Mercredi 4 octobre 2017
Pourquoi Ouyahia réchauffe-t-il les anciennes recettes qui divisent la société ?
Est-ce vraiment le moment opportun pour sortir encore une fois le dossier du gaz de schiste qui a fait couler tant d’encre il n’y a pas si longtemps et que la population du sud croyait définitivement clos sur instruction du président de la république en personne ?
La pagaille et la cacophonie qui vont suivre vont-elles régler le déficit budgétaire qui est pour le moment le problème n°01 du gouvernement ? A quoi bon donc mettre sur la table du débat des sujets qui fâchent lorsqu’ils n’ont aucun effet sur le court, le moyen et spécialement le très long terme pour cette ressource non conventionnelle ? Il faut signaler par ailleurs que pour le moment, les investisseurs ne fuient pas le code pétrolier d’un pays et l’Algérie ne fait pas exception, mais ce sont les prix du baril bas qui les dissuadent. C’est une situation qui n’est pas propre à l’Algérie mais touche le monde pétrolier et gazier.
Pour le cas spécifique de l’Algérie si les appels d’offres restent infructueux, ce n’est certainement pas la faute du code pétrolier ni dans sa partie juridique et encore moins dans sa fiscalité. Le problème réside dans l’absence d’une stratégie énergétique de l’Algérie. Les différents amendements apportés aux diverses lois pétrolières depuis l’abolition du Code Pétrolier Saharien (CPS) de 1958 n’ont fait que tripoter les textes au gré des circonstances mais ne visaient aucun objectif stratégique. La preuve ? Le premier responsable du secteur de l’énergie a emboîté le pas à son Premier ministre pour tenter de justifier les amendements prévus pour la loi de 2013 par la baisse du prix du baril. On ne peut plus soutient-il appliquer une réglementation d’un prix de 150 $ à celle qui se situe à 50 dollars.
Or, lorsque les prix frôlaient les 160 $ le baril, la loi de 1986 n’avait pas prévu un tel scénario pour obliger les pouvoirs publics à instaurer une Taxe sur les Profits Exceptionnels (TPE) qui les a menés droit à un conflit avec ses partenaires pour perdre rien que ce qui est notoirement connu près de 5,9 milliards avec Anadarko.
La pression faite par Total pour suivre le chemin de sa consœur américaine a contraint Sonatrach à lui faire plusieurs concessions prioritaires sur injonction politique. Les dirigeants des entreprises, notamment françaises ont compris depuis la mort de Boumediene que le management de Sonatrach n’est qu’une équipe de super-secrétaires qui obéissent aux ordres des politiques. Pour cela, durant les années 2015-2017, les responsables français ont fait plus de visites en Algérie que dans leurs propres métropoles sans compter les supers conciliateurs comme les Jean-Pierre Raffarin et Jean-Pierre Chevènement. A partir donc d’un diagnostic erroné, on aboutira forcément à un amendement de même nature. Quels sont les acteurs, partie prenante dans un code pétrolier ? Quels en sont leur objectifs ?
Des acteurs et leurs objectifs
Il y a d’abord les pays producteurs représentés pour la plupart par leurs compagnies nationales dites dans le jargon pétroliers NOC (National Oil Compagnie) ; leurs objectifs principaux tournent autour de la valorisation de leurs ressources naturelles, tirer des fruits de la rente par la vente des hydrocarbures et surtout utiliser tout cela pour assurer le développement durable de leurs pays. Il faut signaler par ailleurs que la plupart des pays producteurs y compris les plus pauvres comme le Nigeria en passant par les pays du Golfe ont compris qu’ils doivent suivre ces objectifs, d’une part, penser à la diversification de leurs économies et d’autre part s’approcher d’un mode de gouvernance d’une vraie économie réelle.
L’Algérie et le Venezuela continuent de dévier de cette ligne pour faire de l’accalmie sociale leur principale cible d’où le gaspillage et la débâcle périodique à chaque fois que le prix du baril baisse.
Pourquoi évoquer aujourd’hui l’exploitation du gaz de schiste en Algérie est tordant
L’Algérie dispose d’un domaine minier formé de roches sédimentaires susceptibles de renfermer des pièges pétroliers et gaziers et qui s’étend sur plus 1,6 million de km² dont à peine 4%, soit environ 64 000 km² en exploitation. Le reste est prospecté à hauteur de 64% de la bouche même de l’ancien ministre de l’Energie dans une communication au Conseil des ministres en décembre 2015. Si on fait les calculs, on aura à quelques kms près 751 754 km² de terrain libre pour explorer voire, parfois, exploiter les pièges conventionnels dans lesquels Sonatrach devrait avoir une certaine expertise et savoir-faire d’un demi siècle.
L’amendement de la loi des hydrocarbures de 2013 a permis l’exploration et l’exploitation du gaz de schiste mais tous les appels d’offres préparés par Alnaft ont été infructueux. Pourquoi ? Pour une simple raison que son exploration et exploitation au prix du baril actuel est non rentable parce qu’elle ne permet pas de rémunérer une mise risquée consentie par l’investisseur dont l’objectif est d’abord financier. Le troisième acteur qu’une loi pétrolière doit prendre en considération ce sont les sociétés parapétrolières dont l’objectif est le développement des expertises pétrolières pour uniquement faire du profit.
Le mode d’extraction du gaz et du pétrole de schiste est leur dada. Les Etats-Unis ont évalué le potentiel en gaz de schiste à près de 20 000 milliards de m3, c’est plus 240 ans au rythme actuel de production en Algérie. Sonatrach l’a-t-elle confirmé ? Pas encore mais de nombreuses sociétés parapétrolières comme des filiales de Total, Schlumberger et Halliburton qui excellent dans ce domaine l’incite à le faire pour se targuer un plan de charge et pomper les devises pour un résultat connu d’avance. Des rumeurs persistantes de l’intérieur comme de l’extérieur, à commencer par le quotidien français Le Monde, laissent entendre que si effectivement les puits de cette ressource non conventionnel ont été fermés à In Salah, la recherche dans ce domaine n’a jamais cessé du côté de Reagan. Tout cela pour dire qu’on n’est pas sorti de l’auberge.
R. R.