Abdelmadjid Tebboune (78 ans) monte sur ses chevaux et s’enflamme devant les opérateurs économiques jeudi. Pourtant ils sont venus plutôt entendre des solutions, des assurances quant à une volonté de degel économique. A la place, ils ont eu droit à des oukases, une langue de bois des apparatchiks des années 70.
« Aucune force dans le monde n’est en mesure de faire pression sur l’Algérie », s’enflamme le chef de l’Etat. D’où lui vient cette assurance quand on sait qu’un fossé insondable sépare le peuple des dirigeants du pays ? « Le pays a atteint le point de non-retour pour défendre farouchement sa souveraineté ». A qui s’adressait Tebboune ? De quelle souveraineté par le chef de l’Etat ? Alimentaire ? Certainement pas surtout quand on sait que tout ou presque nous arrive de l’étranger. Alors à qui s’adresse ce discours ? Quel pays menace donc l’Algérie pour mériter les foudres de ce mal élu ?
« Hormis la puissance divine, aucune force dans le monde n’est en mesure de faire pression sur l’Algérie », a-t-il fanfaronné devant les malheureux entrepreneurs à la clôture des journées de l’entrepreneuriat organisées par le Conseil du renouveau économique algérien (CREA) au Centre international de conférences (Alger).
C’est que Tebboune parle en chef de guerre, mais loin des champs de bataille. « L’Etat sévira contre toutes les formes de dérive qui ont accablé l’économie nationale par le passé et coûté des milliards de dollars au Trésor public », a-t-il encore averti. De quel passé parle-t-il ? Celui auquel il a participé en tant que ministre (plusieurs fois) sous Bouteflika ? Ephémère Premier ministre ? Ou wali de 1983 à 1991 ?
La lutte contre les formes de dérive qui ont accablé l’économie nationale et coûté des sommes colossales au Trésor public, a été parmi les défis que nous avons relevé avec conviction », tente-t-il de convaincre des opérateurs économiques déjà trop averti de la paralysie économique. Car, a-t-il oublié que son auditoire est constitué de connaisseur de la chose économique ? Mais si. En fait, Tebboune choisit l’attaque à tout crin à la défense pour empêcher toute critique de la politique qu’il mène depuis fin 2019.
Comme il n’arrive pas à faire démarrer la machine économique, Tebboune s’invente des ennemis. Il fut un temps, il a même accusé l’Administration de ne pas exécuter ses « ordres ». Jeudi il a évoqué « certaines parties, nostalgiques du passé douloureux qu’a vécu le pays et qui pensent pouvoir faire pression sur l’Etat et sur ses politiques économiques », affirmant que « le train est en marche et rien ne peut l’arrêter ». Jamais de précision. Il concède qu’elle est « minoritaire. Mais alors pourquoi lui accorder tant d’importance ? Le chef de l’Etat surfe sur des concepts vagues et accuse au doigt mouillé pour semer le doute.
Il est revenu sur l’annulation de la commission chargée du dossier de l’importation qui a « outrepassé ses prérogatives », a-t-il justifié. Comme (enfin !) pour tenter de rassurer son auditoire déjà assommé par son ton comminatoire, à la limite du donneur de leçons, il ajoute que son objectif est « l’édification, en coopération avec certains pays amis, d’une économie puissante, qui peut générer des richesses, satisfaire les besoins des citoyens, et remplacer, progressivement, l’importation »… Il était temps.
Et dire qu’il va se représenter pour un 2e mandat de 5 ans !
Sofiane Ayache