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Pascaline Ernault : « Cette mise à nu de mon intimité reste difficile à assumer »

Pascaline Ernault

Pascaline Ernault

Avec Journal d’une schizo (sur les pas d’un ange trouble), publié le 16 septembre 2025 chez Edilivre – Aparis, Pascaline Ernault signe un récit autobiographique où se mêlent intimité, poésie et réflexion sociale. À travers ses mots, elle raconte son parcours, ses séjours en hôpital psychiatrique, ses amours, ses émotions — tout en rendant hommage à Serge, son grand amour disparu.

Entre confession intime et geste artistique, son livre interroge la fragilité humaine, la résilience et la manière dont l’écriture peut devenir un refuge face aux blessures de l’existence. C’est aussi un appel à la compréhension et à l’empathie envers ceux qui vivent avec un trouble psychique.

Le Matin d’Algérie : Votre livre s’intitule Journal d’une schizo. Pourquoi ce choix frontal, qui interpelle dès la couverture ?

Pascaline Ernault : Mon ouvrage s’intitule Journal d’une schizo (sur les pas d’un ange trouble). Cela peut effectivement paraître audacieux, mais j’ai voulu inventer ce titre afin de toucher le public et de démystifier le trouble schizo-affectif. Quant à la couverture, elle a été conçue à partir d’une sculpture sur toile que j’ai réalisée moi-même.

Le Matin d’Algérie : Dans quelle mesure ce récit est-il autobiographique, et qu’avez-vous choisi de dévoiler ou de taire ?

Pascaline Ernault : Je n’ai pratiquement rien occulté de ma vie, sauf pour préserver certaines personnes qui se seraient reconnues à travers de petites maladresses de leur part. J’ai choisi de raconter les faits marquants, les anecdotes les plus originales, mais aussi les moments simples et heureux.

Le Matin d’Algérie : Vous alternez entre le récit brut de vos expériences et une écriture poétique, presque lyrique. Est-ce une manière de tenir à distance la douleur ?

Pascaline Ernault : J’alterne prose et poésie parce que la poésie est ma véritable construction littéraire. J’en écris depuis l’âge de quinze ans.

Le Matin d’Algérie : Votre enfance, vos proches, vos amitiés, vos amours… Tout est présent. Comment vos lecteurs réagissent-ils à cette sincérité parfois désarmante ?

Pascaline Ernault : Mes lecteurs reçoivent mes récits avec émotion, certains plus positivement que d’autres.

Le Matin d’Algérie : Vous parlez sans détour de vos séjours en hôpital psychiatrique. Pensez-vous que la littérature puisse aider à lever les tabous autour de la maladie mentale ?

Pascaline Ernault : J’espère, à travers mes séjours en psychiatrie, contribuer à lever les tabous et l’ignorance entourant ce type de vécu. Un schizophrène est souvent jugé sur ses faux pas, alors qu’il est, dans la plupart des cas, attachant, hypersensible, parfois suicidaire, mais rarement dangereux pour autrui.

Le Matin d’Algérie : La figure de Serge, votre grand amour, traverse le livre comme une ombre lumineuse. Qu’avez-vous voulu lui dire ou lui rendre à travers ces pages ?

Pascaline Ernault : Serge croyait en mon talent. J’ai voulu lui rendre hommage. J’ai l’intime conviction qu’il est fier de cette publication et qu’il veille sur moi depuis le ciel.

Le Matin d’Algérie : On a l’impression que le temps est à la fois votre ennemi et votre allié. Comment vivez-vous ce rapport au temps, entre blessures et guérison ?

Pascaline Ernault : Je pense que le temps peut mûrir sans vieillir, d’où le mot “intemporel”. Je peux avancer grâce à un traitement médicamenteux qui m’apporte une certaine stabilité, mais on ne peut éviter les épreuves. Le temps devient alors, tour à tour, ami et ennemi de passage.

Le Matin d’Algérie : Dans votre livre, on lit aussi une critique de la société, de ses hypocrisies et de ses indifférences. Est-ce une dimension volontairement militante ?

Pascaline Ernault : Oui, mes écrits s’engagent contre l’intolérance. Les gens devraient être aussi exigeants envers eux-mêmes qu’envers les autres. Il faut apprendre à se pardonner, à s’aimer soi-même pour mieux comprendre le monde qui nous entoure.

Le Matin d’Algérie : Écrire un tel récit, c’est forcément une mise à nu. Avez-vous hésité avant de le publier ?

Pascaline Ernault : Cette mise à nu de mon intimité reste difficile à assumer, surtout pour une publication à laquelle je ne croyais plus.

Le Matin d’Algérie : Quels retours de lecteurs vous ont le plus marquée depuis la sortie du livre ?

Pascaline Ernault : Les retours m’ont profondément touchée, notamment les encouragements et les témoignages de soutien.

Le Matin d’Algérie : Diriez-vous que l’écriture a joué pour vous un rôle thérapeutique ou que c’est avant tout un geste littéraire ?

Pascaline Ernault : Bien sûr, écrire sur cette pathologie a une dimension thérapeutique. Mais pour moi, l’écriture libératrice reste avant tout une passion.

Le Matin d’Algérie : Quels sont vos projets après Journal d’une schizo ? Souhaitez-vous poursuivre dans cette veine autobiographique ou explorer d’autres horizons ?

Pascaline Ernault : Il n’y aura pas de suite autobiographique, car je veux que cet ouvrage reste un hommage définitif à Serge. J’aimerais continuer à écrire, toujours dans un univers textuel sombre, mais nourri par la sincérité.

Propos recueillis par Djamal Guettala

Journal d’une schizo (sur les pas d’un ange trouble), Pascaline Ernault, Edilivre – Aparis, 2025.

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