Stéphanie Guilhou est cette poétesse au grand cœur, au visage souriant, n’est-ce pas le meilleur des partages ? Le sourire, comme pour braver le temps qui passe. Stéphanie Guilhou porte la poésie dans son regard d’où émanent et jaillissent des espoirs, ceux d’un lendemain meilleur, ceux d’un présent apprivoisé sans les regrets.
Après des études littéraires et l’histoire de l’Art, Stéphanie Guilhou décide de publier. L’écriture a en fait toujours été là comme une fidèle amie pour elle, et c’est seulement là qu’elle se dévoile comme une étoile naissante dont la lumière irradie enfin au-delà des horizons.
Les poèmes de Stéphanie Guilhou sont parfois comme des tableaux, l’œil averti y entrevoit la voie menant vers soi et là-bas, des images et des couleurs s’entremêlent afin de porter l’émotion et les sensations au paroxysme du possible dans un élan quasi-mystique au-delà des limites crées, au-delà de l’éther comme une prière qui assainit l’air pour un souffle renouvelé, rafraîchi.
Stéphanie Guilhou vient de publier un beau recueil de poésie « Au fil du temps » chez, Lys bleu éditions, une écriture arrivée à maturité, des années ont coulées laissant des traces, des couleurs, mais aussi des blessures et des cicatrices, d’où un élan poétique magnifiant le beau même en bousculant le logos pour élever l’expression poétique de l’apparent au caché toujours pour en extraire la profondeur et la beauté vers une renaissance exaltée.
Le Matin d’Algérie : Vous avez fait des études littéraire et l’histoire de l’art, vous venez de publier un beau recueil de poésie « Au fil du temps », qui est Stéphanie Guilhou ?
Stéphanie Guilhou : Comme les chats j’ai eu 7 vies, vivant chacune d’elle avec passion et parfois des moments plus longs et difficiles. C’est cette alternance de rythmes, de matière, de temporalité qui m’a donné à la fois l’élan, la créativité et l’espoir.
Suite à un baccalauréat littéraire, j’ai commencé mes études supérieures par un cursus en Histoire de l’Art et Archéologie. Chaque cours était un voyage, chaque livre une découverte. Cela a été des années très stimulantes. J’ai aussi pu participer à des chantiers de fouilles en Charente-Maritime. Un aqueduc romain, plein de galeries, de rivières souterraines, de pierres centenaires qui nous dévoilaient au fur et à mesure des fouilles leurs mystères.
Ce sont des années baignées par l’esthétisme, le beau, le romantisme, parfois le tragique aussi. Cette sensibilité et la culture développées au contact de ces œuvres font maintenant partie de moi, comme un photographe fait corps avec son appareil, l’œil s’ajuste aux tableaux, aux sculptures, aux bâtiments et cela laisse une empreinte même pour les petites choses du quotidien.
Mes projets ont ensuite évolué vers d’autres aventures, j’ai ensuite travaillé en ONG (Organisation non gouvernementale) auprès de personnes passionnées et d’une humanité très humble et très grande. Cela chamboule tout ce que vous aviez appris jusqu’à présent et transforme la notion du temps consacré, et de l’engagement. En 2010 je suis partie sur le terrain au Liban pour travailler dans un dispensaire auprès de personnes atteintes de handicap. Cela restera à ce jour ma plus belle expérience. Un temps dans ma vie où chaque instant avait un sens et où pourtant était présent ce sentiment de ne pas faire assez, de pouvoir se dépasser chaque jour un peu plus, et d’être pourtant humain, de pouvoir tant donner et pourtant d’être parfois si démuni.
Si cette expérience était à refaire je la referais sans hésiter !
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Un troisième temps est ensuite arrivé celui de la vie en entreprise, le dynamisme des projets, les premières rencontres artistiques professionnelles. Dans le cadre de mon travail nous organisions des concours de chant : un concours européen de karaoké et un concours mondial de chant dont la finale en 2018 s’est déroulée à Paris. J’ai découvert à ce moment l’environnement musical, les tournées de sélections, la magie du show, toute une culture que je connaissais à travers ma chère radio. Ce bain de musique a été pour moi un élément moteur en termes d’écriture et de rencontres. Sans cette étape je n’aurai jamais osé me lancer dans de nombreux projets.
Aujourd’hui vient le temps de l’écriture diffusée, et je continue à travailler au sein de projets associatifs.
Le Matin d’Algérie : « Au fil du temps » est un titre évocateur qui interpelle la réflexion, pouvez-vous nous en parler ?
Stéphanie Guilhou : “Au fil du temps” est mon premier livre, il a donc une signification toute particulière pour moi. Il a été écrit au fil de l’eau, au fil des années, au fil de mes expériences, au fil des rencontres… C’est un mélange de vécu, de témoignages, d’histoires, d’idées qui étaient là dans ma tête et qui ont été au fur et à mesure transposées sous formes de vers.
Au début c’était des textes, des poésies, des chansons que j’écrivais en rentrant des tournées des concours de chants. Je les partageais avec mes proches et mon entourage artistique. Peu à peu le contenu s’est densifié et la trame s’est brodée avec patience.
Un jour où j’étais entre deux jobs m’est venu l’idée de me lancer enfin, de le publier. Je ne savais pas trop où j’allais et j’ai été agréablement surprise par les retours positifs que j’ai eus. J’ai consacré le temps que j’avais de disponible à ce moment-là, à le bichonner pour sa parution et c’est ainsi que ce premier livre est né. Je suis très heureuse de pouvoir diffuser ces textes à un public plus large, ils ont longtemps été cocoonés et il est temps pour eux de vivre leurs vies et d’être appropriés par d’autres !
Cette influence musicale qui a été à l’origine en termes d’inspiration de leur construction, et de leur rythme continue de se diffuser. Certains poèmes sont transposables en chanson et ont trouvé leur place sur le piano d’amateurs qui s’en servent pour leurs compositions.
L’idée que ce que j’ai écrit en noir et blanc puisse trouver une nouvelle dimension en blanches et noires en version plus aérienne me réjouis. J’aime cette idée de transformation, d’évolution, d’adaptation. Une nouvelle vie qui prend forme pour ces textes, quelque chose qui m’étonne à nouveau sur leurs constructions.
Le Matin d’Algérie : Pour Charles Baudelaire, le temps est l’ennemi, celui qui détruit, le poète constate impuissant ses ravages, qu’en pensez-vous ?
Stéphanie Guilhou : On ne peut pas échapper au temps, il court infiniment, même si on décide de faire une pause dans sa vie le temps lui continue de courir.
Cependant je ne pense pas qu’il soit un ennemi, certes nous grandissons puis nous vieillissons mais il nous apporte aussi maturité, confiance, la solidité des liens avec ceux que nous aimons.
Quand nous disons de quelqu’un “ Je le connais depuis 20 ans” le temps est alors un fidèle ami. Il est à la fois invisible et marqueur, imperceptible et indélébile, il est ce que nous en faisons mais comme la nature il aura toujours le dernier mot !
Le Matin d’Algérie : Votre poésie est limpide, à portée de tous, et pourtant elle est d’une profondeur inouïe, comment faites-vous ?
Stéphanie Guilhou : C’est cette inspiration musicale qui lui apporte ce rythme et cette construction. Les chansons sont construites pour être diffusées, pour s’adapter à leurs publics. Quand j’écris, j’écris d’abord pour moi mais avec l’idée que cela puisse aussi se transmettre, comme un dialogue. Sans lecteurs, la littérature devient stérile et comme tout art c’est avant tout une histoire de rencontres, quelque chose qui nous a touché et qui pourra par ricochets toucher quelqu’un d’autre.
Il y a beaucoup de poèmes construits sur des témoignages aussi il y a de ma part une volonté de leur rester fidèle. Fidèle à leur histoire, à leur simplicité, à leur authenticité.
J’écris depuis toujours, lycéenne et étudiante j’aimais beaucoup participer à l’écriture d’articles et à des concours d’écriture : Théâtre, court métrage, poésie… Je pense que cela a aussi influencé mon style et ma façon d’aborder ma plume.
J’essaie toujours de faire en sorte que dans les textes que j’écris qu’il y ait quelque chose qui puisse accompagner le lecteur. Quelque chose que j’ai appris et que j’ai envie de transmettre, quelque chose que l’on m’a raconté et que j’ai trouvé d’une grande beauté. Il y a un cheminement qui continue et qui par les échanges que j’ai avec mes lecteurs s’enrichit et m’inspire.
Le Matin d’Algérie : La poésie et l’art en général peuvent sauver le monde, pour un retour salvateur vers le cœur, vers le bonheur, qu’en pense la poétesse Stéphanie Guilhou ?
Stéphanie Guilhou : Absolument, l’encre noir devient couleur en se transformant en calligraphie. Les mots ont une nuance, comme une gamme chromatique, comme une partition de musique. Je travaille avec des dictionnaires et des dictionnaires des rimes. Pour chaque mot il y a une palette, un relief, une puissance.
C’est un moyen de quitter les abysses et d’élever nos plus profondes pensées. Que ce soit par l’écriture, la peinture, le cinéma, la musique etc… l’art nous permet de toucher des choses au plus profond de nous, de transcender des douleurs, de catharsiser des blessures.
L’art c’est aussi de la légèreté, ce qui nous permet de nous évader, de s’imprégner d’un lieu, de personnes, de cultures.
Nous sommes entourés d’art, et de poésie. La poésie se trouve sur la façade d’un immeuble, dans le vent qui balaie les feuilles d’automne, dans les chansons, à chaque printemps, dans la solitude de l’hiver, dans le spleen du métro un lundi matin, dans un échange de regards…
C’est un moyen de mettre en vers notre quotidien du plus banal canard dans le café aux moments les plus extraordinaires qui illuminent nos vies.
C’est aussi une histoire de transmission de vécu, d’impressions d’émotions. C’est ce qui fait notre humanité et que nous devons laisser en patrimoine chacun à son échelle et avec le savoir-faire de son art.
Le Matin d’Algérie : Quels sont les poètes qui vous influencent ?
Stéphanie Guilhou : J’aime beaucoup Victor Hugo, j’aime son romantisme et la façon dont ses poèmes peuvent être poignants. Au cours de mes études littéraires j’ai eu la chance d’étudier les grands classiques de la littérature française : Baudelaire, Musset, Apollinaire, Rimbaud… ça a été une chance et une éducation aux belles lettres.
Je garde une tendresse particulière pour Prévert qui a marqué mon enfance, et pour son poème Barbara.
Il y a dans la musique aussi beaucoup de poésie et j’ai été fortement influencé par les mots d’Aznavour. Chaque mot à sa place, sa puissance et sa justesse.
J’aime aussi beaucoup la modernité et la tendresse des paroles de Jean-Louis Aubert ainsi que l’élégance et la chaleur de la musique d’Anna Chedid dite NACH, petite fille d’Andrée Chedid.
Le Matin d’Algérie : Avez des projets en cours ou à venir ?
Stéphanie Guilhou : J’ai un nouveau recueil de poèmes consacré au Liban qui est en cours d’écriture. Cela tient une place dans mon cœur depuis longtemps, il y a cette envie de le partager. Il sera illustré et cette fois-ci plus construit comme des tableaux.
Je continue à écrire des poèmes et des chansons, qui sont là bien sagement dans un cahier le temps que des projets arrivent à maturité.
Après j’ai le projet d’écriture d’un livre biographique sur une artiste, et toujours des idées de nouvelles de romans, d’articles qui foisonnent et qui j’espère un jour verront le jour !
Entretien réalisé par Brahim Saci