Les relations entre l’Algérie et la France connaissent une nouvelle phase de tensions, marquée par des déclarations virulentes du chef de l’Etat algérien Abdelmadjid Tebboune et des réactions officielles suite à la récente visite de la ministre française de la culture au Sahara occidental.
Tebboune fustige le passé colonial français
À l’occasion de la Journée nationale du chahid, célébrée chaque 18 février en hommage aux sacrifices du peuple algérien durant la colonisation française (1830-1962), Abdelmadjid Tebboune a prononcé un discours empreint de fermenté.
Dans un message officiel, publié par la présidence algérienne, Tebboune a dénoncé « un colonialisme brutal et destructeur » qui a « entravé le progrès du peuple algérien pendant plus de 130 ans ». Il a qualifié la colonisation française de « colonialisme de peuplement », animé par « l’illusion de la survie » et indifférent au gaspillage des richesses du pays.
Il a également rappelé que le peuple algérien « a toujours rejeté la présence coloniale », affirmant que la lutte contre l’occupant a été marquée par une résistance inébranlable jusqu’à la victoire finale.
Une crise diplomatique accentuée par la question du Sahara occidental
Dans un contexte déjà marqué par des tensions diplomatiques, le ministère algérien des Affaires étrangères a vivement réagi à la récente visite de la ministre française de la Culture, Rachida Dati, au Sahara occidental.
Dans un communiqué officiel, le ministère a qualifié cette visite d’« affaire extrêmement dangereuse », dénonçant un « mépris flagrant de la légitimité internationale » de la part d’un membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU. Alger estime que cette démarche française vise à « consolider le fait accompli marocain » sur un territoire dont le processus de décolonisation reste inachevé.
Le communiqué critique également « une solidarité malsaine entre anciennes et nouvelles puissances coloniales », affirmant que la France s’exclut elle-même des efforts onusiens visant à résoudre le conflit sahraoui sur la base du respect du droit à l’autodétermination.
La visite de Rachida Dati dans le Sahara occidental a été qualifiée d’« historique » par la ministre elle-même, qui devient ainsi la première représentante du gouvernement français à se rendre officiellement dans ces territoires revendiqués par le Maroc. Cette visite s’inscrit dans la continuité du changement de position de la France sur la question sahraouie, annoncé par le président Emmanuel Macron en juillet dernier, lorsqu’il a apporté son soutien au plan d’autonomie marocain.
Des tensions diplomatiques de plus en plus vives
Les relations entre Alger et Paris se sont détériorées depuis l’été dernier, lorsque l’Algérie a rappelé son ambassadeur en France en raison du soutien affiché par Paris à la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental.
L’arrestation en novembre dernier de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal par les autorités algériennes a encore envenimé la situation. Accusé d’« atteinte et menace à l’unité nationale » en vertu de l’article 87 du Code pénal algérien, Sansal avait affirmé sur des chaînes françaises que certaines régions du nord-ouest de l’Algérie appartenaient historiquement au Maroc et que la France les avait annexées à l’Algérie durant la colonisation.
Cette montée des tensions, alimentée par des divergences historiques et géopolitiques profondes, semble marquer un tournant dans les relations franco-algériennes, avec un dialogue de plus en plus difficile entre les deux pays.
Rabah Aït Abache