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Soudan : les paramilitaires des FSR rackettent les habitants d’El-Fasher

Les paramilitaires des Forces de soutien rapide de Hemedti

Les paramilitaires des Forces de soutien rapide de Hemedti tuent et rançonnent la population.

Au Soudan, plus d’une semaine après la prise de la ville d’El-Fasher par les Forces de soutien rapide du sinistre général Hemedti, les demandes de rançons se multiplient, selon de nombreux témoignages.

Les paramilitaires obligent leurs détenus à envoyer ces demandes à leurs proches réfugiés dans d’autres pays, notamment au Soudan du Sud. RFI a pu recueillir le témoignage d’un Soudanais réfugié au camp de Gorom, dont nous ne révélons pas l’identité pour sa sécurité. Il dit avoir fait libérer deux de ses cousins en envoyant de l’argent à un milicien FSR par une application bancaire. 

Les trois premiers jours et alors que les images des atrocités commises par les FSR déferlaient sur les réseaux sociaux après la prise d’El-Fasher, Ali n’a reçu aucune nouvelle de ses proches. Et puis, une demande de rançon est arrivée par la messagerie Facebook de son cousin. Ce dernier expliquait qu’il avait fui, avec un autre cousin d’Ali, et que tous deux étaient retenus par les FSR qui exigeaient une rançon. « « Si tu ne paies pas, ils vont nous tuer » disait son message. Ils ont fait un appel vidéo montrant mes cousins avec leurs armes pointées sur sa tête. Les FSR m’ont dit : « Tu n’as que deux jours, si tu n’envoies pas l’argent, tu ne reverras jamais tes cousins » », explique-t-il.

De nombreuses demandes de rançons

Ali a immédiatement commencé à collecter de l’argent via son application bancaire auprès de 20 membres de sa famille élargie. En deux jours, il est parvenu à la somme exigée par les FSR : 2 000 dollars par personne, soit 4 000 dollars pour sauver ses deux cousins. « J’ai donc envoyé l’argent sur le compte du membre des FSR. Ils ont ensuite relâché mes cousins et les ont emmenés dans le village de Tawila. De là-bas, mon cousin m’a appelé et m’a dit qu’ils avaient été relâchés et étaient en sécurité ».

Selon Ali, de très nombreuses familles réfugiées à Gorom ont elles aussi reçu des demandes de rançon. Il déplore l’inaction de la communauté internationale face aux graves crimes en cours au Soudan.

« Dans notre groupe, il y avait des femmes, des enfants et des personnes âgées. Ils sont allés jusqu’à fouiller les couches hygiéniques des femmes et les couches des bébés à la recherche d’argent ou de bijoux. Ils ont séparé les hommes et les femmes dans notre groupe. Ils ont libéré certains et ont pris des jeunes à un entrainement rapide de deux heures. Ils les ont ensuite envoyés aux combats en les plaçant en première ligne », raconte Mohamad, 56 ans, qui a fui El-Fasher mais a été pris en piège dans des accrochages à la sortie de la ville.

Crimes de guerre à El Fasher

Le bureau du procureur de la Cour pénale internationale (CPI) a averti lundi que les atrocités commises par les Forces de soutien rapide (FSR) dans la ville d’El-Facher pourraient constituer des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité.

«Ces atrocités s’inscrivent dans un contexte de violence plus large qui ravage toute la région du Darfour depuis avril 2023. De tels actes, s’ils sont avérés, pourraient constituer des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité au sens du Statut de Rome», texte fondateur de la cour, a déclaré dans un communiqué le bureau du procureur de la CPI, qui siège à La Haye.

Après 18 mois de siège, les FSR ont pris fin octobre El-Facher, dernier verrou stratégique qui échappait à leur contrôle au Darfour, vaste région de l’ouest du Soudan.

En cours depuis avril 2023, le conflit au Soudan a fait des milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l’ONU.

 De nouvelles images satellites et l’ONG Médecins sans frontières (MSF) suggèrent samedi la poursuite des massacres dans la ville soudanaise d’El-Facher, près d’une semaine après sa prise par les paramilitaires.

Alors que les informations sur des violences contre les civils se multiplient, les chefs de la diplomatie allemande et britannique ont alerté sur une situation « absolument apocalyptique » et « véritablement terrifiante » sur le terrain.

Après 18 mois de siège, les Forces de soutien rapides (FSR, paramilitaires) de Mohamed Daglo ont pris dimanche El-Facher, dernière grande ville du Darfour (ouest) qui échappait encore à leur contrôle dans leur guerre contre l’armée du général Abdel Fattah al-Burhane.

Selon le Laboratoire de recherche humanitaire de l’université de Yale, qui analyse des vidéos et des images satellites, les dernières images datant de vendredi ne « montrent aucun mouvement à grande échelle » à El-Facher, ce qui suggère que la majorité de sa population est « morte, capturée ou cachée ».

Le laboratoire a identifié au moins 31 groupes d’objets correspondant à des corps humains entre lundi et vendredi, dans différents quartiers, sur des sites universitaires et des sites militaires. « Les indices montrant que les massacres se poursuivent sont clairement visibles », conclut-il.

Avec RFI/AFP et agences

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