Plus de cent personnes ont été tuées jeudi dans une attaque contre une académie militaire dans le centre de la Syrie, au moment où la Turquie menait des frappes contre les zones kurdes qui ont fait au moins neuf morts.
L’attaque au drone qui a visé une cérémonie de promotion d’officiers du régime à Homs, imputée par l’armée syrienne à « des organisations terroristes », a fait « plus de 100 morts, dont environ la moitié de diplômés de l’armée et 14 civils », selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH).
L’OSDH, une organisation basée au Royaume-Uni et disposant d’un vaste de réseau de sources en Syrie, a également fait état de plus de 125 blessés.
Le ministre syrien de la Santé Hassan al-Ghobash a annoncé à la télévision jeudi soir un bilan « préliminaire » de 80 morts, « dont six femmes et six enfants », et environ 240 blessés.
« Des organisations terroristes » ont visé la cérémonie « à l’aide de drones chargés d’explosifs », a affirmé l’armée syrienne, promettant de « riposter fermement » à « cette lâche attaque terroriste inédite ».
L’attaque n’a pas été revendiquée dans l’immédiat. Des groupes jihadistes qui contrôlent une partie du territoire syrien ont parfois recours aux drones armés.
Un pays ravagé
La Syrie est à genoux. Des millions de Syriens ont fui la guerre et la répression qui ravagent le pays depuis 2011. Les forces gouvernementales avaient repris en mai 2017, au prix de violents combats, le contrôle total de la ville de Homs, devenue un fief des rebelles après le soulèvement pro-démocratie de 2011.
Elle ont riposté jeudi à l’attaque de Homs par des bombardements qui ont visé, selon des habitants, la région d’Idleb, dernier bastion rebelle du pays, dans le nord-ouest. L’OSDH a fait état de quatre civils tués.
Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres « est profondément inquiet » après l’attaque à Homs, a déclaré son porte-parole Stéphane Dujarric. Il « est également profondément préoccupé par les informations faisant état de bombardements de représailles » dans le nord-ouest de la Syrie.
Dans la nuit de mercredi à jeudi, cinq membres d’une même famille avaient été tués dans un bombardement des forces du régime sur une zone rebelle dans la province d’Alep (nord-ouest).
Le conflit en Syrie, déclenché par la répression de manifestations pro-démocratie, a fait plus d’un demi-million de morts et morcelé le pays. Sur ces 13 millions de personnes, recensés par l’Onu en 2021, 6,6 millions ont quitté leur pays. Près d’un réfugié sur 4 dans le monde est Syrien. La majorité des réfugiés syriens sont accueillis par des pays de la région. Ces chiffres ne sont malheureusement pas définitifs.
« Escalade »
Les Kurdes ont notamment établi une administration autonome dans le nord-est, qui est régulièrement prise pour cible par l’armée turque.
Jeudi, des drones turcs ont visé des sites pétroliers, deux centrales électriques, un barrage et une usine dans la province de Hassaké, contrôlée par les Forces démocratiques syriennes (FDS), une coalition dominée par les Kurdes.
La Turquie affirme agir en représailles à un attentat qui a visé dimanche le ministère de l’Intérieur à Ankara, blessant deux policiers.
« Six membres des forces de sécurité ont été tués dans un raid » et « deux civils » circulant à moto ont péri dans une autre frappe, selon les forces kurdes. Le porte-parole des FDS, Farhad Chami, a fait état d’un neuvième mort.
La Turquie a affirmé que les auteurs de l’attentat d’Ankara, revendiqué par le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, kurde turc), avaient été formés en Syrie, des accusations démenties par le chef des FDS, Mazloum Abdi.
Les FDS ont été le fer de lance de la lutte contre le groupe jihadiste Etat islamique (EI) en Syrie en 2019 et jouissent toujours de l’appui de Washington.
Ankara considère la principale composante des FDS, les YPG (Unités de protection du peuple), comme une extension du PKK, qualifié d' »organisation terroriste » par la Turquie.
« Il y a une escalade claire depuis les menaces turques » contre les zones contrôlées par l’administration kurde autonome dans le nord-est de la Syrie, a affirmé M. Chami.
En riposte à l’attentat d’Ankara, la Turquie a mené également des frappes contre des positions du PKK dans le nord de l’Irak, pays frontalier de la Syrie et de la Turquie.
« La situation empire »
Après les frappes de jeudi, des colonnes de fumée étaient visibles au dessus du site pétrolier de Qahtaniya, près de la frontière turque, selon des correspondants de l’AFP, tandis que des pompiers se dirigeaient vers la principale centrale électrique de Qamichli, dans la province de Hassaké.
Sur le marché central de Qamichli, les commerçants et les rares clients avaient les yeux rivés sur les écrans de télévision et leurs téléphones portables, suivant avec angoisse les informations.
« La situation empire chaque jour. La Turquie ne nous laisse pas souffler et nous vise chaque jour. Nous voulons juste que nos enfants vivent en paix », affirmait Hassan al-Ahmad, un commerçant de 35 ans.
L’administration autonome kurde a appelé jeudi « la communauté internationale, la coalition internationale » anti-EI ainsi que la Russie à « prendre des positions capables de dissuader » la Turquie, qui a mené entre 2016 et 2019 trois opérations d’envergure contre les forces kurdes en Syrie.
Avec AFP
🚨Selon des sources syriennes, une attaque kamikaze d'un drone contre une cérémonie de remise de diplômes pro-Assad à l'école militaire de Homs en Syrie a fait plus de 60 morts. Plusieurs généraux du régime syrien ainsi que d'autres officiers qui assistaient à la cérémonie ont… pic.twitter.com/RQ36fl3oZA
— LSI AFRICA (@lsiafrica) October 5, 2023