraordinaire, ceux qui fumaient le calumet de la Paix, ceux qui étaient les “frères d’imagination” de l’auteur : « Enfant je voulais / Aller voir les Indiens / Au pays du Grand Canyon / Entendre les mille sabots / Des bisons dans les prairies / Enfant je voulais / Aller voir la danse de feu / Des pierres séculaires / Caresser l’aile de leurs dos / Galoper en ombre bleue ».

La quatrième chanson“Ṭamaγra (La fête)” parle de la cérémonie du henné lors d’un mariage en Kabylie, à l’époque où le cheval a cédé sa place à la voiture pour aller chercher la mariée chez elle. « Tends ta main , chante Idir/ Tends ta main, marié / Pour qu’on la badigeonne de henné / Aujourd’hui c’est la fête / La maison est tout en émoi / Aujourd’hui c’est la fête / Le village est tout en liesse ».

La cinquième chanson, Anacnu (Chantons), célèbre les gens humbles, la beauté de leurs gestes ancestraux et leur sens de la solidarité et de la fraternité. C’est aussi une invocation à Dieu pour qu’il nous donne la force et la confiance nécessaires pour accomplir nos tâches quotidiennes. Idir se souvient bien de ses grands-parents maternels : « Chantons sur hier / Sur ceux qui fauchent le blé / Sur Drifa qui veille sur Lili / Sur Boudjemaâ qui aiguise ses outils ».

La chanson Margueritea été écrite pour rendre hommage à la plus charmante des grands-mères. « Ce n’était pas la mienne, confie Idir, mais elle le devint, car elle avait un cœur si grand qu’il pouvait aimer même un voyageur venu de loin. […] À travers cette chanson j’ai fait revivre des instants simples et complices que j’ai partagés avec elle et que j’aimerais vous offrir ».

Intitulée “Aslam”, signifiant “Un salut”, la septième chanson « n’est pas un adieu, précise Idir, mais une célébration d’hommes et de femmes d’Akfadou qui me sont chers. J’aimerais que leur lumière vous touche autant que moi et vous faire partager en quelques secondes la noblesse de leur vie qui se devine à travers leur portrait ». « Adressons un salut à tous , nous invite Idir/ à l’enfant et à l’adulte / Demain si vous le voulez bien / Nous reviendrons parmi vous ».

“Le Chemin des Oliviers”, huitième chanson de l’album, nous fait partager un amour platonique et les émois d’un cœur timide qui n’ose pas déclarer sa flamme. C’est d’abord par la voix qu’il est séduit : « Le jour où tu chantais / Parmi les autres femmes / Ce ne fut que ta voix / La tienne que j’entendis / Ta voix venue des cieux / Passait sur le chemin / Le Chemin des Oliviers / Tout à coup je fus perdu ». Et comme le dit si bien Idir, “il y a toujours dans nos mémoires un amour qui cherche à renaître, une première fois qui nous a fait croire que nous étions en train d’inventer l’amour”.

La neuvième chanson Yeli (ma fille), dont les paroles sont tirées du folklore kabyle, met en scène un père et sa fille et fait ressortir l’affection de l’aîné pour son enfant à qui il dispense des conseils de vie tant pour s’armer de patience que pour garder sa candeur. Le père dit notamment : « Ma fille, je t’ai pourvue d’une prairie / Si tu vois tomber la pluie, attends / Attends que passe l’inondation / […]Pour tout être à qui apparaît la lumière / C’est grâce à sa peine qu’il la mérite ».

Dans la dixième chanson, Idir célèbre Venise où il rêve d’aller. Tout en disant ce qu’il ne verra pas, il inscrit les pas d’un voyage fantasmé dans la Sérénessime : « Comme tout à chacun, j’ai éprouvé le désir de la visiter. Hélas, si je l’ai souvent parcourue en rêve, je n’ai pu l’admirer dans sa réalité. Ma chanson “Venise” est pour moi une manière de me rendre dans cette ville mythique ».

La onzième chanson Muḥend (Mohand)” invite à célébrer la paix et à se souvenir de tout ce que les femmes et les hommes ont enduré pour retrouver leur liberté. Elle rend hommage en particulier à un membre de la famille du chanteur tombé au champ d’honneur en 1961. « Pourquoi, chante Idir, Mohand est-il tombé au maquis ? Dites-moi pour quelle raison ? Pour qu’aujourd’hui nous nous rassasiions de paix ».

Mon doux amour” qui clôt cet album est un texte à deux voix qui donne la force d’affronter la séparation amoureuse. Lorsque l’Aimé se plaint de ne plus pouvoir respirer en l’absence de celle qu’il aime, celle-ci le réconforte par ces mots simples : « Je voudrais que tu n’oublies jamais que je suis là, que je suis toujours avec toi, même si je m’absente. » Cette chanson exprime aussi le pouvoir de tous les amants de fusionner ici-bas et peut-être jusque dans l’éternité. « Reste avec moi jusqu’à la fin de l’éternité, mon doux amour », implore l’Amant. Et l’Amante de lui répondre : « Du soleil nous tenons notre serment comme deux pharaons qui regardent passer en silence l’éternité ».

“Partir repartir” est un album plein d’espérance qui nous offre des voyages réels ou imaginaires, auprès de ceux que l’on aime ou que l’on voudrait aimer.

Tahar Khalfoune

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