Site icon Le Matin d'Algérie

Tragédie d’Oued El Harrach : quand le DGSN oublie la déontologie !

Victimes de la chute du bus à Oued El Harrach : Hôpital Zmirli

Une délégation officielle rend visite aux blessés à l'hôpital

Dans le box réservé aux malades de l’hôpital Zemirli d’El Harrach, la scène avait quelque chose d’irréel. Autour du chauffeur rescapé, étendu sur son lit d’hôpital, encore hagard après avoir survécu à l’accident qui a coûté la vie à 18 personnes, se tenaient le ministre de l’Intérieur, le secrétaire général de la présidence et de hauts responsables.

Au milieu d’eux, le directeur général de la Sûreté nationale menait lui-même l’interrogatoire. Quand bien même il ne s’agissait que d’une prise d’information, le moment filmé par les caméras heurte : ce qui devrait rester un acte d’enquête discret et protégé s’est transformé en une mise en scène publique, exposant la douleur et la fragilité d’un homme à la curiosité de tous.

Ce spectacle pose un problème de fond : peut-on décemment interroger un survivant encore sous le choc quelques heures après une telle tragédie, et cela par le premier responsable de la police,  et le faire devant les médias ? 

En agissant ainsi, la DGSN a brouillé les frontières entre la recherche de vérité et la communication, entre la justice et le spectacle. L’image renvoyée est celle d’une institution plus soucieuse de visibilité que de rigueur procédurale et de respect humain.

Au-delà du cas particulier, c’est une question de principes. La déontologie n’incombe pas uniquement aux journalistes, comme l’a rappelé l’Autorité de régulation de l’audiovisuel : elle s’impose aussi aux institutions.

Respect de la dignité des personnes, protection de leur intimité, présomption d’innocence — ces règles fondamentales ne peuvent être sacrifiées au profit d’un effet de communication.

Un chef de police qui se substitue à l’enquêteur sur un lit d’hôpital ne donne pas l’image d’une autorité forte, mais celle d’un pouvoir qui instrumentalise la douleur. Transformer l’émotion provoquée par le drame en écran de fumée destiné à faire oublier les dysfonctionnements institutionnels.

Cet épisode, au lieu de renforcer la confiance en les institutions, l’érode. Car ce dont les citoyens ont besoin, après un drame pareil, ce n’est pas de démonstrations de force sous les projecteurs, mais d’une enquête sérieuse, menée dans le respect des règles de droit et de la dignité humaine.

Dans une société déjà marquée par une méfiance envers ses institutions, la crédibilité ne se gagne pas à coups de caméras, mais par l’exemple éthique et la transparence réelle.

La Rédaction 

Quitter la version mobile