Le président du parti Jil Jadid, Soufiane Djilali, dont un député est présent dans l’assemblée du régime a fait une déclaration stupéfiante dans la presse sous le titre : « Les partis politiques sont entrés en effraction en octobre 1988 ».
Alors, j’ai cru un court instant que cet allié et défenseur du régime algérien avait fait serment de repentance puisque cela signifiait que la démocratie s’était imposée par les gigantesques manifestations d’octobre 1988.
Il n’y avait rien à repérer de malhonnête dans le seul titre. C’est effectivement ce qu’il s’est passé. Nos camarades et moi-même ne serions jamais revenus en Algérie si les militants ne nous avaient pas persuadés, dans un séminaire à Montreuil, que les généraux algériens avaient compris le message de 1988.
Mais il faut entrer dans la lecture pour se réveiller et revenir à la réalité. Ce que déclarait le titre était seulement une irrésistible envie de situer l’histoire des militants de ce parti politique dans le combat démocratique de la fin des années 80’.
C’est d’ailleurs ce combat que je suis incapable de valider car je n’ai aucun souvenir des militants de ce parti et encore moins du personnage près de trente années plus tard.
Puis, en entrant dans la lecture on s’aperçoit immédiatement que ce n’est pas de la repentance mais une déclaration de confirmation d’allégeance.
Des mots et des phrases tout à fait convenus, contrôlés et sans aucun risque de dérapage pour basculer dans une opposition qui ferait perdre le sceau de respectabilité accordé par le régime. Une allégeance obtenue d’une courbette si suppliante après que le dirigeant de ce parti ait constaté l’impasse du Hirak auquel il a participé, avec tambours et youyous.
Et très rapidement, il se lance dans une critique des partis d’opposition qui n’auraient pas su gérer la transition démocratique avec leur division et le manque de vision politique pour une réconciliation nationale.
Et c’est à ce moment qu’il lance cette stupéfiante phrase « Il n’y a pas eu de volonté de construire un véritable multipartisme, mais plutôt une volonté d’utiliser des instruments politiques, au bénéfice du régime en place».
Autrement dit, les autres partis politiques n’avaient qu’une idée en tête, celle d’obtenir le partage d’un pouvoir qui aurait renforcé et légitimé le régime en place. Pas lui et son parti, bien au contraire, leur intention de lutte contre la dictature avait un objectif d’indépendance et de victoire des démocrates.
Selon lui, les autres partis politiques ont essayé de monnayer leur présence « au bénéfice du régime en place ». J’ai alors été si déstabilisé par ce culot que j’ai eu envie de vérifier si j’avais mal compris les propos.
Mais non, si j’avais déjà eu un sentiment très clair au début de la déclaration, ce qui allait suivre m’a rassuré sur ma bonne lecture et compréhension. Tout va bien, Jil Jadid est un allié du régime en place. Ceci dit, retourner sa veste une seconde fois c’est la remettre à l’endroit et confirmer le vrai visage de cet homme politique et de son mouvement.
S’il a une seule chance de me lancer un argument à la figure ce serait de me rappeler qu’une grande partie de mes anciens camarades ont fait la même chose en rejoignant l’Assemblée nationale contrôlée par les militaires. Certains sont même devenus des conseillers du régime et les déclarations sur les discussions à venir avec le gouvernement les enracinent définitivement dans les terres de cette dictature.
Mes très nombreux articles pour les dénoncer ne vont certainement pas m’empêcher de fustiger Soufiane Djilali et son parti transfuge, les graves débordements des uns ne pardonnent pas celle des autres.
Voilà que la clarté de ma compréhension est de nouveau attestée à la lecture de l’article au-delà de cette phrase stupéfiante. Tout, absolument toutes les pensées et décisions du régime algérien ont grâce à ses yeux.
L’Algérie est dans un combat acharné contre l’occident, les BRICS sont un avenir de cette planète et qu’est que ce pays effronté, la Suisse, qui veut imposer à l’Algérie d’extrader le vaillant général Nezzar pour le juger ?
Celui qui, justement, nous avait obligés de naître par effraction en 1988, au prix de morts et de nombreuses arrestations violentes.
Boumédiene Sid Lakhdar, enseignant retraité