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Quand la justice est absente la rue gouverne les peuples et détrône les Makos

REGARD

Quand la justice est absente la rue gouverne les peuples et détrône les Makos

« En politique, rien n’arrive par hasard. Chaque fois qu’un évènement survient, on peut être certain qu’il avait été prévu pour se dérouler ainsi. » Extrait d’un discours de Franklin D. Roosevelt .

Du héros de la révolution au héros du film. Le mensonge se faufile entre le film et la réalité. La confusion s’installe chez les gamins et c’est ainsi que l’histoire se corrompe ! Notre histoire est jalonnée de victoires, de triomphes et de succès. Ne donnons pas la chance aux fils de tirailleurs ou aux cousins des zouaves de la falsifier.

Quand j’étais petit ma mère me disait que la liberté était le passe-partout dans la vie. Elle m’a appris comment dire la vérité quelles que soient ses circonstances. Pour ma mère, l’homme qui ment n’est pas libre. Elle considère que la vérité est synonyme de liberté. Souvent, elle me rappelait l’expression française « Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà ». Elle voulait graver dans mon esprit de gamin l’idée « ce qui est une vérité pour un peuple peut être une erreur pour d’autres ». Elle m’a conseillé de ne pas fréquenter les politiciens guignols. Avec le temps j’ai réalisé que dans son subconscient notre train de vie très austère n’avait pas besoin d’experts politiques sortant de la fameuse institution « Le vrai guignolet » des Champs-Élysées.

Elle était bien informée et savait que les guignols de cet établissement consommaient le guignolet préparé à base de guigne, petite cerise à longue queue, de couleur rouge ou noire et dont la chair est ferme et sucrée. Cette liqueur trop chère et pas très appréciée par nos imams ne pouvait pas rendre notre vie en rose. J’ai saisi la leçon de morale de ma mère et j’ai vite compris que ces guignols sont venus chez nous avec leur guigne pendue à l’oreille pour alléger nos mœurs. Parfois ils nous classaient comme des musulmans français de quatrième choix et souvent ils nous appelaient les bicots ou tout simplement les indigènes de dernière classe.

A l’école les choses se disaient différemment. Bien que je fusse dans une école réservée aux « Arabes » je n’ai pas échappé aux idioties intellectuelles. Mes ancêtres s’appelaient les Gaulois et l’Algérie était une grande parcelle de terre réservée pour les enfants de notre mère la France. Dans mon esprit algérien, le portrait du guerrier téméraire Cheikh Bouamama cachait l’image de Bayard le chevalier sans peur et sans reproche.

Je me rappelle le jour où le maître d’école m’a demandé d’écrire sur une demi-feuille ce que je désirais être plus tard. J’ai répondu innocemment : « je veux être libre et vivre dignement dans les bras de ma mère l’Algérie ». C’était la vérité dans ce temps. Mon maître, monsieur Français, m’a dit que je n’avais pas bien compris ce qu’il voulait dire. Je savais qu’il était le maître et les maitres n’expérimentent jamais la vie de l’esclave dominé. Je lui ai répondu, je ne veux pas être comme votre célèbre gangster Pépé le Moko qui est venu se cacher chez nous à la Casbah. Ce Moko était recherché en France par la police pour ses crimes. Depuis ce jour, l’image de Jean Gabin dans la Casbah sous la musique de Mohamed Iguerbouchène et mes écrits sur la demi-feuille sont gravés à jamais dans ma petite cervelle.

Aujourd’hui, les jeunes écoliers sont préoccupés par autres choses. Certains ont perdu les repères et ne se retrouvent plus dans le monde réel. Le monde virtuel contrôle leur volonté et colonise leurs esprits. D’autres se rappellent de notre histoire de la révolution à travers les dires de leurs papas ou mamans qui ont vécu les atrocités du colonialisme français. Les jeunes déboussolés qui croient encore au père noël ne font pas la distinction entre Si Lakhdar Bouregaâ et Si Kaddour Benghabrit. Le premier a combattu le colonialisme français alors que le second était un coopérant de la France ou plus exactement un imam au service de la France coloniale. Si Lakhdar Bouregaâ faisait partie des héros de la révolution qui ont libéré l’Algérie. Par contre, Si Kaddour Benghabrit est un personnage mystérieux (la référence : Journal officiel de la République française, 1939, p.2975. A la dignité de grand’ croix, M. Si Kaddour Benghabrit est ministre plénipotentiaire honoraire). En plus clair Benghabrit est le héros du film L’homme libre joué par Michael Lonsdale dans le film français d’Ismaël Ferroukhi.

Nous sommes en présence d’un phénomène nouveau dans l’histoire des nations. Des nations disparaissent par un simple mensonge de Powell et d’autres tourbillonnent dans le chaos de sang agité en un clin d’œil par le « filou-sophe » Bernard-Henri Levy. Clin d’œil ou mensonge, l’ascension au trône se décide à la Maison Blanche et l’éjection se décrète dans la rue. Le désordre est partout même dans le pays le plus paisible de la planète comme Barkana Fako. Barkana Fako est un pays imaginaire. Le nom de ce pays africain résonne comme Burkina Faso. Son nom vient de l’expression arabe : Nous avons assez souffert et nous sommes conscients !

Nous avons fêté le soixantième anniversaire du déclenchement de notre révolution dans une atmosphère très exceptionnelle. La joie et la gaieté animent nos cœurs et l’instabilité chez nos voisins nous dérange. Les gens de la fête dénoncent le désordre dans le monde arabe.

Je ne veux pas vous peindre le tableau en noir mais, dans certains événements, il faut vouloir avoir une clairvoyance extrêmement perfectionnée pour imaginer le pire. La préparation au pire nous permet d’éviter les désastres.

La révolution algérienne est une révolution modèle. Elle a servi de leçons pour les peuples opprimés. Hélas ! Elle n’a pas pu échapper au syndrome napoléonien qui veut que « Dans les révolutions, il y a deux sortes de gens, ceux qui les font et ceux qui en profitent ». Pour bien illustrer les symptômes de la maladie de la révolution je cite cet exemple. Si Rabeh, le lion de Sidi Medjahed (Aïn Defla), a terminé sa vie très pauvre et malade. Par contre Chakib, le renard de Sidi Medjahed (Tlemcen) et ses copains ont bien profité des fruits de la révolution. Renards ou lion dans la fourberie politique les opportunistes trouvent leur compte.

Quels que soient nos repères la conclusion est très bien résumée par Si Lakhdar : «La majorité des dirigeants des pays arabes sont des vendus » Devant cette triste vérité le citoyen perd sa confiance envers ses dirigeants et envers leur justice. Que lui reste-t-il à faire devant ces vendus ? La réponse de Si Lakhdar est simple : La rébellion contre ceux qui le dirigent est la bonne solution.

Comme à Burkina Faso, l’imprévisible peut se produire à tout moment à Barkana Fako. A Barkana Fako, les caméléons de la politique changent de visage selon les circonstances et ajustent leurs discours selon le public qui se trouve en face d’eux. La vie est paisible à Barkana Fako. Mais… Si, par malheur, les caméléons étalent leur démagogie sur le quotidien du citoyen, la révolte prendra l’apparence d’une guerre civile et Barkana Fako suivra l’exemple de Burkina Faso.

La leçon du Burkina Faso nous enseigne que ceux qui ont pris le pouvoir par la force des armes sont en train de le perdre par la puissance des chahuts et des tapages dans la rue. Les règles de la rue sont souvent difficiles à comprendre et pénibles à accepter. Nous avons encore à apprendre sur le bon usage de la rue tout en reconnaissant sa face sombre. Les émeutes renaissent souvent des injustices dans les quartiers démunis. La naissance des révoltes s’accompagne de chahuts de gamins dans la rue et finit par une révolution pour un changement immédiat. Le 1er Novembre 1954 a libéré le peuple algérien du colonialisme français, les chahuts de gamins du 5 Octobre 1988 ont dégagé le pays des absurdités du parti unique. Les chahuts de gamins ont mis en place les premiers repères d’une Algérie démocratique. En langage diplomatique moderne « quand la justice est absente la rue gouverne les peuples et détrône les Makos ».

A Barkana Fako, la lucidité politique des gouvernants se situe dans un croisement critique. Dans ce croisement, Barkana Fako fait face aux complots de toutes sortes dans ses partis et ses organisations de masse. Dans ce pays paisible, le pouvoir doit se repérer et se conjuguer au présent s’il veut garder le minimum de son respect, son l’honneur et sa dignité. Pour se repérer, il doit annoncer au peuple des objectifs clairs, fixes et précis. Pour la stabilité de Barkana Fako, il est important pour le pouvoir de voir ou de croire que les forces conscientes existent dans le peuple qui bouge dans la rue. Les braves gens de la rue de Barkana Fako sont capables d’aider le pouvoir à s’autocorriger avant la catastrophe. A Barkana Fako, le mot « sécurité » est vraiment à la mode. On l’utilise à toutes les sauces. Il représente l’excuse parfaite à toutes les faiblesses et toutes les lâchetés.

 

En conclusion, il est évident que nous avons encore à apprendre le bon usage du mot sécuritaire et se méfier des gens qui l’utilisent abusivement dans le discours politique pour assurer le confort du fauteuil du pouvoir. Les paroles de l’auteur du Témoin de l’assassinat d’une révolution Si Lakhdar Bouregaâ, par ailleurs membre fondateur du FFS, ancien commandant de la wilaya IV, ne sont pas une alerte à la fausse bombe mais des échos d’un homme fidèle à sa conscience et attaché aux principes de son peuple. Cet homme mérite le respect. Il nous rappelle Abane, Krim, Ben M’hidi, Bouchaoui, Amara Rachid et d’autres peu connus. Nous saluons les grands hommes qui nous ont libérés des chaines du colonialisme. La baraka de ces hommes protègera sans doute notre cher pays des secousses indésirables. Hélas ces hommes ne sont pas connus par les jeunes de ce pays.

 

Auteur
Omar Chaalal

 




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