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Si Khelil et Ould Kaddour sont innocents, alors Touati l’est aussi !

Le blogueur écope de 10 ans ferme

Si Khelil et Ould Kaddour sont innocents, alors Touati l’est aussi !

C’est évident, Merzoug Touati est victime d’une grande injustice. Dix ans de prison ferme pour un post sur Facebook, ou pour une entrevue intrépide avec un responsable israélien ne méritent sûrement pas une telle sentence. 

Tout le monde sait où se trouvent les véritables espions, ceux qui ont été, il n’y a pas si longtemps jugés, condamnés et écroués pour haute trahison, et qui gèrent actuellement pour certains, le poumon de l’Algérie pétrolière ? C’est avec de telles affaires que la crédibilité de notre justice se retrouve complètement ruinée, tant le morceau est gros et que le gosier déjà saturé en couleuvres, ne peut plus rien ingurgiter. 

Comment croire en effet à la justice d’un pays qui lance dans le cadre d’un scandale planétaire des mandats d’arrêt internationaux contre un ancien ministre, ses amis complices, sa femme et ses enfants puis les blanchit sans jugement, par simple absolution présidentielle ? 

Sérieusement, qui peut croire dans ce cas, que ce jeune blogueur-chômeur est un espion ? Un espion, aurait-il diffusé son entretien ? Aurait-il agi de la sorte, se serait-il affiché avec ses présumés employeurs dans une vidéo postée sur YouTube au grand public ? Aurait-il été aussi visible, naïf, amateur ou stupide pour se jeter ainsi dans la gueule du loup ? 

Nul besoin d’être un expert en espionnage, ou en scénarios égyptiens à la Raafat El Haggane, pour comprendre que ce dont est victime Marzoug Touati est une machination destinée à en faire un exemple, pour tous ceux qui voudraient jouer aux trouble-fêtes où aux Colombo curieux, qui poseraient le pif là ou d’autres mettraient avec énergie les brosses à cirer.

Et c’est en cela que l’affaire Merzoug Touati nous interpelle collectivement en tant qu’intelligences, et non en tant qu’unités de consommations en ces temps sacrés. Elle nous apostrophe violemment en tant que citoyens responsables les uns des autres, solidaires des causes qui méritent d’être défendues.

Que sommes-nous finalement ? Chkoun h’na ? Des citoyens spectateurs ou des ripoux complices ? Des victimes ou des bourreaux ? Qui sommes-nous face à l’injustice, face à l’abus et à l’arbitraire ? Des fils de martyrs, morts pour que l’on porte notre fierté en étendard, ou des petites mauviettes bonnes à embrocher, à plumer et à tordre le cou ? 

La vie nous offre sans cesse des occasions pour jauger notre courage, mesurer notre audace ou droiture. Elle nous met continuellement à l’épreuve pour nous confronter à nous-mêmes, à ce qu’il y a de plus beau en nous, mais aussi à nos peurs, indifférence, égoïsme ou laideurs intérieures, qui font que certains sont confortables face aux miroirs et que d’autres les fuient. 

Combien de temps peut-on ignorer les injustices, les éviter et faire semblant, comme pour les feux qui ravagent la ville, qu’ils ne dévoreront que les maisons voisines, et qu’ils s’arrêteront assouvis aux pas de nos portes comme par magie. Combien de temps encore l’arbitraire va nous épargner, avant de nous happer à notre tour, avant que l’on devienne des Touati, Chitour, Benchicou voire des Tamalt ? Combien de temps les mauviettes en nous réussiront-elles à tordre le cou aux vaillants fils de martyrs qui sommeillent impatients en nous ?

Dans toutes les religions, toutes les cultures, la non-assistance à personne en danger, parce que répréhensible, parce qu’incarnation de la lâcheté dans sa plus laide expression est considérée comme une complicité avérée.

Dans ce sens, les injustices, toutes les injustices, doivent être, sinon combattues du moins fortement dénoncées, autrement, comme les pelletées de terre, elles nous ensevelissent un jour à notre insu, sous un amas de honte et d’abus.

Et comme une démonstration, presque au moment où le blogueur chômeur, Mezoug Touati, écopait d’une peine « exemplaire » de 10 ans de prison ferme pour intelligence « avec les agents d’une puissance étrangère, des intelligences de nature à nuire à la situation militaire ou diplomatique de l’Algérie ou à ses intérêts économiques essentiels », Nadjat Arafat, épouse de Chakib Khelil, citée dans le scandale planétaire des « Panamas papers » et qui a reconnu dans le procès Eni-Sonatrach qui se déroule actuellement en Italie, avoir reçu plus de « 238 000 $ sur son compte comme Zakat », bénéficiait avec ses fils, également recherchés par les autorités algériennes, de l’abandon pure et simple de toutes les charges qui pesaient sur eux.

Si les Khelil et autre Ould Kaddour sont innocents, alors Merzoug Touati l’est aussi, et sûrement davantage !

Auteur
Hebib Khalil

 




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