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Sahara-Occidental : sortir de la stratégie de ni guerre ni paix

Opinion

Sahara-Occidental : sortir de la stratégie de ni guerre ni paix

Depuis qu’il a signé les accords d’Abraham avec Israël en contrepartie de la reconnaissance ‎américaine de la « marocanité » du Sahara Occidental que Joe Biden a endossée en violation du ‎droit international sur lequel est censé veiller le conseil de sécurité de l’ONU, le Maroc semble ‎s’être diablement enhardi.

‎Alors qu’il était sur la défensive ces dernières années, il est brusquement passé à l’offensive en ‎moins d’une année.

D’abord en Palestine où il a lâché la cause palestinienne en échange du soutien ‎militaire d’Israël à ses futurs projets, puis à Gargarat où il a attaqué des positions du Polisario sur la ‎portion de territoire qui lui est reconnue, ensuite contre l’Espagne pour avoir « osé » soigner chez ‎elle le président de la RASD et, enfin, à l’Algérie en visant son intégrité territoriale et son unité ‎nationale.

‎L’énervement constaté chez nous en réaction à ce qui n’est que de l’enfantillage diplomatique et ‎de l’infantilisme politique n’est pas la bonne réponse à apporter au Maroc, s’il ne se désavoue pas ‎les divagations de son ambassadeur à l’ONU. ‎

Le ministère des affaires étrangères doit certes agir selon les procédures diplomatiques d’usage, ‎mais le pays doit se garder de verser dans la surenchère verbale ou l’agitation populiste comme, ‎par exemple, appeler à des marches populaires en Kabylie ou ailleurs.

Nous n’avons rien à craindre ‎de déclarations irresponsables, et rien à prouver à quiconque sur la planète.‎

Il faut au contraire afficher un mépris souverain et un flegme indémontable devant cette ‎provocation puérile qui rappelle les fanfaronnades cycliques dont sont familiers les diplomates de ‎ce pays frère, tartarinades qui ne tardent pas à se retourner contre lui ainsi qu’on l’a vu dans ses ‎déboires récurrents avec l’Espagne ou avec l’Union africaine qu’il a quittée en 1984 avant de la ‎réintégrer en 2017 alors que la RASD en était toujours membre. ‎

Soyez tranquilles, frères algériens et marocains, aucun pays au monde n’accordera de crédit à cette ‎menace farfelue et grossière contre l’Algérie.

Ce qui doit être fait, en revanche, c’est se décider à ‎régler une fois pour toutes le problème du Sahara Occidental sur la base des enseignements tirés ‎des conflits asymétriques récents ou en cours dans le monde arabe et africain.‎

Ce pays d’un demi-million d’habitants environ et de 266.000 km2, figure sur la liste des « territoires ‎non autonomes » de l’ONU depuis 1963. L’Espagne en est sortie en 1975 sous les coups de boutoir ‎du Polisario, et le Maroc s’est dépêché de l’envahir aussitôt. En 1988, lui et le Maroc se sont ‎entendus sur la tenue d’un référendum d’auto-détermination en 1992. Dans cette perspective, un ‎cessez-le-feu avait été décidé sous les auspices de l’ONU en 1991.‎

En 2007, une nouvelle résolution du Conseil de sécurité de l’ONU est adoptée « en vue de parvenir ‎à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable qui permette ‎l’autodétermination du peuple du Sahara occidental ».

En 2008 et 2009, des négociations directes ‎s’ouvrent entre les deux parties à New York dans le but de trouver une solution à la question des ‎listes électorales, mais sans succès.‎

Depuis 1991 la question sahraouie est restée sur une voie de garage, exactement comme la cause ‎palestinienne après qu’elle eut déposé les armes en 1992. Le temps a travaillé contre les Sahraouis ‎et pour le Maroc, comme en Palestine où l’occupation n’a cessé de grignoter les territoires ‎concédés aux Palestiniens par les Accords d’Oslo.

Car les puissances hégémoniques ou occupantes ‎ne comprennent que le langage de la force, des coûts financiers du conflit pour leur économie et ‎des pertes humaines qu’il engendre dans leurs rangs.‎

La question du Sahara occidental ne se résoudra ni à l’ONU ni par les négociations, mais par la lutte ‎armée, une lutte qui coûtera le prix que coûte l’indépendance quand on la veut vraiment.

La ‎solution des deux États ne deviendra envisageable que si le Polisario abandonne la politique de ni ‎guerre ni paix, et rend l’occupation de son pays financièrement ruineuse et humainement ‎coûteuse.‎

Avec peu de moyens technologiques et logistiques, des organisations comme le Hezbollah, Hamas, ‎le mouvement Azawed, les Talibans, les Houtis, Daech, etc, sont arrivées à tenir en respect des ‎puissances militaires du niveau d’Israël, et conquis des portions de territoires d’Etats comme l’Irak, ‎la Syrie ou le Mali.‎

Les Sahraouis ont déjà le contrôle de 20% de leur territoire, soit 50.000 km2 sur un total de 266.000. ‎Qu’en ont-ils fait ? C’est presque deux fois la superficie d’Israël (30.000 km2). Gaza, où vivent deux ‎millions de palestiniens, s’étend sur un peu plus de 300 km2. Ne peuvent-ils pas faire comme ‎Hamas et le djihad islamique ?

Qui est écouté aujourd’hui par les grandes puissances et admiré par ‎les partisans des causes justes, Hamas ou l’OLP ?‎

Le Polisario n’a pas besoin d’une armée classique et encore moins d’une armée de parade. Il doit ‎faire comme l’Emir Abdelkrim el-Khattabi contre les Français et les Espagnols dans le Rif marocain, ‎comme les moudjahidin marocains, tunisiens et algériens contre le colonialisme français, comme ‎Hamas à Gaza et le Hezbollah au Liban. ‎

‎« La guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens » disait Clausewitz au XIXe ‎siècle ? C’est toujours vrai.‎

Auteur
Nour-Eddine Boukrouh

 




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