Alors que les relations entre l’Algérie et la France commençaient timidement à sortir de leur torpeur, un nouvel incident diplomatique risque de remettre les compteurs à zéro : compromettre les récents efforts de réchauffement amorcé suite à la visite du chef de la diplomatie française, à Alger, le 6 avril dernier.
Le ministère algérien des Affaires étrangères a convoqué, samedi 12 avril, l’ambassadeur de France en Algérie, M. Stéphane Romatet, pour lui faire part d’une vive protestation officielle. En cause : la mise en examen et la détention provisoire, en France, d’un agent consulaire algérien en poste à Créteil, soupçonné dans l’affaire de l’enlèvement de l’activiste Amir Boukhors, dit « Amir DZ ».
Dans un communiqué virulent, le ministère dénonce une atteinte grave aux immunités diplomatiques et dénonce une procédure « en flagrante contravention » avec les usages diplomatiques entre les deux pays. L’Algérie rejette catégoriquement les accusations portées par le parquet antiterroriste français, qu’elle qualifie de « farfelues » et basées sur des éléments jugés « fragiles », notamment le bornage du téléphone de son agent à proximité du domicile de la personne concernée. Les mots sont durs, comminatoire et l’activiste est traité par le ministère des Affaires étrangères de « voyou ». Ce communiqué ne prend nullement les formes puisqu’il remet en cause l’indépendance de l’institution judiciaire en France.
Cette réaction intervient quelques jours seulement après les signes de reprise du dialogue entre Alger et Paris, marqués notamment par la récente visite à Alger du ministre français chargé de l’Europe et des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Cette visite avait laissé espérer une relance constructive, après plusieurs mois de tensions diplomatiques sur fond de contentieux mémoriels et de différends sécuritaires.
Mais cette affaire judiciaire inattendue pourrait relancer l’instabilité dans les rapports entre les deux pays. L’Algérie y voit une tentative de « torpillage » du processus de normalisation convenu entre les présidents Abdelmadjid Tebboune et Emmanuel Macron. Elle évoque aussi, sans détour, l’existence de « certaines parties françaises » peu enclines à faire avancer le dialogue, et dénonce une forme de « cynisme » dans le choix de l’activiste concerné et accusé par Alger d’activisme subversif.
Reste à savoir si cet épisode judiciaire aura des répercussions concrètes sur l’agenda bilatéral. Si Alger affirme qu’il n’entend pas laisser la situation « sans conséquences », aucune mesure de rétorsion immédiate n’a été annoncée à ce stade. Cependant, ce regain de tensions pourrait bien refroidir une dynamique à peine amorcée, dans une relation souvent marquée par l’ambivalence, la méfiance, et les malentendus historiques.
Samia Naït Iqbal