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Patrimoine de l’Algérie à l’étranger et la crise qui s’exacerbe !

TRIBUNE

Patrimoine de l’Algérie à l’étranger et la crise qui s’exacerbe !

Le Château des Julhans (sud de la France, bâti en 1639) est la propriété de l’Etat algérien. Il y abrita les amours de Bonaparte.

Au lendemain de la chute drastique du prix du baril de pétrole sur le marché international, sous le double effet du ralentissement de l’économie mondiale, comme conséquence de la propagation du coronavirus et de la décision unilatérale prise par certains pays membres de l’OPEP de vendre leur production de brut avec des rabais particulièrement agressifs, le président de la République, Abdelmadjid Tebboune a instruit les membres du gouvernement pour prendre toutes les dispositions qui s’imposent. 

Entre autres mesures, le Gouverneur de la Banque centrale a été instruit sous l’autorité du Premier ministre et en consultation avec le ministre des Finances, de verser à la réserve légale en or toutes les saisies douanières ainsi que le Fond de solidarité nationale qui étaient gelés depuis plusieurs décennies à des niveaux qui ne leur permettaient pas de servir de garantie.

Ceci pour dire que le pays a besoin de mobiliser toutes les ressources financières pour juguler les effets de cette conjoncture adverse sur l’économie nationale y compris les prêts accordés par les banques dans le cadre d’investissements privés.

D’aucuns prêchent pour le recours à la Bancarisation de l’argent de l’informel. Voire, le retour à l’emprunt obligataire pour renflouer les caisses de l’Etat qui s’amenuisent alors que la crise économique doublée d’une crise sanitaire s’exacerbe !  

Toutefois, d’autres niches financières peuvent être ciblées ; il s’agit de tous les biens à l’étranger dont l’exploitation ne profitait ni à la diaspora algérienne ni au Trésor public ; ils étaient parfois même laissés à l’abandon !

Selon ce qui a été rapporté par le quotidien d’El Watan, il s’agirait de résidences luxueuses, de châteaux, de bâtiments, d’hôtels, de commerces, d’exploitations agricoles, acquis par le FLN, sous des noms d’emprunt et de particuliers, pour le compte de la Révolution mais aussi d’actions dans des sociétés financières et commerciales, dont la gestion s’avère aussi problématique que coûteuse.

Ce patrimoine ne se trouve pas uniquement en France, mais également en Suisse, en Tunisie, en Arabie Saoudite et même en Libye et au Mali, pour ne citer que ces pays.

D’autres biens ont été acquis en Allemagne, mais surtout en Suisse, qui était la base arrière du FLN pendant la Guerre de Libération, et le lieu de dépôt de son trésor. 

Le patrimoine de l’Algérie en France serait bien plus important qu’on peut le croire, d’autant plus qu’il n’est pas totalement répertorié. Mais indéniablement, les plus importants biens de l’Etat se trouvent sur le territoire français. 

Un patrimoine assez important dont l’exploitation ne profite malheureusement pas au Trésor public. Selon des sources diplomatiques, «bon nombre de ces noms d’emprunt ont disparu. Ce qui a été récupéré reste néanmoins important, mais ne génère pas de revenus à la hauteur de sa valeur ».

Durant son deuxième mandat, Bouteflika, après avoir été saisi sur les convoitises de certains dignitaires qui voulaient mettre la main sur des résidences de maître à Paris, a chargé l’IGF (Inspection générale des finances) de mener une enquête sur les biens de l’Etat à l’étranger, surtout en France, qui aurait révélé des « pratiques illégales qui auraient permis à des pontes du système d’accaparer certaines résidences d’Etat, hôtels et appartements ». Bien évidemment, le rapport de l’IGF n’a pas été divulgué.

En 2009, une luxueuse résidence de 35 000 mètres carrées a été achetée par l’Algérie à Genève pour plus de 27 millions d’euros (30 millions de francs suisses).

Considérée à l’époque comme l’une des plus grosses ventes immobilières à Genève, cette acquisition a suscité de nombreuses interrogations et alimenté le débat sur la nécessité de se «débarrasser» de ces nombreux biens budgétivores que l’Algérie détient à l’étranger.

Aujourd’hui, alors que les revenus de l’Etat ont fondu comme neige au soleil, et que l’Algérie tout comme le monde entier d’ailleurs, fait face à l’une des plus grande crise économique, doublée d’une crise sanitaire sans précédent, certains n’hésitent pas à relancer le débat sur «la nécessité» d’y faire face en recourant justement à la vente de ces biens pour éviter au pays le recours à la planche à billets ou un endettement auprès du FMI ou de la Banque Mondiale, quand bien même le président Tebboune y est formellement opposé !

Même si les avis divergent sur cette question, il n’en demeure pas moins que l’Algérie possède un énorme patrimoine qui aurait pu constituer un important revenu pour le Trésor public s’il n’avait pas fait l’objet de prédation et de mauvaise gestion. 

Bien évidemment, des voix vont s’élever contre cette initiative et crier à l’hérésie. De quel droit l’Etat va-t-il vendre des biens communs, des bijoux de famille oseront dire certains ? Pourtant, beaucoup de pays et non des moindres y recourent pour renflouer leurs caisses :

  • l’Espagne à titre d’exemple, qui a procédé à la vente de quelque 15.135 biens publics et ce n’était pas la première fois !

  • la France qui, chaque année, cède une partie de son patrimoine public mais aussi militaire, ce qui lui permet d’engranger outre des bénéfices plus que substantiels, d’adapter son parc immobilier aux besoins (restructurations militaires, nouvelles carte sanitaire et judiciaire etc). A titre indicatif, les cessions ont permis de rapporter près de 574M € à l’Etat ; un chiffre globalement stable depuis 10 ans. 

L’Etat, les collectivités locales et les organismes divers dépendant des administrations centrales possèdent un patrimoine qui, en l’état, grève lourdement le budget parce qu’en partie, il est constitué d’actifs dormants « improductifs » et pour la plupart abandonnés par négligence et laxisme des responsables et/ou suite à un changement de leur destination initiale. 

Il s’agit, par exemple, d’écoles désaffectées, de services de santé abandonnés, de marchés inopérants et inaccessibles (dans la seule commune de Douéra, il a été recensé 5 infrastructures de ce type), de locaux destinés à l’emploi des jeunes en état de ruine avancée, de gares routières boudées par des usagers et les transporteurs, d’anciens sièges de la garde communale réalisés sur PCD et délaissés suite au redéploiement de ce corps… Et tant d’autres biens de valeur qui grèvent lourdement le budget de l’Etat et qui pourraient être identifiés après enquête.

Bref, toute une «niche financière»  qui ne demande qu’à être transformée en recettes bénéfiques en ces temps de crise !

L’évaluation de tous ces biens patrimoniaux n’est pas, à notre sens, problématique. 

Les walis, les ministères et les organismes concernés, accompagnés par les services domaniaux compétents, s’ils venaient à être instruits, pourraient :

Dans un premier temps, en établir la « cartographie » et le « recensement ». 

Ensuite, définir la propriété, en s’appuyant, impérativement, sur un critère absolu, l’”inutilité” des immeubles concernés. 

Enfin et avec la remontée des informations et leur consolidation, l’on aura, déjà :

  1. un aperçu sur leur « estimation quantitative et qualitative » en termes de valeur vénale et leur superficie.

  2. une idée de ce que tout ce « trésor dormant » peut rapporter, éventuellement, à l’Etat s’il venait à être aliéné et cédé

  3.  les montants ainsi collectés qui seront injectés pour réduire le déficit public.

  4. une partie des recettes qui sera prélevée pour réhabiliter des bâtiments publics, en acheter ou en construire d’autres.

  5.  le niveau des « économies » qui seront réalisées :

  • en termes d’entretien, d’énergies 

  • et même de postes de travail, sachant que les gardiens desdits biens, par exemple,  pourraient être redéployés voire même imposés aux « repreneurs » par des clauses particulières.

A défaut, tous ces biens patrimoniaux, continueront à se dégrader inexorablement, tout en grevant lourdement le budget de l’Etat. En somme, des « biens Habous » qui ne disent pas leur nom ! 

Est-ce bien raisonnable en ces temps de crise ? Pour l’heure, le gouvernement Djerad est acculé, il doit trancher car il se trouve dans une situation financière critique qui ne lui laisse aucune marge : et tant pis pour les bijoux de famille. A ceux, enfin, qui viendraient à critiquer « la vente d’une partie du patrimoine immobilier de l’Etat » on les renvoie à l’exemple d’une entreprise qui se trouve en difficulté profonde et qui n’a d’autre choix que de réaliser certains de ses actifs, notamment immobiliers, afin de préserver son cœur de métier et poursuivre son redressement. 

N’est-il pas préférable pour elle d’alléger ses charges en matière de gardiennage, d’entretien, d’énergies, d’assurances et dans la foulée, bénéficier d’argent frais pour sa relance ? Cela relève du bon sens ! 

Pour conclure, rappelons cette instruction d’«interdiction d’exportation de tout produit stratégique» en ce temps de lutte contre le Covid19 formulée par le président de la République dans son discours à la Nation, qui résonne comme une volonté ferme d’aller vers le « patriotisme économique ». 

En clair, et c’est un des enseignements à tirer de la pandémie du coronavirus, l’Algérie ne doit compter, désormais, que sur ses potentialités !

     

Auteur
Cherif Ali

 




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