Mercredi 10 octobre 2018
Remaniement : les ministrables sont pendus à leur téléphone !
La semaine qui vient, promet d’être riche en annonces : outre le départ de Said Bouhadja qui serait acté, le remaniement ministériel, voire le changement de Premier ministre semblent être à l’ordre du jour.
Au président de la République de décider du sort de ce dernier : sa reconduction ou son départ. Dans la deuxième hypothèse, son successeur éventuel -qui ne sera pas, forcément, issu de la majorité- n’aura pas à se poser la moindre question : il appliquera le programme du président de la République.
Mais à quoi ça servirait de changer de premier ministre si le président de la République lui même ne change pas son programme, est-on en droit de s’interroger ? Pourtant là n’est pas le problème, rétorquent certains, le président Bouteflika devra, probablement, reconsidérer la composition du gouvernement et nommer un premier ministre compte tenu de la situation du pays sur tous les plans.
Il faut, tout de même, avoir l’objectivité de le reconnaitre, le premier ministre n’est, en définitive, qu’une courroie de transmission du programme choisi et imposé par le président Bouteflika. Il en sera autrement, plus tard, peut-être, dans un cas de cohabitation ou là, le premier ministre venant de l’opposition installée à l’APN, aura une assez grande liberté de décision.
Pour l’heure, personne n’est protégé dans le gouvernement, personne n’a d’immunité. Personne ne sait s’il va intégrer le gouvernement, ou le quitter ! Y compris le premier ministre ou son successeur éventuel.
Personne non plus ne connait le calendrier du remaniement, sauf le maitre du jeu, Abdelaziz Bouteflika. Mais rien n’est pire que l’immobilisme. Parfois, Il arrive qu’on laisse fuiter, volontairement, l’hypothèse d’un remaniement, pour mettre d’abord la pression sur les ministres, pour ensuite par le biais d’une voix autorisée, on apporte un démenti pour dire que le changement de gouvernement n’est pas d’actualité, et ainsi mettre un terme à la panique qui avait saisie l’équipe gouvernementale qui a été, délibérément, déstabilisée !
C’est une stratégie de départ pour ré-stabiliser et rassurer ! Et comme pour refermer la parenthèse, on remet une couche pour rassurer et dire «oui, un remaniement est possible, mais pas aujourd’hui» en engrangeant tous les dividendes possibles : les ministres sont ainsi sous pression, positive ou négative, c’est selon ; tous travaillent davantage, sachant que leur destin est entre les mains du président !
Selon les politologues, cette façon d’agir constitue une forme de management utile, au besoin par le stress et la pression, l’équipe ministérielle après avoir été rassurée sur les intentions du président de ne pas brusquer le changement, se remet sérieusement à la tâche, tout en prenant acte de l’avertissement qui lui a été infligé et peut-être même penser à rattraper le temps perdu et corriger ce qui peut l’être.
S’il arrive aussi que des rumeurs de remaniement s’avèrent totalement non fondées, il reste néanmoins, qu’un remaniement, fut-il minimal, soit nécessaire. Mais, techniquement parlant, qu’est-ce qu’un remaniement ministériel ?
Cela consiste à modifier la composition du gouvernement, sans pour autant provoquer sa démission ; selon son ampleur, il sera gratifié de politique lorsqu’il est important, ou de technique s’il est confiné dans des proportions réduit
Il peut prendre trois formes :
1. un ou plusieurs ministres souhaitent quitter le gouvernement, parce qu’ils se sont présentés, avec succès, à une élection ou parce qu’ils veulent tout simplement, être déchargés complètement de leurs fonctions pour raisons personnelles,
2. un membre du gouvernement peut être révoqué, après avoir commis une grave faute politique ou autre impair rédhibitoire, l’empêchant de poursuivre son action au sein du gouvernement,
3. Le remaniement peut aussi avoir une portée plus grande et se produit :
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soit lorsque le gouvernement est en place depuis quelques années et que le besoin de changement semble avéré.
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soit lorsqu’il essuie de fortes critiques de l’opinion publique ; dans cette optique, l’ampleur des changements est alors non seulement importante mais, également, fortement médiatisée afin d’adresser un message de renouveau aux observateurs et à l’opinion publique.
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soit, au lendemain de l’adoption d’une nouvelle constitution où le premier ministre démissionne ainsi que son gouvernement.
Par le passé, nos gouvernements battaient des records de longévité ! Ce n’est plus le cas aujourd’hui, et les ministres, notamment technocrates, se suivent et se ressemblent. Ils n’arrivent toujours pas à impacter, positivement, la vie économique et sociale ! On leur reproche des sorties hasardeuses, des déclarations intempestives, leur langue de bois, des promesses non tenues et surtout de mentir au chef de l’Etat en enjolivant leurs bilans.
Il faut dire aussi que le premier ministre actuel a été amené, peut-être, a composer avec certains ministres dont il aimerait, maintenant, s’en séparer pour des raisons d’homogénéité de son staff, pour rester dans le politiquement correct ; ou crise oblige, pour apporter quelques correctifs à son équipe gouvernementale dont la majorité éprouve d’énormes difficultés à suivre le rythme imposé par la conjoncture.
Trop tard, peut-être pas. Encore, faut-il que le président accepte de le reconduire dans ses fonctions, un record absolu. Avec la crise, le pays doit bouger et aussi relancer son secteur industriel ; il faut aussi identifier et concrétiser toutes les opportunités en termes de relèvement de la croissance et de création d’emploi.
Seulement voilà, beaucoup de ministres sont à «la ramasse» !
L’éducation nationale qui reste l’otage des chocs idéologiques. Une décennie s’est écoulée sans que le système éducatif n’en sorte bonifié. La fonction pédagogique de l’enseignant est reléguée, le programme n’a pas été réformé et la bureaucratie a phagocyté le système éducatif. Sans compter les syndicats qui imposent leur diktat.
– La santé ou le bras de fer persiste entre un responsable, peu ou prou, enclin au dialogue, mettant en avant des menaces de sanctions contre les gestionnaires et les syndicalistes, ces derniers, répondant par des mouvements de grève qui pénalisent les malades.
– L’agriculture où règne un optimisme béat malgré la facture d’importation du blé de l’ordre de 400.000 à 500.000 tonnes, ce qui aurait fait grimper le prix de la tonne d’un euro à 207 euros (270 USD ) au niveau de la bourse de Paris, selon les traders. Les besoins de l’Algérie en céréales sont estimés à 800.000 de tonnes, elle qui n’en produit que 5,12 millions (campagne 2011/2012).
– Le transport, l’hydraulique, le commerce, et l’Energie, très peu diserts sur l’action de leur département.
– La pêche qui ne se préoccupe même pas de prélever son quota de thon ! Ou la solidarité nationale dont l’efficacité n’est pas évidente tout comme l’Environnement !
– La culture, la jeunesse et le sport où des budgets faramineux sont engloutis sans résultats probants.
– Il y a aussi les ministères dont la vocation première est normalement de créer de l’emploi, comme le ministère du même nom ou celui du tourisme. On les entend très peu intervenir sur ce registre.
– Il en est de même du ministère de l’enseignement et de la formation professionnelle qui apparemment n’a pas réussi encore à mettre en adéquation le triptyque formation-emploi-besoins du marché, à telle enseigne que le ministre de l’habitat, lui qui, même si c’est au détriment du segment « Ville » qu’il a totalement occulté dans ses prérogatives, a au moins, redonné vie à tous les programmes en veilleuse ;il se plaint néanmoins de ne pas pouvoir disposer d’entreprises nationales compétitives, techniquement et humainement, à même de prendre en charge son programme !
– Le ministère de l’industrie qui gagnerait à favoriser l’émergence d’un tissu industriel diversifié constitué de PMI/PME innovantes, compétitives où les hydrocarbures ne contribueront alors, qu’à hauteur de 40% de la prospérité nationale.
-Le ministère des finances qui a fort à faire en ces moments de disettes. Sans compter les banques publiques sur lesquelles il n’a apparemment pas d’emprise.
Mais pour l’instant, les regards sont braqués sur Ahmed Ouyahia : partira, partira pas ? Pourtant, l’homme n’a de cesse de renouveler sa fidélité au président.
Il est évident que le président Bouteflika recherche comme premier ministre, une personnalité qui ne lui fera pas d’ombre. Et s’il en est un qui convienne, il risque de ne pas être plus efficace que le tenant actuel du poste, crise économique oblige ! C’est ce qui accrédite, aux yeux de certains, la thèse de reconduction d’Ahmed Ouyahia! A charge pour lui de resserrer son équipe ministérielle et de nommer aux départements régaliens des hommes d’expérience capables de prendre toutes les décisions qu’exige la conjoncture. Et aussi, pour mener les réformes de plus de 30 textes de loi, conséquemment, à la nouvelle constitution.
Et si aujourd’hui, Ahmed Ouyahia semble moins pressé à prendre une quelconque initiative au plan politique ou social, son attitude a pour effet de tétaniser ses ministres, qui vivent dans l’anxieuse expectative de savoir ce que leur réserve le remaniement qui se fait attendre. Les ministres, quels sortants, quels rentrants ?
Difficile à dire. Ce qui est sûr, c’est que quelques uns d’entre ceux encore en poste auront du mal à trouver le sommeil, comme à chaque fois qu’on parle de remaniement. Les jours à venir, les rumeurs et les contre rumeurs vont se succéder, en attendant la décision d’Abdelaziz Bouteflika qui, rappelons-le, n’aime pas qu’on lui force la main ! Et l’on renouera l’histoire d’un temps, avec les intenses négociations génératrices de consécration pour les uns et de déception pour les autres.
Le changement, selon certaines sources, devrait concerner plusieurs départements, dont ceux qui buttent, depuis des semaines, sur des mouvements de protestation, dont l’Education nationale, la Santé et l’Enseignement supérieur.
Au moins huit postes ministériels pourraient être concernés par ce remaniement, rendu indispensable en raison de l’incapacité du gouvernement actuel à faire face à la crise sociale et économique qui frappe le pays. Reste à savoir, si le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, donné partant à plusieurs reprises, sera épargné par ce changement. En janvier dernier, une rumeur évoquant son limogeage s’est répandue comme une traînée de poudre. Son « recadrage » par le président Bouteflika sur la question de la privatisation des entreprises publiques avait amplifié la probabilité de son départ.
Entre-temps certains ministrables, issus de la société civile ou anciens ministres, voire quelques walis ambitieux vont vivre, ces prochains jours et nuits, un véritable calvaire!
Pas de méprise, ce ne sont pas des opposants malheureux comme les avait décrit, et de manière croustillante, un animateur lors d’une émission radiophonique ; la scène commence ainsi : (sonnerie de téléphone) Excusez-moi, c’est ma nouvelle sonnerie de téléphone depuis dimanche soir disait l’un des ministrables sur un plateau où il était invité… J’ai oublié de l’éteindre en entrant en studio ce matin… C’est très gênant, je suis confus, je reprends…Les ministrables ce sont tous ceux qui espèrent que le président va les nommer ministre dans son gouvernement resserré…. Alors évidemment, ces politiques, ces intellectuels, ces personnes qui rêvent d’être ministres, sont très tendus, parce qu’ils attendent… (Sonnerie de téléphone) Oh, la, la ! C’est pas vrai, je n’arrive pas à éteindre ce foutu téléphone. Pardonnez-moi chers auditeurs ! Oui, donc, ces femmes, ces hommes attendent un appel qui pourrait leur annoncer la bonne nouvelle et à chaque fois que leur téléphone sonne, ils s’imaginent que c’est « la présidence » qui les appelle personnellement, ou alors le futur Premier ministre pour leur proposer un poste, et forcément, ils vivent avec leur Smartphone greffé. Ils ne l’ont pas éteint cette nuit, ils vont aux toilettes avec, ils déjeunent avec… (Sonnerie de téléphone). Oh, la, la ! Mais Ce n’est pas possible, cette sonnerie, il faudrait peut-être que je réponde, c’est peut-être important… (Sonnerie de téléphone). Clap de fin.
En dépit de rumeurs ou d’offres réelles, certains de ces ministrables ne seront pas, finalement, du casting ! Et l’annonce du nouveau gouvernement, à peine rendue publique, que voilà certains farfelus dont le nom a été cité par les médias, s’appliqueront à expliquer pour se justifier : « (…) oui, j’ai été contacté pour prendre tel et tel ministère, mais en dernière minute etc »; et aux plus effrontés de dire : « (…) j’ai décliné la proposition d’intégrer le gouvernement, j’ai posé des conditions etc ».
En définitive, personne non plus ne connait le calendrier du remaniement, sauf le maitre du jeu, Abdelaziz Bouteflika. Mais rien n’est pire que l’immobilisme ! Et quoiqu’il advienne, les ministrables, tout comme ceux qui seront débarqués du gouvernement en garderont des séquelles douloureuses.