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Québec : les élections provinciales 2018 et l’enjeu de l’immigration

Au coeur de la campagne électorale

Québec : les élections provinciales 2018 et l’enjeu de l’immigration

Pour élire les 125 députés à l’assemblée nationale ce premier octobre, les trois partis dominants, PLQ, PQ, et CAQ, sont en lice pour diriger la province. Les Québécois ont un embarras du choix, puisque 10 partis au final sont sur le terrain pour la compétition électorale.

L’immigration est convoitée par les directeurs de campagne de quelques formations politiques, en même temps, pour d’autres, en usant de subterfuges, elle fait l’objet d’un enjeu d’une grande importance pour faire un bon score. L’accès à l’emploi et l’un des sujets préoccupants pour subjuguer les votants. Chacun sa formule.

Malgré les outils que le gouvernement a mis sur place pour faciliter l’intégration des nouveaux arrivés dans le marché de l’emploi, mais dans les faits il reste beaucoup à faire. Des barrières sont imposées via les ordres professionnels empêchent l’immigré de pratiquer à sa convenance. Il est bon de le rappeler, dans des sociétés comme le Québec ou la profession est respectée, il est difficile pour le politique d’interférer pour influencer afin de changer les règles.

Le collège des médecins est un exemple édifiant qui n’accorde pas une quelconque concession d’intégrer les médecins étrangers malgré les pénuries de main-d’œuvre dans les centres de santé et les hôpitaux.

La question est tellement sensible que les candidats s’expriment peu. Un autre sujet, préoccupant qui pèse dans la campagne, interpelle les Québécois dans les milieux qu’ils partagent. La pratique religieuse que certaines catégories d’immigré réclament est, souvent, fait l’objet de polémiques et de critiques intenses. Il faut reconnaître la maturité et l’approche du gouvernement Charest, en 2008, pour intervenir en dehors des milieux populistes en créant une commission pour permettre aux Québécois de s’exprimer librement sur la question des accommodements.

Des séries de consultations dirigées par le duo Bouchard-Taylor appuyées par un ensemble de partenaires de la société civile ont pu mettre certaines incompréhensions au grand public. Les Africains du nord sont parmi les demandeurs, ils réclament même ils exigent d’avoir un traitement particulier pour l’exercice de leur religion, sans tenir compte des attitudes et des traditions de leur société d’accueil basée sur des valeurs républicaines et laïques. Ils viennent bousculer un ordre déjà établi.

Aussi, les communautés juives hassidiques, à majorité, installées dans l’ouest de Montréal, sont arrivées au Canada depuis le début les années 50. Très assidus sur la pratique de la religion, la torah, ils contestent certains programmes scolaires élaborés par ministère de l’Éducation et de l’Enseignement Supérieur et ils refusent de respecter la réglementation municipale de la Ville Montréal, tous ce qui a trait aux stationnements sur rue dans le quartier d’Outremont, ces situations créent de la tension et des remous pour en faire des débats.

L’AQNAL (Association Québécoise des Nord-Africains pour la laïcité) avec leur slogan « la protection des minorités ne passe pas par la prééminence de la religion, mais par l’insertion socioprofessionnelle », regroupe des personnalités s’identifiant comme des Québécois d’origine Nord-Africaines et qui refusent d’être identifiés comme demandeurs d’accommodements. Ils remettent en cause par le biais d’un mémoire bien rédigé par ses membres «le projet de la loi 62» sur la neutralité religieuse de l’Etat, et il dénonce la passivité de celle-ci ; insuffisante et confuse pour répondre clairement à un besoin d’équité. Les partis politiques sont conscients qu’il y a présence d’un vide juridique si on ose dire, ils doivent user de leur ingéniosité pour ne pas perdre la face devant la masse des votants. Le moindre dérapage, ils risquent de s’engouffrer comme fut le cas du PQ sous le chapeau de Pauline Marois à la dernière élection (2014).

Mal préparée ou mal conseillée, à défaut de proposer un programme qui va répondre aux besoins des citoyens, elle s’est aventurée dans un discours électoraliste entretenu par des messages populistes, avec son projet : La charte des valeurs québécoises. De cette mauvaise stratégie, les Québécois ne sont pas dupes, elle a récolté une défaite presque historique, et ce qui a permis à Philippe Couillard du PLQ de gouverner sans inquiétude. Quatre députés d’origines algériennes qui ont investi le PQ ont évidemment échoué. Et la forte majorité des votants issus de l’immigration ont donné leurs confiances au parti gagnant. L’enjeu est de taille pour Jean-François Lisée, le nouveau chef du PQ, lui qui est dans son passé un fervent indépendantiste sous l’égide de René Lévesque lors du référendum de 1995. Les choses ont changé depuis, les Québécois sont de moins au moins favorables au projet de séparation, mais tout de même il n’est pas impossible qu’un jour il sera réalisé. Malgré être classé troisième dans les sondages, il se peut qu’une surprise ait lieu. Le chef de file du PQ maitrise parfaitement ses discours.

C’est la coalition, le CAQ, qui est partie dans un grand élan d’espoir, un parti hybride. En 2012, des anciens du PQ et les conservateurs de l’ADQ, un ex-parti de la droite québécoise, ont uni leurs forces pour un projet d’avenir pour le Québec. François Legault avec son style de rhéteur récolte des points à la satisfaction de ses partisans et de ses ouailles qui croient au changement. Moins ouvert au communautarisme et peu sensible à la question d’immigration. Il se démarque des autres en interdisant le port des signes religieux pour des personnes en position d’autorité incluant les enseignants, et en fixant un seuil de 20 % d’immigrant afin de limiter les quotas. Un peu bizarre de le voir investir credo politique dans cette direction, alors que les entreprises québécoises souffrent énormément de manque de main d’œuvre. Il joue sa carte en brandissant l’épouvantail de l’affluence des étrangers au Québec. Tout de même, il réclame la reconnaissance des diplômes étrangers.

Il faut le souligner, aucun candidat d’origine Nord-africaine n’est dans liste pour cette élection prévue en début d’octobre. Il est classé en avance dans les sondages, et si la tendance se maintient il a des chances de former un gouvernement majoritaire et débarquer le PLQ du pouvoir. Celui-ci est en perte de vitesse, les libéraux doivent prouver pendant cette campagne une crédibilité et défendre un bilan de quatre ans de leurs exercices. Certainement, à d’autres, difficile d’avancer des arguments sur des promesses tenues à des degrés moins. La santé est l’un des problèmes qui préoccupent les québécois, le PLQ sous la bannière de Dr Barrette, Ministre de la santé, a dû mettre des moyens pour réduire le temps d’attente dans les hôpitaux en augmentant le nombre de recrues. Visiblement sur le terrain, on peut constater des améliorations, mais non significatives, il reste beaucoup à faire puisque les médecins de famille sont saturés pour prendre d’autres patients. La question qui se pose, est-ce que les Québécois vont, encore, lui donner le quitus pour un autre mandat? Peut-être oui, si la tendance changeait, mais à l’heure actuelle les chances sont moindres.

Avec le vote des immigrés qui est presque acquis pour les libéraux dans les précédentes élections, mais pas cette fois-ci à voir les candidats et le nouveau parti, Québec solidaire, qui fait sa place tranquillement et sûrement dans la province. Il s’est distingué par sa particularité d’être dirigé pendant des années par un certain Amir Khadir, médecin de son état et originaire d’Afghanistan. De ses idées socialistes et meneur de débats, il a su s’affirmer dans les différents contextes difficiles qu’a connus le Québec.

Avec la nouvelle direction conduite par le duo Manon Massé et Gabriel Nadeau-Dubois comme porte-paroles du QS espère faire un score historique. En portant l’étendard de la gauche québécoise, il se réclame comme le meilleur obstacle au libéralisme, et une solution pour construire une société basée sur la justice sociale et l’égalité entre femmes et hommes. Notons la présence en grand nombre des candidats jeunes, auxquels s’ajoutent des postulants d’origine étrangère, comme Rabah Moula, natif d’Algérie, qui sera représenté à la circonscription de Chomedey (Laval), avec son slogan « vivre ensemble ». À ses côtés, une autre candidate qui a défrayé une polémique dans les milieux politiques, Ève Torres, jeune femme voilée espère remportéeer le comté d’Outremont-Mont-Royal, l’endroit où il issu le premier ministre Justin Trudeau.

Originaire du sud de la France, la majorité des médias se sont focalisés sur son cas, elle est un sujet de discussion qui ne laisse pas les Québécois indifférents. Au moment où on remet en cause les signes religieux qui s’affichent d’une manière ostentatoire, le QS compte défier l’opinion et l’électorat en prenant le risque de proposer une candidate qui risque d’être la raison d’être désapprouvé. Chacun son approche pour attirer un électorat issu de la diversité culturelle, dans une société ou le communautarisme est un avantage, il est judicieux de le prendre en considération pour s’organiser autour d’un regroupement pour prendre une position envers les candidats.

Le CKC (Congrès des Kabyles du Canada) l’a clairement affiché lors du congrès du 13 mai passé devant ces 300 membres qui composent cette structure. De la bouche du président Hocine Toulait, il fait mention de la forte communauté kabyle capable de peser dans l’échiquier politique et économique du Canada. Celle-ci s’est distinguée des autres sur son intégration positive au sein du Canada et particulièrement au Québec.

Il est à souligner avec regret que les invitations transmises aux différents partis pour assister aux assises du premier congrès sont déclinées, ce qui peut expliquer que le CKC, en date d’aujourd’hui, n’a pas soufflé un mot pour cette élection, et il es fort probable qu’il va garder un silence malgré l’implication des deux candidates kabyles, en l’occurrence Farida Sam et Nacéra Beddad, sous l’investiture du PQ respectivement à l’Acadie (l’île de Montréal) et Chomedey (Laval).

À travers les réseaux sociaux, il est possible de constater les intentions de chacun vis-à-vis du PQ, le QS et le PLQ. Selon les points de vue du professeur Frédéric Castel, Chargé de cours aux départements de géographie et sciences des religions à l’Université du Québec à Montréal (UQAM) au micro de Sameer Ben-Djaffer, correspondant d’El-Watan au Canada, sur le sujet de la place de la diversité dans les élections québécoises, il a résumé en 10 minutes les rôles de la communauté Nord-Africaine et leur manque d’implication en politique en exposant les raisons principales. Considérée comme une nouvelle immigration (moins de 15 ans), est l’une des premières causes, et le fait d’être loin des radars on n’est pas en mesure de s’affirmer à l’exemple de la communauté italienne qui domine et présente à différents niveaux. En outre, être issu d’un pays où le vote n’est jamais été un geste essentiel pour le citoyen à cause des fraudes institutionnalisées, contribue à comprendre leurs désinvoltures et qu’un scrutin est devenu un non-événement pour la majorité des arrivants.

L’un des faits saillants dans cette campagne c’est le grand dérapage du candidat de PLQ, à l’occurrence Mohammed Barhoune, d’origine marocaine. Pour s’attaquer à la formation politique de François Legault, la CAQ, sur ses intentions pour le volet immigration, il a usé d’un vocabulaire qui déplaît à tout le monde : « Nettoyage de l’immigration » et « la stigmatisation des femmes voilées » que prétend faire si la CAQ serait au pouvoir. Une aubaine qu’a su exploiter M Legault pour déstabiliser M Couillard lors du débat des chefs, sans aller dans le détour, il exige des excuses et la démission du candidat défaillant.

Faire peur aux Québécois n’est pas du goût de l’ancien premier ministre, c’est une manœuvre populiste qui donne l’occasion à d’autres tentatives malencontreuses. Les médias, à leurs tours, dépités, n’ont pas hésité à rajouter pour amplifier une polémique qui risque de nuire au candidat et son parti malgré les excuses officielles de ses derniers. Lors d’un point de presse à cap santé, M Legault s’est fait épinglé par des questions des journalistes sur ses méconnaissances sur l’un des dossiers qui est supposé être son fer-de-lance, l’immigration, pour subjuguer les indécis. Ne sachant répondre clairement, il s’est mêlé sur la durée minimale pour passer du statut de résident permanent à celui de la citoyenneté. Clair comme de l’eau de roche, il vient de confirmer au grand dam des Québécois qu’il ne maitrise pas particulièrement ce dossier, il est plus motivé pour des raisons électoralistes que sur le projet en question. C’est assez gênant pour sa popularité. Au final, seul l’électeur à qui revient le dernier mot pour donner sa voix au candidat de son choix, le vote est un devoir de citoyen, c’est un acte démocratique de grande importance.

La société québécoise est très avancée pour gérer les scrutins en toute liberté, le referendum de 1995 sur l’indépendance du Québec est un bel exemple qui peut nous renseigner sur le respect des résultats qui sont incontestables pour les partisans du «oui» ou du «non». Un moment fort de l’histoire du Québec. Le dérapage de l’ancien premier ministre, M. Jacques Parizeau dans une allocution fait à chaud devant ses partisans : «Entre nous, c’est vrai qu’on a été battus, au fond, par quoi? Par l’argent, puis des votes ethniques, essentiellement», une phrase qui l’a obligé à mettre fin à sa carrière politique. Contrairement au premier ministre du Canada, Justin Trudeau est l’une des personnalités les plus populaires dans le mode, avec éloquence, il a toujours su harmoniser les différentes sensibilités autour d’un projet commun qui est le Canada de demain. Intransigeant sur la question de l’immigration, il a été loin de ses propos en réponse à une citoyenne(1) réfractaire à la venue des étrangers au Québec, en dénonçant l’intolérance : « Madame, cette intolérance par rapport aux immigrants, ça n’a pas sa place au Canada. » C’est rassurant de faire partie d’un pays ou le sentiment de sécurité et de bien-être est élevé.

M. M.

Note

(1) : La citoyenne est membre du groupe de la droite identitaire Storm Alliance dans Facebook. Ce groupe est à l’origine de plusieurs manifestations pour dénoncer l’arrivée de demandeurs d’asile à Saint-Bernard-de-Lacolle.

Auteur
Mahfoudh Messaoudène Ing.

 




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