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Pourquoi le Consulat d’Espagne à Oran refuse un visa à un enseignant-écrivain ?  

Tribune

Pourquoi le Consulat d’Espagne à Oran refuse un visa à un enseignant-écrivain ?  

Tawfiq Belfadel, écrivain-chroniqueur.

Je n’aime pas écrire des textes autobiographiques. Je suis habitué à extirper ma rage et peindre mes joies  en me cachant derrière le voile des mots. Mais cette fois, je l’ai fait parce que le sujet est grave. J’ai vécu  une situation qui m’a indigné et fait rire à la fois. Le Consulat d’Espagne à Oran m’a refusé récemment un visa de court séjour.  Référence de ma demande : ORN11204180080

Voici les faits :

J’ai déposé ma demande auprès du prestataire BLS d’Oran le 12-04-2018. Motif : visa de court séjour touristique. J’ai deux professions : professeur de français au collège et écrivain de langue française.

J’ai déposé un dossier authentique et complet dont les pièces suivantes :

  • Attestation de travail

  • Derniers bulletins  de paie

  • Assurance de voyage de 90 jours

  • Réservation d’hôtel confirmée

  • Attestation de titulaire de carte visa Gold contenant 2607 euros

  • Relevé de compte bancaire dinars  suffisamment alimenté

  • Copie des contrats de mes livres

  • Document justificatif de l’ONDA (Office National des Droits d’Auteur)

  • Et d’autres documents : photos, photocopie du passeport, affiliation de CNAS, reçus des opérations bancaires…

Dans la notification de refus, le Consulat m’a justifié sa réponse négative par les motifs suivants :

  • Le motif 3 qui  stipule : « il n’a pas apporté la preuve qu’il dispose de moyens de subsistance suffisants… »

  • Le motif 8  qui stipule : « les informations présentées pour justifier le but et les conditions du séjour prévu ne sont pas fiables. »

En comparant les motifs avec mon dossier, la contradiction est flagrante. Dire que je n’ai pas de ressources suffisantes alors que je suis professeur, écrivain, titulaire en plus d’une carte Visa Gold contenant 2607 euros. Dire que  les informations justifiant les conditions du séjour ne sont pas fiables, alors que j’ai déposé une assurance de voyage valable et une réservation d’hôtel confirmée.

Certes, déposer un dossier complet n’entraîne pas un droit irréversible au visa. Mais pourquoi et comment refuser un visa à un professeur-écrivain et l’octroyer à d’autres demandeurs ayant des ressources largement inférieures aux miennes,  et dont certains vont sans retour ?! Selon quels critères le Consulat octroie le visa ?

En somme,  j’ai été fortement lésé par le service des visas du Consulat d’Espagne à Oran.  Refuser un visa à un intellectuel et lui justifier le refus par des motifs absurdes et contradictoires, est en effet un acte inacceptable et indignant.

Me vient à l’esprit  une phrase du philosophe Jean-Pierre Vernant auteur de « La Traversée des frontières » (Seuil) : «  Entre les rives du même et  de l’autre, l’homme est un pont ». Je me permets de le paraphraser en disant : « Entre les rives du même et l’autre, le visa Schengen est un mur ». Un mur parce que  sa délivrance est un système plein d’ambiguïtés et de contradictions. Un mur parce qu’au lieu de faciliter la libre circulation comme le stipule la Déclaration des droits de l’homme, il abat les ponts…

Enfin, j’ai écrit ce texte après maintes hésitations. Je ne suis pas de ces gens que j’ai vus à Oran en train de pleurnicher et sangloter pour un refus de visa. Non. J’ai écrit ce texte pour dénoncer cet acte révoltant que d’autres Algériens ont vécu mais n’ont pas pu ou su décrire.  Alors, comme disaient Patrick Chamoiseau et Edouard Glissant, « quand les murs tombent » ?

T. B.

« N.B: La durée de mon  séjour prévu était 10 jours seulement.  On peut effectuer une assurance de voyage supérieure à la durée de séjour vu qu’elle est modifiable et remboursable » 

Auteur
Tawfiq Belfadel, écrivain-chroniqueur

 




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