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Qui sont les traîtres Monsieur Tebboune ?

Tebboune

Tebboune

Dans sa dernière « conférence de presse » bricolée, âamhoum Tebboune met en garde le peuple algérien contre les ennemis de l’intérieur ! Tiens, pour une fois, nous sommes épargnés ! Mais qui sont ces traîtres, constamment pointés du doigt pour détourner le regard de la catastrophe politique qui sévit au pays ?

Si l’on se tient à la définition du mot traître « personne qui se rend coupable de trahison (action de trahir son pays, sa patrie, une cause) », force est d’admettre que dans telle extension nous pourrions insérer les 45 millions d’Algériens vivants. Nul besoin de convoquer les morts, vu l’étendue aux contours imprécis du positionnement et des référentiels auxquels chacun peut faire appel pour délimiter la cause des uns et la patrie des autres, bien souvent virtuelle pour beaucoup si elle n’est pas tout simplement chimérique.

Pour étayer ce méli-mélo d’héroïsme et de trahisons, pléthore d’exemples nous rappellent qu’il est impossible d’affranchir de toute subjectivité l’enveloppe de la plupart des épisodes de notre Histoire récente :

– Au commencement des articles de la Constitution fût décrété « Islam religion d’Etat », cette loi qui porta le croyant au firmament de l’héroïsme et relégué l’insoumis à celui de traître impie ayant osé renier l’une des principales, voire l’unique, constante nationale qui charrie inexorablement la république Algérienne à contre-courant de toute modernité. N’est-ce pas au nom de tel reniement à la cause d’Allah que les islamistes de tous bords, ceux du pouvoir en premier, qualifient les non-croyants de minorité de déracinés et de traîtres à une nation que l’on s’acharne à transformer en une composante absolue d’une certaine « oumma », « kheiratine » de surcroît ?

– Quand les combats faisaient rage contre les hordes intégristes, lesquelles s’étaient attelés à transformer la république en califat, Zeroual n’avait-il haussé le ton et usé de sentences impérieuses mais justes pour qualifier les compagnons de Ali Belhadj, Madani Mezrag et Hassan Hattab de traîtres et de fléau qu’il fallait éradiquer au plus tôt ? Dès son arrivée au pouvoir, Bouteflika ne tint-il pas un discours diamétralement opposé en réhabilitant les combattants de Dieu par des « Monsieur Hattab » par-ci et des «si j’étais à leur place j’aurais fait la même chose» par-là, allant jusqu’à dérouler le tapis de tous les honneurs aux responsables d’innommables horreurs? Qui de Bouteflika ou de Zeroual avait raison, qui avait tort ? Qui sont Hattab, Mezrag et Belhadj, des géants ou des félons ? Les mosquées de Kouba et d’El-Mouradia ont leur réponse, nous avons la nôtre !

– Saïd Sadi, Ferhat Mehenni, Nourdine Aït Hamouda et 21 autres Kabyles n’avaient-ils pas été emprisonnés à Berrouaghia sous l’accusation d’atteinte à la sûreté de l’Etat, délit de haute trahison passible de la peine de mort, suite au printemps berbère ? Qui de ces 24 défenseurs de la cause Kabyle ou de leurs geôliers sont les héros, qui sont, à la patrie, déloyaux ? Bouteflika, en digne héritier de Boumediene, doit avoir sa réponse, nous avons la nôtre !

– Qui peut ignorer le fait que la plupart des arabophones, surtout les islamistes bornés, considèrent les berbérophones, surtout les Kabyles d’ailleurs, récalcitrants à une arabisation forcée comme des traîtres aux causes de l’arabité et de l’islamité prescrites à tout l’espace amazigh d’Afrique du Nord.

– Côté face du problème arabo-berbère, les berbérophones ne voient-ils pas les partisans d’une arabo-islamisation aveugle comme des traîtres ayant renié leurs racines pour défendre une cause venue d’ailleurs et qui est loin d’être la leur ?

– Quand des élections sont organisées, surtout les présidentielles, celui qui ne se rend pas aux urnes n’est-il pas considéré comme traître à la cause de la petite famille révolutionnaire, alors que celui qui s’y rend pour donner un quitus de gouvernance à ceux qui pillent le pays est glorifié et encensé en héros par ce pouvoir de petits « mafiosos » ?

– Et le clan Tebboune-Bouteflika alors, constitué de tous ceux qui ont souscris au viol de la constitution, confisqué la présidence pour une durée indéterminée, remis sur scelle l’islamisme et ses occultations, sont-ils des héros ou seront-ils jugés par l’Histoire comme les ultimes félons ?

– Construire une grande mosquée à des milliards de dollars pour aller se faire soigner au Val de Grâce, laissant le petit peuple se dépatouiller dans des structures hospitalières indignes, fait-il de ce même Bouteflika un homme vaillant ou un grand charlatan ?

– Se rendre en Suisse pour y guérir une petite addiction à la cigarette fait-il du Général Nezzar un brave ou un poltron ? Son fils, celui qui s’est permis de tabasser SAS pour une simple chronique journalistique, a sa réponse, nous avons la nôtre !

Des pages et des pages de listings ne suffiraient pas à dresser un inventaire complet de la traîtrise des uns et de l’héroïsme des autres sans pour autant dégager quelconque objectivité à ces qualificatifs qui s’invitent dans le débat politique au sommet de l’état. De toute évidence, de quelque côté où l’on se positionne, on est toujours traître à la cause de quelqu’un d’autre si l’on n’y souscrit pas. Et ces notions ne portent pas la moindre empreinte d’un objectivisme infaillible, qui puisse les faire endosser aux uns tout en les retirant aux autres. Même en temps de guerre, abattre des hommes, fussent-ils ses pires ennemis, cela suffit-il à délimiter « onques » contours d’héroïsme ? Par la même, refuser de se battre pour occire son prochain représente-t-il un signe objectif de lâcheté synonyme de forfaiture ? Autant de questions philosophiques qui tortureront encore l’homme jusqu’à son extinction finale !

À défaut de réponses impartiales à ces questions, il serait peut-être bien plus utile d’arrêter de convoquer et de se réfugier derrière les morts, dans un but évident, celui d’éviter d’affronter les vivants, car de mon point de vue, si traîtres on doit désigner avec courage, ceux sont tous ces parasites qui gravitent autour du pouvoir FLiN-tox avec une servilité défiant toute philosophie, ceux-là même qui maintiennent l’attention du peuple perpétuellement rivée sur le rétroviseur de la religion et de l’Histoire pour l’empêcher d’entrevoir les voies de demain!

Ce charivari historique, plus de soixante ans après l’indépendance, ne fait que rajouter de la confusion à une situation déjà bien chaotique. 

Monsieur Tebboune serait mieux avisé de rendre les clefs d’El-Mouradia à un président élu par le peuple au lieu de se la jouer grand en tenant un langage de « tayabet el-hammam » indigeste et indigne de la fonction de président !

En osant écrire cela, fait-il de nous des héros ou des traîtres ? Les FLiN-tox ont leur réponse, vous avez la vôtre.

Kacem Madani

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