Bien sûr, je connaissais Amar Amarni à travers ses albums et les réseaux sociaux. Je l’avais déjà rencontré et j’avais compris d’emblée qu’il était habité par les doux murmures des Maâtkas où il est né.
Mais il y a connaître et connaître ! Ce soir-là du 24 janvier 2025, je l’ai (re)découvert au détour d’un concert qui s’est avéré magique. Oui, magique au sens littéral du mot, c’est-à-dire un moment où se produisent des effets extraordinaires, prodigieux, merveilleux.
Amar était en pleine forme, sa compagne Jasmina l’était aussi avec son regard lumineux aux couleurs de la Croatie, son pays natal. Elle qui, en plus d’être une magicienne du bendir, a transformé une coupe de glace en instrument de musique pour interpréter, en chœur, un chant de Idir auquel un hommage appuyé a été rendu dans cette soirée dédiée à Matoub Lounès et, par ricochet, au mentor de celui-ci, Slimane Azem !
Leurs musiciens de génie n’étaient pas seulement de la partie. Ils collaient si bien au look rasta de notre artiste aux multiples talents. Le bassiste Félix, martiniquais comme Frantz Fanon qui a épousé la cause algérienne des années de braise, Lounis le batteur, Sofiane le guitariste venus tous deux tout droit du Djurdjura dont ils ont gardé la posture altière et l’harmonie musicale qui s’entrelace aux couleurs de nos sommets si attachants.
La magie, c’était aussi les connexions, celles qui conduisent à la luxuriance des rapports humains. Des admirateurs et des amis d’Amar venus de partout. J’ai rencontré, moi aussi, des amis de longue date et de grands talents notamment Hniya Mouazer, une chanteuse au cœur d’or, Kamel Iflis dont les compositions font danser tant de fans, Malik Bellili sensible et pétillant, Lounis Bouali Ali qui conquiert un public toujours plus nombreux. Mon ami Azal Belkadi lumineux, chanteur lyrique, artiste peintre était avec mon contribule Slimane Mellouk toujours souriant, radieux et énergique.
Ces deux hommes ingénieux ont été les camarades d’Amar à l’École des Beaux-Arts d’Alger fin des années 90. S’y trouvait aussi Hacène Tebani, des Iwadiyen qui a transmis la passion de la guitare à Amar. Ils y ont tissé des liens de fraternité inoxydables. Leurs cheminements riches, foisonnants sont pavés de belles créations. À l’exception de Hacène, tous les trois autres se retrouvent en Europe pour y exercer librement leur talent.
Au milieu de ce beau monde, de ces belles personnes chacune avec son style, Amar semblait particulièrement heureux d’être là à Paris. Attachant comme un enfant au rire incandescent, cette figure charismatique du monde du spectacle et des Arts est d’une grande humilité. Il a chanté, en Maestro, la vie, l’amour, les voyages, les moments nostalgiques, son identité, les tourments et les espoirs du cœur et, bien sûr, Tamazgha avec ses cauchemars et ses raisons d’espérer.
Amar est viscéralement attaché à sa terre natale. « Rruh icudd s akal-is » comme le chante Lounis Aït Menguellet. Il est un héros des temps modernes et oscille, avec élégance, entre les charmes des traditions et les délices d’aujourd’hui, entre sa culture ancestrale et sa vision sans frontières.
Amar, c’est bien de le rappeler, n’est pas seulement un artiste. Il est un acteur engagé, conscient des enjeux nationaux et internationaux. Chaque geste sur scène consolide sa présence magnétique, chaque rythme invite au voyage comme s’il explorait ses racines amazighes dans les tourbillons du monde pour mieux les mettre en valeur.
Aux dires de ses amis artistes-peintres, son atelier à Majorque en Espagne regorge de toiles qui sont autant d’odes à la vie, à la culture, à la Kabylie parce qu’Amar n’est pas qu’un simple chanteur. C’est un artiste complet, ses talents multiples invitent à rêver d’un monde meilleur, un monde où la diversité serait célébrée avec bienveillance et amour.
Hacène Hirèche
Merci Amar Amarni et merci à Arezki At MesƐud/Houli qui m’a convié à cette soirée inoubliable.