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Récupération de l’hôtel El Palace : faut-il parler d’une victoire diplomatique ?

Ali Haddad

Ali Haddad, l'ancien propriétaire d'El Palace, actuellement en prison.

L’État algérien vient officiellement de récupérer l’un des joyaux immobiliers détenus à l’étranger par l’oligarchie de l’ère Bouteflika : l’hôtel El Palace de Barcelone. Cet établissement cinq étoiles, parmi les plus anciens et prestigieux de la capitale catalane, appartenait depuis 2011 à l’homme d’affaires Ali Haddad, aujourd’hui incarcéré pour corruption et détournement de fonds publics.

Selon une enquête du quotidien espagnol La Vanguardia, la restitution du bien ne résulte pas d’une décision judiciaire, mais d’un accord à l’amiable conclu entre l’État algérien et Haddad. Le transfert de propriété a été enregistré au registre foncier de Barcelone en août dernier, sous la formule juridique du « paiement en compensation d’une dette », impliquant un consentement mutuel. Autrement dit, Haddad aurait accepté de céder l’hôtel à la puissance publique en contrepartie d’une régularisation financière.

Le bâtiment avait été acquis en décembre 2011 auprès du groupe espagnol Husa, propriété de l’ex-président du FC Barcelone Joan Gaspart, pour un montant d’environ 80 millions d’euros. D’après les documents produits lors du procès de l’ex-patron du groupe ETRHB, l’achat avait été financé par trois crédits bancaires et un prêt privé, et grevé d’une hypothèque de 26 millions d’euros auprès de la banque Santander. Ce lourd passif a finalement été pris en charge par le Fonds national d’investissement (FNI), bras financier de l’État algérien, lors du transfert de propriété.

Dans son discours du 10 octobre dernier, Abdelmadjid Tebboune avait évoqué la récupération de plusieurs avoirs mal acquis, évalués à 30 milliards de dollars, mentionnant notamment un « hôtel cinq étoiles en Espagne acheté avec de l’argent volé ». Tout laisse penser qu’il s’agissait du Palace de Barcelone. Pour le reste des actifs récupérés, on attend toujours !

L’opération El Palace s’inscrit dans le vaste chantier lancé en 2022 par les autorités pour rapatrier les biens et fonds spoliés par les hommes d’affaires proches de l’ancien régime, via des procédures judiciaires ou des règlements à l’amiable avec les détenus.

Elle marque ainsi une étape symbolique dans la politique de récupération des richesses nationales dissimulées à l’étranger — tout en soulevant la question de la transparence des « accords » conclus avec les anciens oligarques. Au prix de quel deal ces biens sont-ils récupérés ? Un travail de recension publique des biens mal acquis en Algérie et à l’étranger est nécessaire si la justice (donc le pouvoir actuel) donner quelque transparence à son action.

Mourad Benyahia 

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