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Sommet Russie-Afrique

Sommet Russie-Afrique

Au dernier jour du sommet Afrique-Russie à Saint-Pétersbourg, le président russe Vladimir Poutine et le président en exercice de l’Union africaine Azali Assoumani se sont exprimés à la tribune pour l’allocution de clôture. Et ils ont affiché leur satisfaction, même si l’unité n’a pas toujours été au rendez-vous de ces deux jours de sommet, que ce soit entre dirigeants africains ou entre Russes et Africains. 

Pendant que les guerres au Soudan et en Ukraine font rage et que les putschistes assoient leur pouvoir au Niger, une vingtaine de dirigeants africains se sont offert un séjour pour quémander blé et soutien.

Une déclaration commune a été adoptée à l’issue de cette rencontre, prévoyant une coopération accrue dans les domaines de l’approvisionnement alimentaire, l’énergie et l’aide au développement. Elle appelle à « créer un ordre mondial multipolaire plus juste, équilibré et durable, s’opposant fermement à toute forme de confrontation internationale sur le continent africain », selon le texte publié sur le site du Kremlin.

Le texte prévoit aussi que Moscou aidera les pays africains à « obtenir réparation pour les dégâts économiques et humanitaires causés par les politiques coloniales » occidentales, y compris « la restitution des biens culturels » pillés.

Le président russe a annoncé que le sommet Russie-Afrique se tiendra désormais tous les trois ans et un « mécanisme de partenariat et de dialogue » sera créé pour les « questions de sécurité », y compris pour la lutte contre le terrorisme, la sécurité alimentaire et le changement climatique.

« Il est également question de passer systématiquement aux monnaies nationales, y compris le rouble, dans les règlements financiers des transactions commerciales » entre la Russie et l’Afrique, a ajouté Vladimir Poutine.

Un trou sur la photo… 

Le sommet s’est terminé sur une note plus chaleureuse qu’il n’avait commencé. Le président comorien, également président de l’UA, a félicité avec enthousiasme le président russe pour « la très bonne réussite » de ce sommet « pour Vladimir Poutine, et pour nous les Africains », a-t-il insisté.

Espoir d’un essor concret de la coopération russe, d’une meilleure représentation dans les instances multilatérales… Mais prudence sur les céréales : Azali Assoumani a répété que les dons russes ne suffisaient pas, qu’il fallait un cessez-le-feu avec l’Ukraine et que les États africains qui souffrent de cette guerre étaient prêts à se poser en « médiateurs ».

La veille, le président congolais Denis Sassou-Nguesso avait également souligné que « lorsque deux éléphants se battaient, c’était l’herbe qui était écrasée »…

Ces deux dirigeants n’étaient pas sur la photo de famille avec Vladimir Poutine, pas plus que les présidents bissau-guinéen et sénégalais, Umaro Sissoco Embalo et Macky Sall. C’est dire que la communion tant clamée à coup de chantage au blé n’a pas payé.

Le coup de gueule du capitaine Ibrahim Traoré

Les tensions entre dirigeants africains ont éclaté au grand jour, ce vendredi 28 juillet, lorsque le capitaine Ibrahim Traoré, du Burkina Faso, a décidé de « laver son linge sale en famille » lors d’une table ronde réunissant tous les partenaires présents à ce sommet. C’était la première fois que le capitaine Ibrahim Traoré se retrouvait devant une telle assemblée, lui qui dirige un pays suspendu de la Cédéao et de l’Union africaine depuis janvier 2022.

Le président de la transition au Burkina Faso s’est adressé frontalement à la vingtaine de chefs d’État et de gouvernement réunis autour de Vladimir Poutine : « Je m’en vais m’excuser auprès des anciens que je pourrais vexer dans mes propos à venir. Les questions que nos générations se posent sont les suivantes : il s’agit de comprendre comment, avec tant de richesses sur notre sol, l’Afrique est aujourd’hui le continent le plus pauvre. Et comment se fait-il que nos chefs d’État traversent le monde à mendier ? Il faut que nous, chefs d’État africains, arrêtions de nous comporter en marionnettes qui dansent à chaque fois que les impérialistes tirent sur les ficelles. »

Des propos que le président sénégalais n’a pas laissé passer. Macky Sall a répondu au capitaine Traoré, dès le début de son intervention : « Pour répondre à notre jeune frère, notre cadet : les chefs d’État ne sont pas venus ici pour mendier. Nous n’allons pas ailleurs pour tendre la main. Nous travaillons pour un partenariat d’égale dignité entre les peuples. C’est le même discours qu’on tient à Dakar, ici à Saint-Pétersbourg, ou à Washington. Et ce combat transcende les générations. »

Le capitaine Traoré apparaît en treillis à la droite de Vladimir Poutine sur la photo officielle. Une photo que les présidents du Sénégal, du Congo et de la Guinée-Bissau ont donc préféré boycotter.

Après la première édition qui s’est déroulée à Sotchi en 2019 et qui avait réuni 45 chefs d’Etat africains, ce deuxième rendez-vous du sommet Russie-Afrique qui vise à renforcer les relations diplomatiques, économiques et sécuritaires entre le continent africain et la Fédération de Russie a enregistré l’arrivée de 22 chefs d’Etat africains.

L’Égypte presse la Russie de relancer l’accord céréalier

Lors du sommet Russie-Afrique, le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a appelé Moscou et Kiev à s’entendre d’urgence pour relancer l’accord céréalier de la mer Noire. La Russie s’en est retirée, estimant que l’Ukraine et l’Occident ne respectaient pas leurs engagements à son égard et l’Égypte est le pays qui risque d’être le plus affecté par sa suspension.

L’Égypte est un des plus grands importateurs de blé via la mer Noire. Au cours du premier trimestre 2023, elle a importé près de deux millions et demi de tonnes de blé. Deux millions venaient de Russie et 200 000 d’Ukraine. L’arrêt des exportations de blé par la mer Noire pourrait avoir des conséquences catastrophiques pour l’Égypte qui importe la moitié des 20 millions de tonnes de blé consommés annuellement.

Du blé dont la majeure partie va au pain subventionné vendu à l’équivalent d’un demi-centime d’euro la galette. Un pain tellement vital que les Égyptiens l’appellent « al aych », la vie. La hausse des prix avec une inflation qui frise les 40% rend le quotidien du tiers des Égyptiens qui vivent sous le seuil de pauvreté de plus en plus difficile. « Une pénurie de pain et c’est l’explosion sociale garantie », estiment des observateurs.

L.M.RFI

 

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