Quand le sage bute sur des questions existentialistes, pourquoi ne pas consulter le fou ? C’est ce que nous propose Lounis dans ce titre : poser toutes sortes de questions à un fou afin de voir comment il perçoit le monde. Et, par ses réponses, il apparait que le fou n’est pas si fou que cela, comme pour répondre aux angoisses de tout un chacun à propos du destin de l’homme : « Vis ta vie comme si tu ne mourrais jamais, quand la mort sera là vous ne vous croiserez pas ». C’est une rhétorique Epicurienne !
« La mort n’est rien pour nous ». Extraite de La Lettre à Ménécée d’Epicure, cette citation est un remède contre l’un des principaux maux de l’humanité : la peur de la mort.
Pour deux raisons. La première est que pour Epicure la mort est la privation des sensations.
Sans sensations, la mort ne peut nous affecter. Elle n’est donc ni à craindre, ni à souhaiter.
Plus logique, la seconde est que la mort ne peut exister pour nous.
La vie et la mort s’excluent réciproquement l’une l’autre : « Quand nous existons la mort n’est pas là, et lorsque la mort est là, nous n’existons pas ».
La mort n’existe ni pour les vivants, ni pour les morts. En bref, elle n’est pas un sujet de préoccupation.
Les angoissés de la vie après la mort qui n’arrivent pas à profiter de la vie au présent.
Délivrez-vous des superstitions, mythes ou religions qui, sur la base de votre ignorance de la nature des choses, vous font croire en de vains espoirs.
Sans au-delà ni réincarnation, le bonheur est à vivre ici et maintenant.
Ne passez pas à côté de votre vie, vous n’en avez qu’une. Vivez au présent. Carpe Diem !
« Serreḥ i waman ad lḥun » Laisse donc l’eau couler sous les ponts
Chaque fois que nous sommes désemparés
Nous sollicitons les vieux érudits
De leurs connaissances ils érigent des murets
Consignant leurs paroles sur chaque galet
Et si nous changions d’approche
Et allions consulter les fous
Un jour j’ai interrogé l’un d’eux
Préparant moult questions
Qu’il me conte sa condition
Que je sache comment il est
Que je comprenne son ingénuité
Comment il perçoit le monde
Il m’a dit la raison de ta venue
Je m’en vais te la dire, retiens-la
Je te la remets comme appoint
Laisse-la choir si elle ne te plait point
Voilà comment le pauvre fou voit le monde
Du temps il m’a donné ses observations
Voici comment il le perçoit
Le fil du temps s’est effiloché
Le décompte des années est entamé
Si nous voulons savourer une seule journée
Elle trépasse sans que nous en ayons profité
Tout s’égrène en accéléré
On ne sait plus quoi se remémorer
Laisse donc couler l’eau sous les ponts
Tu ne peux pas arrêter le temps qui passe
Il glisse comme du sable entre les doigts
Il coule sans s’arrêter et sans patienter
Laisse donc couler l’eau sous les ponts
Ne crains ni la mort ni ton destin
Ne regrette pas les faits de ton quotidien
Tout ce qui s’est passé, ce qui adviendra
Laisse donc couler l’eau sous les ponts
Ne retiens que ce qui est beau dans la vie
Rends grâce aux matinées comme aux soirées
Avant qu’elles ne t’oublient et ne te laissent tomber
Nous sommes obsédés par la longévité
Qui ne l’a pas souhaitée
Celui qui laisse son empreinte aux ans
Même mort il est vivant
Quand on a édifié le temps il était présent
Il a rajouté sa propre pierre aux monuments
Laisse donc couler l’eau sous les ponts
Ne crains rien, suit les pistes non foulées
Suis le chemin que personne n’a emprunté
Si tu tombes tu te redressera
Les jours se souviendront de toi
Laisse donc couler l’eau sous les ponts
Là où les autres ont peur, engouffre-toi
Tu ressentira ce que personne n’a éprouvé
Débroussaille leur chemin, leur espoir est en toi
Laisse donc couler l’eau sous les ponts
Expérimente la vie, connais-toi toi-même
Repousse ce qui est mauvais, garde ce qui te satisfait
Tu en sortira grandi
La mort qui te turlupine
Tu te trompes à son sujet
La mort qui te turlupine
Tu te trompes à son sujet
Si tu refaisais tes calculs
Quand tu la redoutes, elle n’est pas là
Quand elle s’approchera de toi pour te happer
Tu ne seras plus là pour la rencontrer
Laisse donc couler l’eau sous les ponts
Vis ta vie comme si tu ne mourrais jamais
Quand la mort sera là vous ne vous croiserez pas
Ce sont les autres qui seront peinés
Laisse donc couler l’eau sous les ponts
Le paradis et l’enfer laisse les aux autres
Crois en la vie et en ce que tu vois
Que chacune de tes journées soit belle
Laisse donc couler l’eau sous les ponts
Le monde appartient aux vivants
Laisse donc la mort à ceux qui sont décédés
Ils sauront mieux s’en occuper
Laisse donc couler l’eau sous les ponts
Ce qui est passé appartient au passé
Ce qui adviendra laisse le tomber, tu ne le connais pas
Pour que chacune de tes journées soit belle
Dans le monde en chaque époque
N’importe quel fou te dirait
Celui qui possède une miche de pain
Dans son nid il est à l’abri
S’il n’importune personne
Personne ne l’importunera
Celui-là surpasse les normes
Il devient l’allié de Dieu
Celui-là surpasse les normes
Considère-le comme l’ami de Dieu
Laisse donc couler l’eau sous les ponts
Éloigne-toi de ceux qui font de Dieu leur possession
Et n’admettent pas d’autre vision
Prends garde à ce que tu ne sois abusé
Laisse donc couler l’eau sous les ponts
Même furtive la vie est belle
Si tu la laisses filer elle ne reviendra plus
Laisse les autres fabuler à leur guise
Laisse donc couler l’eau sous les ponts
Voilà ce que du monde le fou t’apprend
Même si ses mots sont imparfaits ils proviennent du cœur
S’ils ne te soulagent pas tu n’en ressentira aucune douleur
Laisse donc couler l’eau sous les ponts
(*)