C’est décidément la descente aux enfers de la société algérienne ! Des infos font état de milliers d’adolescents accourus au Sila pour acquérir un livre sur les « djinns », la sorcellerie et Satan, écrit par, Ousama Muslim, un écrivain saoudien, qui en serait à son 10e livre, toujours des best-sellers, sur le même thème.
Un livre (parmi tant d’autres sur la même thématique) qui a semble-t-il détrôné la « littérature » culinaire qui s’offrait la part du lion au Sila et dans les librairies.
Voilà où mène l’interdiction des belles lettres, de la marginalisation et de la diabolisation de nos meilleurs écrivains ! Pendant que des éditeurs sérieux et militants comme Koukou et Tafat sont interdits de participation, une cohorte de maisons d’éditions moyen-orientales inonde le salon de livres des plus conservateurs.
C’était prévisible vu que les écrivains et intellectuels locaux (en tamazight, en arabe et en français) sont réduits à la subsistance éditoriale, privés de plateaux télévisés et même accusés d’apostasie ou de traîtrise dès lors qu’il traitent de sujets qui ne plaisent pas soit au pouvoir soit à une tendance politique soit, le plus souvent, à une mouvance idéologique (des fois mixte : islamo-conservatrice), -ce qui est souvent le cas-, disposant d’organes de presse toujours prêts à dégainer sur tout ce qui rappelle le modernisme et les nouvelles idées qu’il véhicule, tout en s’efforçant de faire les louanges de tout ce qui est archaïque et dépassé.
Le comble dans cette affaire est que les parents, même les plus lettrés, n’ont souvent jamais entendu parler de l’auteur de ces livres et de ses publications.
« Les parents dans un oued et leurs progénitures dans un autre », comme le dit un adage populaire. Comment en est-on arrivé là ?
La réponse est toute simple : les interdictions, les diabolisations, les anathèmes qui touchent la vraie production littéraire, culturelle ou « philosophique » ne peuvent donner naissance qu’à l’émergence et la « sacralisation » des tendances surannées et rétrogrades ne répondant à aucune forme de logique ou de rationalisme.
C’est aussi indiscutablement une forme de défi et de révolte des esprits que certains veulent formater à leur guise !
On ne récolte que ce qu’on sème. Semer la haine du rêve conduit inévitablement à l’amour du cauchemar.
Il est plus que vital pour l’Algérie d’enclencher une révolution culturelle portée sur le progrès et la modernité, -sur le modèle japonais, entre autres-, tout en gardant le meilleur de notre héritage culturel millénaire qui peut servir d’exemple lui aussi à l’humanité entière, les civilisations s’irriguant les unes les autres dans ce qu’elles ont de meilleur.
Tant que nous avons encore le choix, optons pour le meilleur et le plus beau !
Donnons une chance à la raison tant que la chute n’est pas encore fatale !
Youcef Oubellil, écrivain